freehug;4918081 a dit :
Je suis assez partagée concernant la bourse au mérite, mais je tenais à dire qu'un des problèmes majeurs pour les élèves défavorisés financièrement c'est qu'ils sont complètement exclus des grandes écoles. Déjà, faire une prépa en bossant à côté, c'est IMPOSSIBLE. Entre les cours qui prennent la journée, les khôlles parfois tard (genre 19h, ça arrive, et souvent), les devoirs à rendre et les devoirs surveillés le samedi matin qui peuvent durer jusqu'à 6h, à moins de se dédoubler, y a pas moyen. Et même en se démerdant avec l'internat et quelques aides, après, les frais de scolarité des grandes écoles, c'est de 2000€ à 15000€ l'année. Les écoles de commerce, ça démarre à 7000€. Et aucune dispense, sauf pour UNE école, la deuxième au classement national (donc accroche-toi pour l'avoir). Ce serait pas mal de les obliger à dispenser les boursiers de frais de scolarité. Ensuite, les cursus les plus cotés en fac (je pense notamment aux IAE, sortes d'écoles de commerce publiques), c'est la même chanson: tellement de cours et de travail chez soi que si on n'a pas de thunes, pas la peine d'y penser, d'autant qu'ils n'aiment pas trop les étudiants qui bossent à côté (y en a qui refusent carrément les dispenses de TD ou de délivrer des attestations de convocation aux partiels au motif que "entre études et travail, il faut choisir"). C'est même pas d'abord une question de capital culturel au départ, c'est que même ceux qui sont bons malgré les difficultés de base, ils n'ont pas accès aux filières d'excellence.
La bourse au mérite était presque une aide individualisée pour des profils "hors du commun" ; alors oui, on pourrait se contenter de leur attribuer des aides sociales, leur ouvrir des accès aux grandes écoles sur critères sociaux, et laisser tomber l'idée de mérite qui file de l'urticaire à certaines... Sauf que c'est stigmatisant. Les élèves qui intègrent les Grandes écoles le font grâce à leur travail, leur culture, leur mérite, oui, ce n'est pas un gros mot.
Qu'on encourage et qu'on récompense le mérite de ces élèves (qui réussissent en dépit de leurs origines sociales), en quoi est-ce que ça va à l'encontre de la réduction des inégalités à l'école ?
Quand je dis qu'ils font mentir Bourdieu, ce n'est pas pour prouver que "vous voyez, c'est possible !", car oui,
ils sont quantité négligeable ramenés à l'ensemble de la population étudiante. Est-ce pour autant une raison de les négliger ?
Les bénéficiaires de cette bourse au mérite
ne sont pas des privilégiés ; mais ils ont visiblement le bagage culturel pour prétendre intégrer les grandes écoles (impossible de travailler en parallèle, cf le post de Freehug).
On fait quoi pour eux, spécifiquement pour eux ? Ils n'ont qu'à suivre des études qu'ils peuvent concilier avec un travail ? La prépa et les grandes écoles resteront le pré carré des classes moyennes et aisées, c'est ça l'égalité républicaine ? (parce que là, oui, on raisonne en cadre budgétaire contraint : on ne peut pas subventionner les études de TOUS les étudiants des grandes écoles : l'état dépense déjà beaucoup plus sur un étudiant de grande école que sur un étudiant de fac...)
Encourager « la réussite du plus grand nombre », c'est justement encourager LES modèles de réussite (on ne réussit pas tous en suivant le même modèle).
Franchement, je comprends de moins en moins certains commentaires ; on est d'accord sur le constat que l'école reproduit les inégalités sociales, que le système français est très inégalitaires. Et vous accusez la bourse au mérite x critères sociaux de participer à ce système ? Mais c'est tout le contraire ! C'est ce genre de dispositif qui permet aux étudiants issus des milieux les plus modestes de pouvoir intégrer les grandes écoles.
Je viens régulièrement lire les commentaires, et de nombreuses critiques formulées dans les commentaires ou en privé depuis que j'écris pour mad m'ont énormément aidé à progresser, j'en remercie d'ailleurs les lectrices pour ça
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(sur ce je quitte Internet pour les 4 prochaines heures, peace !