Elle s'est levée, a regardé sa robe dans le miroir, puis elle a fermé la porte à clé.
Son amant d?un soir ne s?était pas encore remis de leur soirée bien arrosée. Il dormait encore à point fermé, elle pouvait donc se faufiler discrètement par la cage d?escalier. Il avait un double des clés, et pouvait donc s?échapper lui aussi de ce motel lamentable quand il aurait retrouvé ses esprits. Elle ne voulait pas le confronter, elle ne voulait pas le revoir? Alors à quoi bon faire semblant ? Il valait mieux être lâche, comme toujours. Elle préférait quitter le vieux bâtiment sur la pointe des pieds et rester celle avec qui il avait partagé une nuit passionnée dans ce lit crasseux. Elle préférait s?en aller, avant qu?il ne se réveille lui aussi.
Elle se souvenait du goût âpre de sa bouche sur la sienne, elle se remémorait son parfum de tabac et ses mains calleuses. Il n?était vraiment pas son genre d?homme. Elle ne comprenait pas comment elle avait bien pu tomber dans son lit. L?alcool l?y avait sûrement aidé. Beaucoup d?alcool.
Leur rencontre avait été plus que banale. Elle avait bu plus que de raison, comme tous les soirs, et il était venu l?accoster au bar. Elle se souvenait avoir accepté un autre verre, puis un autre, puis encore un autre. Ils s?étaient mis à discuter de lui, d?elle, de la vie en général. Elle se rappelait ses fossettes quand il souriait, ses dents d?un blanc éclatant et cette tâche de vin sur sa chemise. Son allure était plus que négligée, mais il avait du charme. Elle ne le trouvait pas beau. Mais il avait du charisme, et cela suffisait amplement à combler ses basses attentes d?un soir. Elle se rappelait enfin qu?elle n?avait pas payé sa note. Le barman, habitué à la voir traîner dans ce même club miteux tous les soirs, avait tout mis sur son compte. Elle allait encore avoir des dettes à payer.
Arrivée en bas des marches usées de l?escalier, elle s?arrêta un instant pour juger de son apparence. La femme que lui reflétait la vitrine du vaisselier était belle mais élimée. Sa robe de soie verte était passée de mode depuis au moins trois saisons. Son manteau gris souris était tellement rapiécé qu?on pouvait se demander s?il n?avait pas fait la guerre. Ses cheveux blonds et désordonnés ressemblaient à un nid d?oiseau. Le rouge de ses lèvres avait bavé, et son teint était plus cireux que d?habitude, lui donnant dix années de plus. Elle paraissait vieille et fatiguée. Elle ne s?attarda pas plus longtemps sur cette image défraîchie, et passa la porte du vestibule pour se retrouver dans les rues de Paris en plein hiver. Le froid lui glaça les os, et le souffle du vent envahit jusque ses poumons. Elle tenta d?avancer et de combattre la brise, mais ses muscles la faisait tellement souffrir qu?elle tomba plusieurs fois. Personne autour ne songea à lui venir en aide. Ils étaient tous trop pressés, trop occupés.
Soudain une main chaude se posa sur son épaule. Elle leva les yeux pour connaître cette personne pleine de mansuétude qui voulait bien l?aider à se relever. Au fond de son c?ur, elle espérait que ce soit son amant, cet homme qu?elle avait choisit d?ignorer. Ne serait-il pas terriblement romantique qu?il lui court après dans ce froid polaire ? Ne serait-il pas merveilleux qu?il cherche à la connaître et à avoir plus qu?une aventure avec elle ? Ne serait-elle pas simplement chanceuse qu?un homme comme lui la remarque et lui touche le c?ur ? En une fraction de seconde, le temps de se retourner, toutes ces hypothèses lui vinrent en tête.
Puis aussi rapidement, elles éclatèrent comme des bulles de savon quand elle comprit que ce n?était pas lui. On lui rendait simplement son écharpe tombée un peu plus loin. Ce n?était pas cet homme, mais ce n?était pas grave. Après tout, elle n?avait jamais eu besoin d?une présence masculine à ses côtés pour vivre sa vie. Elle n?avait besoin d?eux que pour une nuit, pour assouvir des besoins bien primaires. Elle les utilisait, comme la Vie l?avait utilisée. Elle pensa un instant à cette vie. Affalée sur le sol d?un blanc de craie, les flocons se mêlant à ses mèches blondes, elle se dit qu?elle avait l?air pitoyable et elle ne s?étonnait pas qu?on ne daigne même pas lui jeter un coup d??il. Tout se résumait en fait à ça : elle qui tombe et qui essaye de trouver un rempart auquel s?accrocher. C?était toujours la même histoire qui se répétait ; et même si elle criait haut et fort qu?elle était assez solide pour l?assumer, elle haïssait sa vie.
Mais voilà, c?était la sienne de vie. Alors, elle se releva tant bien que mal? Comme toujours, comme à chaque fois qu?elle était mis à terre, elle se relevait pour continuer d?avancer.
Son amant d?un soir ne s?était pas encore remis de leur soirée bien arrosée. Il dormait encore à point fermé, elle pouvait donc se faufiler discrètement par la cage d?escalier. Il avait un double des clés, et pouvait donc s?échapper lui aussi de ce motel lamentable quand il aurait retrouvé ses esprits. Elle ne voulait pas le confronter, elle ne voulait pas le revoir? Alors à quoi bon faire semblant ? Il valait mieux être lâche, comme toujours. Elle préférait quitter le vieux bâtiment sur la pointe des pieds et rester celle avec qui il avait partagé une nuit passionnée dans ce lit crasseux. Elle préférait s?en aller, avant qu?il ne se réveille lui aussi.
Elle se souvenait du goût âpre de sa bouche sur la sienne, elle se remémorait son parfum de tabac et ses mains calleuses. Il n?était vraiment pas son genre d?homme. Elle ne comprenait pas comment elle avait bien pu tomber dans son lit. L?alcool l?y avait sûrement aidé. Beaucoup d?alcool.
Leur rencontre avait été plus que banale. Elle avait bu plus que de raison, comme tous les soirs, et il était venu l?accoster au bar. Elle se souvenait avoir accepté un autre verre, puis un autre, puis encore un autre. Ils s?étaient mis à discuter de lui, d?elle, de la vie en général. Elle se rappelait ses fossettes quand il souriait, ses dents d?un blanc éclatant et cette tâche de vin sur sa chemise. Son allure était plus que négligée, mais il avait du charme. Elle ne le trouvait pas beau. Mais il avait du charisme, et cela suffisait amplement à combler ses basses attentes d?un soir. Elle se rappelait enfin qu?elle n?avait pas payé sa note. Le barman, habitué à la voir traîner dans ce même club miteux tous les soirs, avait tout mis sur son compte. Elle allait encore avoir des dettes à payer.
Arrivée en bas des marches usées de l?escalier, elle s?arrêta un instant pour juger de son apparence. La femme que lui reflétait la vitrine du vaisselier était belle mais élimée. Sa robe de soie verte était passée de mode depuis au moins trois saisons. Son manteau gris souris était tellement rapiécé qu?on pouvait se demander s?il n?avait pas fait la guerre. Ses cheveux blonds et désordonnés ressemblaient à un nid d?oiseau. Le rouge de ses lèvres avait bavé, et son teint était plus cireux que d?habitude, lui donnant dix années de plus. Elle paraissait vieille et fatiguée. Elle ne s?attarda pas plus longtemps sur cette image défraîchie, et passa la porte du vestibule pour se retrouver dans les rues de Paris en plein hiver. Le froid lui glaça les os, et le souffle du vent envahit jusque ses poumons. Elle tenta d?avancer et de combattre la brise, mais ses muscles la faisait tellement souffrir qu?elle tomba plusieurs fois. Personne autour ne songea à lui venir en aide. Ils étaient tous trop pressés, trop occupés.
Soudain une main chaude se posa sur son épaule. Elle leva les yeux pour connaître cette personne pleine de mansuétude qui voulait bien l?aider à se relever. Au fond de son c?ur, elle espérait que ce soit son amant, cet homme qu?elle avait choisit d?ignorer. Ne serait-il pas terriblement romantique qu?il lui court après dans ce froid polaire ? Ne serait-il pas merveilleux qu?il cherche à la connaître et à avoir plus qu?une aventure avec elle ? Ne serait-elle pas simplement chanceuse qu?un homme comme lui la remarque et lui touche le c?ur ? En une fraction de seconde, le temps de se retourner, toutes ces hypothèses lui vinrent en tête.
Puis aussi rapidement, elles éclatèrent comme des bulles de savon quand elle comprit que ce n?était pas lui. On lui rendait simplement son écharpe tombée un peu plus loin. Ce n?était pas cet homme, mais ce n?était pas grave. Après tout, elle n?avait jamais eu besoin d?une présence masculine à ses côtés pour vivre sa vie. Elle n?avait besoin d?eux que pour une nuit, pour assouvir des besoins bien primaires. Elle les utilisait, comme la Vie l?avait utilisée. Elle pensa un instant à cette vie. Affalée sur le sol d?un blanc de craie, les flocons se mêlant à ses mèches blondes, elle se dit qu?elle avait l?air pitoyable et elle ne s?étonnait pas qu?on ne daigne même pas lui jeter un coup d??il. Tout se résumait en fait à ça : elle qui tombe et qui essaye de trouver un rempart auquel s?accrocher. C?était toujours la même histoire qui se répétait ; et même si elle criait haut et fort qu?elle était assez solide pour l?assumer, elle haïssait sa vie.
Mais voilà, c?était la sienne de vie. Alors, elle se releva tant bien que mal? Comme toujours, comme à chaque fois qu?elle était mis à terre, elle se relevait pour continuer d?avancer.