Le coup de gueule de Jameela Jamil contre une pub de Kim Kardashian

27 Avril 2016
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A mon avis, si c'était pour tomber dans la neutralité, mieux valait ne pas faire d'article : oui, bien sûr qu'elle a le droit de faire cette pub. Elle aurait eu le droit même si elle n'avait pas mis de "si", en fait. Et Khaled a le droit de trouver que le cuni c'est nul, et Madmoizelle a le droit de critiquer. Ce serait un peu triste de devoir cautionner tout ce que les gens disent et font à partir du moment où c'est légal.

Le "oui mais la pub ne m'oblige à rien"... Les sites anti-IVG ou la Scientologie non plus, c'est pas pour ça qu'on va s'empêcher de gueuler. En fait, l'immense majorité des normes de genre n'oblige plus personne à rien, et pourtant c'est toujours de la merde.

La sororité c'est cool, mais si on doit acclamer tout ce que font les femmes qui réussissent, la prochaine fois on se tape un article sur comment Margaret Thatcher roxxait du poney.
 

skippy01

Peau lisse partout, justice nulle-part.
16 Avril 2017
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Sauf qu'il ne suffit pas de dire qu'on a le choix pour que ce soit vrai :hesite:
Il y a tout un contexte à prendre en compte ; on est constamment bombardées d'injonctions à la minceur, d'images retouchées qui nous poussent à avoir des attentes irréalistes et de grossophobie ambiante.
D'ailleurs, vous avez écrit plein d'articles qui tiennent ce discours, pourquoi faire une exception dans ce cas-ci ? Je fais peut-être une fixette sur la téléréalité, n'empêche que cet article crédibilise vachement ce que j'en dis.
 
18 Juillet 2016
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Je trouve ça un peu bizarre de s'en prendre directement au post d'une personne qui fait de la pub, en fait. Je ne sais pas si il y a eu un réel buzz, mais il y a tellement de produit qui ne méritent pas de pub que je me demande : pourquoi là plus qu'à un autre moment ? les ados sont une cible commerciale comme une autre, et y'a énormément de produits qui incite à se conformer à un idéal. Pour le coup, Kim Kardashian fait tourner son business, comme elle le fait avec le reste de sa vie. Alors certes, ça va inciter l'achat à des filles qu'en auront pas besoin, mais je ne pense pas que l'on puisse non plus mettre en faute de cette manière une personnalité public comme si elle était l'unique source d'éducation des enfants (même si je suis bien d'accord qu'elle influence vachement, hein ! Mais c'est son boulot aussi. Et si elle cautionne/apprécie le produit (ou même pas), pourquoi pas en faire la pub, aussi ?)
 
  • Big up !
Réactions : severuspotter

Valentina-

Wild child
31 Mars 2012
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Tout ce que je vois dans cette pub c'est tout ce que je déteste (décidemment)

- Une meuf bonne dans une position sexualisée car ça fait vendre
- la meuf en question est connue pour être bonne et essentiellement pour ça
- bonne dans le sens "ultra dans les critères physique de la société actuelle" (car c'est la seule et unique façon d'être bonne bien sûr)
- la meuf a fait plein de chirurgie pour arriver à ce goal de beauté
- la meuf en question a une centaine de millions de followers donc svp ne niez pas son influence qu'elle le veuille ou non
- comme il a déjà été dit c'est l'icône d'une majorité d'adolescentes, l'âge où justement on est hyper influençable et naïf
- L'objet en question promeut la minceur (pour promouvoir les critères physiques justement, m'enfin c'est évident faudrait être aveugle pour pas saisir où est le problème :lol:)

Bref ça me rappelle juste qu'on vit dans une société où la femme fait vendre tant qu'elle est réduite à son corps, présentée sous l'angle "sexuel" et où d'ailleurs pour réussir ma belle, en tant que meuf, le meilleur moyen c'est bien d'être bonne (physiquement dans les codes) et de bien vouloir montrer ton cul.

Après oui Kim K a fait le choix de cette pub en toute liberté, merci Madmoizelle. :lol:
 
16 Septembre 2012
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Quand j'étais ado, je me trouvais grosse et grasse alors que j'étais dans la "norme", mais je me comparais aux filles de la tv. Jje voulais être mince comme Hannah Montana , les filles de HSM ou les soeurs Halliwell sans me dire que peut être on avait juste pas la même morphologie (d'ailleurs, je connaissais même pas ce mot) , qui elles étaient adultes et formées alors que moi j'avais pas fini ma puberté. Résultat, je comptais les calories de tout ce que je mangeais, en mode "si je mange ce paquet de dragibus/BN, j'évite de manger un dessert/la baguette/le saucisson. Heureusement, j'ai arrêté parce que j'étais trop nulle en maths et c'était juste des approximations TRÈS approximatives.
Tout ça pour dire que non, la plupart des ados ne comprennent pas comme une adulte le pourrais. surtout qu'ils évoluent dans un endroit où ils doivent tous se conformer si ils ne veulent pas se retrouver dans un désert social (collège et lycée, ou Le cercle de l'enfer , comme je les surnomme)
 
19 Mai 2016
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Paris
Par avance désolée du post assez long, pas mal d'explications et de contexte dedans :)

Je ne commente pas souvent, mais là, je ne pouvais pas faire autrement : quand je suis arrivée à la fin de l'article, j'étais surprise, et aussi assez déçue.

D'autres personnes ont déjà très bien expliqué que le post de Kim Kardashian est de nature publicitaire, que le but de la publicité, c'est de vendre, et qu'il est fallacieux de parler de “choix libre” face à ce genre de choses. Certaines personnes se spécialisent dans l'étude du comportement humain, et il a assez bien été montré qu'il est possible d'orienter (avec plus ou moins de succès) le choix des gens, que ce soit pour vendre plus ou pour résoudre certains problèmes de santé publique.

Dans ce deuxième cas, on parlerait de “nudges”, une façon “douce” d'orienter les gens vers le “bon” choix. Ainsi, il y a une énorme différence entre une situation où tout le monde est donneur d'organe par défaut et jusqu'à preuve du contraire, et une situation où la norme est au contraire de ne pas prélever d'organes à moins que la personne l'ait fait clairement savoir de son vivant. Dans les deux situations, tout le monde reste parfaitement libre de faire connaître et respecter ses préférences. Dans les faits, on constate que la plupart des gens n'ont pas forcément un avis très tranché, ou qu'ils n'ont pas vraiment réfléchi à la question, et que c'est la décision “par défaut” qui prédomine.

Bref : énormément de facteurs influencent notre comportement. Même quand on est “déconstruit”. Même quand on suit la recommandation de l'article. Se référer à cette recommandation, c'est loin d'être assez. C'est un peu comme dire qu'aujourd'hui tout le monde a le choix de se tenir informé de l'actualité. Oui, c'est vrai, “on a le choix”. Mais il ne s'ensuit pas que tout le monde prendra le temps, fera usage de son esprit critique, etc. Les gens ne font pas le choix d'être abreuvé de fake news et de parfois tomber dans le panneau.

La question du choix (et du “féminisme du choix”, choice feminism en anglais) est au coeur des débats et de la théorie féministe actuelle. Pour mieux comprendre ce qui se joue derrière l'utilisation de tels arguments, un peu de contexte ne ferait pas de mal.

Dès les années 1920, aux Etats-Unis (la décennie de la prohibition, du swing, des flappers...) on commence à concevoir un lien entre émancipation féminine et consommation. C'est d'ailleurs la décennie qui voit l'émergence des premiers supermarchés (enfin, de ce qu'on reconnaîtrait comme...), le développement de la publicité, de l'industrie de la beauté, etc. Pour l'historienne Nancy Cott, le féminisme “blanc” a commencé, à cette époque, à envoyer le message que ce qui relevait du choix et de la réalisation de soi se réduisait de plus en plus au domaine de la consommation.

Saut dans le temps. Je suis désolée, je coupe court et c'est déjà trop long. La deuxième évolution ou inflexion importante, c'est après les années 1970-80 – après la révolution sexuelle et la bataille pour le droit à l'avortement. Quand les anti-avortement se sont positionnés comme “pro-vie”, une réaction a notamment été de réaffirmer la notion de choix. Les militant.e.s se sont déclaré.e.s “pro-choix” plutôt que pro-avortement. C'est bien normal, autant d'un point de vue rhétorique que d'un point de vue idéologique. Il faut le répéter, et c'est dur parfois, que lorsqu'on défend le droit à l'avortement, on défend l'exercice d'un libre choix, le choix de disposer de son corps, d'avorter... ou pas.

Bref : quelqu'un comme R. Solinger (Beggars and Choosers) parle des problèmes qui ont finit par se poser dans le cadre de ce nouveau “féminisme du choix”. Les femmes noires, les femmes d'origine hispanique et les Native Americans, aux Etats-Unis, furent historiquement les cibles de programmes de stérilisation forcée. Pour ces femmes qui militaient pour la possibilité d'avoir un enfant, l'avortement était assez loin de leurs préoccupations, et elles ont critiqué l'égocentrisme de certaines militantes blanches qui ne regardaient pas plus loin que leur propre situation. Le titre de l'ouvrage “Beggars and Choosers” fait référence au proverbe anglais “beggars can't be choosers” (c'est-à-dire “ceux qui ne sont pas en position de décider ne peuvent pas se permettrent de faire les difficiles / de faire la fine bouche” – to beg signifiant “supplier”, voire “mendier”). Pour R. Solinger, ce discours pro-choix a formé la base de nouvelles critiques des mères célibataires et des mères adolescentes. Si l'avortement est un choix, alors certains diront que les filles-mères ont fait le choix de ne pas avorter, que tant pis, c'était le mauvais choix. Il y aurait de bon choix et de mauvais choix, et les personnes qui les font.
Quelqu'un a parlé (en page 1 je crois) d'individualisme : c'est exactement ça. C'est une perspective très individualiste que de tout réduire au choix individuel. Les femmes sont responsables de leurs choix, celles qui le veulent et qui sont capables de leur faire sont en droit d'avoir des enfants. Problème : les personnes qui ont suffisamment d'argent + sont capables physiquement de prendre cette décision ont le choix. Les autres non.

C'est toujours le même problème vu sous un angle différent lorsqu'on regarde le monde du travail. Etats-Unis, début du XXème siècle, les conséquences de la Révolution Industrielle : ceux qui s'opposaient à toute régulation des conditions de travail, salaire minimum... étaient les premiers à dire que les ouvriers et ouvrières acceptaient de leur plein gré les contrats de travail qui leur étaient proposés. Que le marché, ce sont des ouvriers qui vendent leur force de travail en connaissance de cause et de leur plein gré. Que c'était leur choix. Or, quand on sait qu'on ne peut pas se permettre de faire le difficile, parce qu'il faut bien nourrir sa famille, ce choix reste-t-il libre ?

Ce sont des questions nécessaires. Il faut les poser. Et je ne pense pas que cet article soit une bonne façon de le faire. On ne peut pas juste dire “eh oui, que c'est dur de faire un choix sur le fait de prendre ou non des comprimés coupe-faim pour atteindre un idéal de minceur, dans notre société actuelle ! Restons déconstruit.e.s, gardons-le à l'esprit !”.

Les questions demeureront toujours, en attendant : notre désir n'est-il pas socialement construit ? A quel point et selon quelles modalités nous faisons nous influencer ? Est-il possible de se défaire totalement des discours dominants ? Quand reconstruisons-nous cela même que nous prétendons déconstruire ?
Nos choix ont-ils vraiment le pouvoir d'attaquer les structures qui créent cette société et ces standards ?

Je ne pense pas que ce soit une bonne idée de réduire le féminisme à des pratiques individuelles. Bien sûr, le féminisme se vit tous les jours, aussi à travers des pratiques individuelles et des choix personnels. Mais il ne peut y avoir que ça. Sinon, tout ce qu'on a, ce sont les entreprises qui nous vendent les mêmes messages d'empouvoirement sur des t-shirts, des mugs, dans des séries ou dans la consommation de sucettes coupe-faim. Pour moi, le féminisme, c'est reconnaître que nos choix individuels existent en relation (en tension) avec des problèmes structurels de large envergure.

Beaucoup de femmes n'ont pas le privilège ou l'occasion de faire de vrais choix.

Des limitations structurelles peuvent les empêcher de le faire.

Et dans ce cas-là, c'est presque insultant (même si je sais que ce n'est pas l'intention de la rédaction) de glisser trop vite dessus.

TL;DR : ceux qui sont intéressés par la question peuvent lire l'ouvrage de Roxanne Gay, Bad Feminist :)
 
Dernière édition :
26 Mai 2016
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Par avance désolée du post assez long, pas mal d'explications et de contexte dedans :)

Je ne commente pas souvent, mais là, je ne pouvais pas faire autrement : quand je suis arrivée à la fin de l'article, j'étais surprise, et aussi assez déçue.

D'autres personnes ont déjà très bien expliqué que le post de Kim Kardashian est de nature publicitaire, que le but de la publicité, c'est de vendre, et qu'il est fallacieux de parler de “choix libre” face à ce genre de choses. Certaines personnes se spécialisent dans l'étude du comportement humain, et il a assez bien été montré qu'il est possible d'orienter (avec plus ou moins de succès) le choix des gens, que ce soit pour vendre plus ou pour résoudre certains problèmes de santé publique.

Dans ce deuxième cas, on parlerait de “nudges”, une façon “douce” d'orienter les gens vers le “bon” choix. Ainsi, il y a une énorme différence entre une situation où tout le monde est donneur d'organe par défaut et jusqu'à preuve du contraire, et une situation où la norme est au contraire de ne pas prélever d'organes à moins que la personne l'ait fait clairement savoir de son vivant. Dans les deux situations, tout le monde reste parfaitement libre de faire connaître et respecter ses préférences. Dans les faits, on constate que la plupart des gens n'ont pas forcément un avis très tranché, ou qu'ils n'ont pas vraiment réfléchi à la question, et que c'est la décision “par défaut” qui prédomine.

Bref : énormément de facteurs influencent notre comportement. Même quand on est “déconstruit”. Même quand on suit la recommandation de l'article. Se référer à cette recommandation, c'est loin d'être assez. C'est un peu comme dire qu'aujourd'hui tout le monde a le choix de se tenir informé de l'actualité. Oui, c'est vrai, “on a le choix”. Mais il ne s'ensuit pas que tout le monde prendra le temps, fera usage de son esprit critique, etc. Les gens ne font pas le choix d'être abreuvé de fake news et de parfois tomber dans le panneau.

La question du choix (et du “féminisme du choix”, choice feminism en anglais) est au coeur des débats et de la théorie féministe actuelle. Pour mieux comprendre ce qui se joue derrière l'utilisation de tels arguments, un peu de contexte ne ferait pas de mal.

Dès les années 1920, aux Etats-Unis (la décennie de la prohibition, du swing, des flappers...) on commence à concevoir un lien entre émancipation féminine et consommation. C'est d'ailleurs la décennie qui voit l'émergence des premiers supermarchés (enfin, de ce qu'on reconnaîtrait comme...), le développement de la publicité, de l'industrie de la beauté, etc. Pour l'historienne Nancy Cott, le féminisme “blanc” a commencé, à cette époque, à envoyer le message que ce qui relevait du choix et de la réalisation de soi se réduisait de plus en plus au domaine de la consommation.

Saut dans le temps. Je suis désolée, je coupe court et c'est déjà trop long. La deuxième évolution ou inflexion importante, c'est après les années 1970-80 – après la révolution sexuelle et la bataille pour le droit à l'avortement. Quand les anti-avortement se sont positionnés comme “pro-vie”, une réaction a notamment été de réaffirmer la notion de choix. Les militant.e.s se sont déclaré.e.s “pro-choix” plutôt que pro-avortement. C'est bien normal, autant d'un point de vue rhétorique que d'un point de vue idéologique. Il faut le répéter, et c'est dur parfois, que lorsqu'on défend le droit à l'avortement, on défend l'exercice d'un libre choix, le choix de disposer de son corps, d'avorter... ou pas.

Bref : quelqu'un comme R. Salinger (Beggars and Choosers) parle des problèmes qui ont finit par se poser dans le cadre de ce nouveau “féminisme du choix”. Les femmes noires, les femmes d'origine hispanique et les Native Americans, aux Etats-Unis, furent historiquement les cibles de programmes de stérilisation forcée. Pour ces femmes qui militaient pour la possibilité d'avoir un enfant, l'avortement était assez loin de leurs préoccupations, et elles ont critiqué l'égocentrisme de certaines militantes blanches qui ne regardaient pas plus loin que leur propre situation. Le titre de l'ouvrage “Beggars and Choosers” fait référence au proverbe anglais “beggars can't be choosers” (c'est-à-dire “ceux qui ne sont pas en position de décider ne peuvent pas se permettrent de faire les difficiles / de faire la fine bouche” – to beg signifiant “supplier”, voire “mendier”). Pour R. Salinger, ce discours pro-choix a formé la base de nouvelles critiques des mères célibataires et des mères adolescentes. Si l'avortement est un choix, alors certains diront que les filles-mères ont fait le choix de ne pas avorter, que tant pis, c'était le mauvais choix. Il y aurait de bon choix et de mauvais choix, et les personnes qui les font.
Quelqu'un a parlé (en page 1 je crois) d'individualisme : c'est exactement ça. C'est une perspective très individualiste que de tout réduire au choix individuel. Les femmes sont responsables de leurs choix, celles qui le veulent et qui sont capables de leur faire sont en droit d'avoir des enfants. Problème : les personnes qui ont suffisamment d'argent pour prendre cette décision ont le choix. Les autres non.

C'est toujours le même problème vu sous un angle différent lorsqu'on regarde le monde du travail. Etats-Unis, début du XXème siècle, les conséquences de la Révolution Industrielle : ceux qui s'opposaient à toute régulation des conditions de travail, salaire minimum... étaient les premiers à dire que les ouvriers et ouvrières acceptaient de leur plein gré les contrats de travail qui leur étaient proposés. Que le marché, ce sont des ouvriers qui vendent leur force de travail en connaissance de cause et de leur plein gré. Que c'était leur choix. Or, quand on sait qu'on ne peut pas se permettre de faire le difficile, parce qu'il faut bien nourrir sa famille, ce choix reste-t-il libre ?

Ce sont des questions nécessaires. Il faut les poser. Et je ne pense pas que cet article soit une bonne façon de le faire. On ne peut pas juste dire “eh oui, que c'est dur de faire un choix sur le fait de prendre ou non des comprimés coupe-faim pour atteindre un idéal de minceur, dans notre société actuelle ! Restons déconstruit.e.s, gardons-le à l'esprit !”.

Les questions demeureront toujours, en attendant : notre désir n'est-il pas socialement construit ? A quel point et selon quelles modalités nous faisons nous influencer ? Est-il possible de se défaire totalement des discours dominants ? Quand reconstruisons-nous cela même que nous prétendons déconstruire ?
Nos choix ont-ils vraiment le pouvoir d'attaquer les structures qui créent cette société et ces standards ?

Je ne pense pas que ce soit une bonne idée de réduire le féminisme à des pratiques individuelles. Bien sûr, le féminisme se vit tous les jours, aussi à travers des pratiques individuelles et des choix personnelles. Mais il ne peut y avoir que ça. Sinon, tout ce qu'on a, ce sont les enteprises qui nous vendent les mêmes messages d'empouvoirement sur des t-shirts, des mugs, dans des séries ou dans la consommation de sucettes coupe-faim. Le féminisme, c'est reconnaître que nos choix individuels existent en relation (en tension) avec des problèmes structurels de large envergure.

Beaucoup de femmes n'ont pas le privilège ou l'occasion de faire de vrais choix.

Des limitations structurelles peuvent les empêcher de le faire.

Et dans ce cas-là, c'est presque insultant (même si je sais que ce n'est pas l'intention de la rédaction) de glisser trop vite dessus.

TL;DR : ceux qui sont intéressés par la question peuvent lire l'ouvrage de Roxanne Gay, Bad Feminist :)


MERCI :clap::clap: C'est passionnant et cela explique bien à la néophyte que je suis la naïveté (qui n'est absolument pas malveillante nous en convenons tous) sous-jacente dans le message relayé par l'article.
 

Y.

1 Avril 2014
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@PetiteVague : merci <3

J'ajouterais un truc : c'est vrai qu'il faut être tolérant envers tous les choix possibles, oui. C'est vrai qu'il ne faut pas avoir l'impression qu'on détient LA vérité ultime et qu'on peut se permettre de faire la morale à tout le monde. C'est très vrai que cela ne sert à rien de s'énerver en ligne contre une seule personne alors que c'est tout le contexte qu'il faut remettre en question. Mais. Est-ce que ça veut dire pour autant que tous les "choix" se valent et que quoi qu'une personne fasse, si c'est elle qui l'a décidé, c'est forcément génial pour elle et pour les autres ?

Quand je lis des textes de féministes "relax" (il y a sûrement un terme officiel, mais c'est comme ça que je les perçois), je ressors souvent avec une drôle d'impression. En gros, une meuf qui :

- passe une heure à se maquiller tous les matins ? Tant que personne ne la force, youpi, c'est super empouvoirant ! (c'est une heure par jour de sa vie qu'elle n'utilisera que pour se consacrer à son apparence, mais bon...)
- est tout le temps au régime ? Elle se réapproprie son corps selon ses termes à elle, génial !
- consacre tous ses loisirs à mettre des photos de petits plats cuisinés sur Instragram et repeint l'intégralité de sa maison en rose avec des princesses Disney ? C'est formidable qu'elle redonne de la valeur aux activités féminines traditionnelles, qu'on méprise trop souvent !
- ne kiffe généralement pas beaucoup au lit ? L'injonction à l'orgasme c'est caca, vive les nanas qui savent s'éclater autrement !
- ne bosse pas parce que son mec ne veut pas ? Tant qu'ils ont communiqué clairement sur la question et qu'ils se sont mis d'accord à deux, aucun problème, circulez y'a rien à voir (lu ici même sur les forums de Madz, hélas)
- est en couple avec un homme qui refuse qu'elle parle à son ex ? Idem !
- évite de porter des vêtements courts y compris en plein été, parce que la pudeur c'est important ? Elle n'a pas à se réifier si elle n'en a pas envie, hourra pour elle !
- etc...

Je comprends que ce sont des questions difficiles. Et il faut se rappeler que pour toutes ces questions, il ne s'agit pas de remettre en cause des comportements individuels, mais de critiquer les choix vers lesquels la société nous pousse. Bien sûr qu'une fille a le droit de se maquiller comme une star de cinéma et de passer sa vie au régime si elle le souhaite, et bien sûr que si elle aime les princesses Disney, on ne va pas lui interdire de s'amuser ! Mais ça ne dispense pas de s'interroger sur le fait que la société promeut clairement des choix qui ne sont très souvent pas bons pour nous. La minceur est un choix ? Désolée mais pour la majorité des femmes, avoir la silhouette idéale veut aussi dire sacrifier sa santé (rappelons que la masse graisseuse a une fonction biologique !). Ok, c'est un "choix", mais on le fait pour quoi, exactement ? Pour "se plaire à soi-même" ? Sérieux ? Une fille qui se retrouverait seule sur une île déserte prendrait son stock de sucettes coupe-faim avec elle pour continuer à se sentir belle même si personne ne la regarde, quitte à se ruiner la santé ? Permettez-moi d'être sceptique...

Oui, on a le droit de vouloir se sentir valorisée par le regard des autres, évidemment. Mais quand on parle de libre choix, il faut se rappeler que tout choix implique de faire certains sacrifices. Certains sont inévitables : si je veux être hyper mince sans être trop musclée (parce que des muscles sur une fille, c'est laid, rappelons-le), je serai obligée de me prendre la tête avec mon alimentation toute ma vie. Si je ne tiens pas à être super mince, je vais sacrifier l'admiration que les autres pourraient avoir pour moi. Dans le premier cas, je n'ai pas le choix, c'est une question biologique. Dans le deuxième cas, je n'ai pas le choix non plus... mais la société, elle, a le choix de changer la façon dont elle me regarde, et ça, c'est déjà quelque chose. On ne peut donc pas dire que tous les choix se valent. Et cela vaut pour tous les exemples que j'ai donnés : bien sûr qu'il s'agit d'un droit, bien sûr que c'est contre-productif de stigmatiser une personne pour ses choix individuels ; mais prétendre que c'est une simple question de choix et que toutes les possibilités sont également saines, là, on flirte avec l'hypocrisie.
 
25 Juin 2016
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Londres
@PetiteVague Merci beaucoup pour ton article! Je me permets de rebondir dessus vu que tu introduis la notion de choix et du monde du travail. J'ai fortement tique a l'evocation du "SI" qui me rappel vraiment une anecdote perso lie au travail.
Je lis : « si vous voulez mettre la main dessus, il va falloir être rapide ! ». « Si ». Le choix. Je sais que je l’ai.

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Du coup "L'emploi du si induit un choix pour le lecteur" j'ai envie de dire que ca permet surtout a celui qui "propose" le choix de se decharger de toute responsabilite future. Pour le reste (pub a peine masque, public vise pas forcement apte a voir/comprendre la notion de choix...) tout a deja ete dit.
 

skippy01

Peau lisse partout, justice nulle-part.
16 Avril 2017
6 789
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Quand je lis des textes de féministes "relax" (il y a sûrement un terme officiel, mais c'est comme ça que je les perçois), je ressors souvent avec une drôle d'impression. En gros, une meuf qui :

- passe une heure à se maquiller tous les matins ? Tant que personne ne la force, youpi, c'est super empouvoirant ! (c'est une heure par jour de sa vie qu'elle n'utilisera que pour se consacrer à son apparence, mais bon...)
- est tout le temps au régime ? Elle se réapproprie son corps selon ses termes à elle, génial !
- consacre tous ses loisirs à mettre des photos de petits plats cuisinés sur Instragram et repeint l'intégralité de sa maison en rose avec des princesses Disney ? C'est formidable qu'elle redonne de la valeur aux activités féminines traditionnelles, qu'on méprise trop souvent !
- ne kiffe généralement pas beaucoup au lit ? L'injonction à l'orgasme c'est caca, vive les nanas qui savent s'éclater autrement !
- ne bosse pas parce que son mec ne veut pas ? Tant qu'ils ont communiqué clairement sur la question et qu'ils se sont mis d'accord à deux, aucun problème, circulez y'a rien à voir (lu ici même sur les forums de Madz, hélas)
- est en couple avec un homme qui refuse qu'elle parle à son ex ? Idem !
- évite de porter des vêtements courts y compris en plein été, parce que la pudeur c'est important ? Elle n'a pas à se réifier si elle n'en a pas envie, hourra pour elle !
- etc...
J'ajouterais: «Elle utilise son corps à des fins marketing ? Youpi, elle aime son corps et se réapproprie une règle sexiste pour combattre le slutshaming !»
 
19 Mai 2016
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Paris

De rien :) J'ai suivi des cours sur le sujet, et je me rappelle très bien le moment où on est arrivé à parler des critiques du féminisme du choix. Jusqu'à ce moment là, je n'avais pas conscience que de vraies critiques puissent exister. Pour moi, c'était simple : laisser les femmes (et pas seulement !) faire leurs propres choix de vie, ce n'est pas difficile. C'était l'aboutissement naturel de plusieurs décennies de discours et de théorie féministe. Jusqu'à ce moment "oui, mais". Depuis, je n'arrête pas de me poser des questions, parce que je n'ai toujours pas trouvé la ou les réponses qui me satisfaisaient pleinement.


Ok, c'est un "choix", mais on le fait pour quoi, exactement ? Pour "se plaire à soi-même" ? Sérieux ? Une fille qui se retrouverait seule sur une île déserte prendrait son stock de sucettes coupe-faim avec elle pour continuer à se sentir belle même si personne ne la regarde, quitte à se ruiner la santé ? Permettez-moi d'être sceptique...

Justement, je ne sais pas. Les canons de beauté peuvent être profondément intériorisés, j'imagine au point que même sans la présence d'autres personnes on puisse vouloir modifier son corps pour y adhérer. Parce qu'on trouve ça plus "beau".

Après avoir écrit mon premier post, hier soir, je me suis posée la question. Je n'aime pas vraiment me raser. J'ai la chance d'avoir les poils assez clairs et fins, donc j'ai arrêté de me raser les jambes. En revanche, quand je sais que je vais montrer mes aisselles, je fais disparaître ces poils, parce que je ne les trouve pas "beaux", je ne veux pas les montrer. Mais je sais que si la société n'en avait rien à carrer des poils des femmes, je ne me raserais pas.

Mais quand on parle de libre choix, il faut se rappeler que tout choix implique de faire certains sacrifices. Certains sont inévitables (...)

Encore une fois, tout à fait d'accord :) Il y a tellement de choses à faire, et si peu de temps. On est toujours en train de choisir où investir notre attention, à quoi nous intéresser, comment occuper notre temps libre. Ne serait-ce qu'en terme de temps, un choix implique un ou des renoncements.

[L]a société, elle, a le choix de changer la façon dont elle me regarde, et ça, c'est déjà quelque chose.

Et ce serait tellement bien si la valeur que la société attribue à certains choix en fonction de qui les fait était uniformément la même.
 

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