Je pensais à un truc
On entend souvent les parents dire : "je veux éduquer mon enfant pour qu'il devienne la meilleure personne possible, et qu'il fasse de grandes choses" ou "j'aimerais avoir un enfant pour l'élever de la meilleure façon et qu'il rende ensuite le monde meilleur", ce genre de truc.
Ca va de pair avec le fait d'inscrire son gosse au maximum d'activités possibles, langues étrangères, poterie, sport, dessin, cours particuliers, etc... pour en faire une sorte d'être humain parfait, qui pourra ainsi réparer nos propres manquements et combler nos lacunes. Devenir une sorte de version idéalisée de nous-mêmes, de nos projections.
Sauf que dans 99% des cas, le gamin en question ne va pas rendre le monde meilleur (à grande échelle en tout cas, de toute façon qui peut se targuer de pouvoir "changer le monde" ??) ni même avoir un destin incroyable, mais juste devenir à son tour un adulte qui va se reproduire… pour élever des enfants avec l'espoir qu'ils/elles aient un super destin et changent positivement le monde. Qui vont eux-mêmes devenir adultes et se reproduire, etc. Vous voyez où je veux en venir ? C'est un cercle sans fin. Si un parent trouve du sens dans le fait d'élever un enfant de la meilleure façon, c'est cool, mais ce sens sera perdu à l'instant même où l'enfant devient lui-même adulte et commence à envisager de se reproduire.
Je crois que Mona Chollet parle de ce paradoxe dans "Sorcières", en prenant l'exemple des mères au foyer qui se sacrifient pour faire de leurs enfants des individus parfaits, sauf que ces enfants (surtout si ce sont des filles) vont eux-mêmes reproduire le même schéma, et au final ça donne une boucle qui se répète à l'infini. Ca invalide aussi complètement l'argument selon lequel on devrait faire des enfants pour "rendre le monde meilleur" puisqu'au final… pression sociale oblige, tu as juste 30 ans devant toi pour accomplir les grandes choses auxquelles tu as été préparé.e jusqu'à ce qu'on te presse de te reproduire, et que le schéma se répète à nouveau.
C'est un truc qui me perturbe pas mal, parce que je n'ai JAMAIS compris cette manière de voir les choses. Perso, je préfère largement me concentrer sur moi-même et essayer de devenir la meilleure personne possible plutôt que de "déléguer" cette tâche à un potentiel enfant qui lui-même la déléguera à ses enfants, etc. Sinon ça n'a jamais de fin, c'est un peu comme Sisyphe qui pousse inlassablement son rocher (rocher qui finit toujours par dégringoler au bas de la montagne).
Bref, je trouve que ce (supposé) plaisir d'élever des enfants pour en faire de bons citoyens c'est vraiment une fausse bonne raison de se reproduire. Pourquoi ne pas plutôt d'abord travailler à devenir
soi-même un.e bon.ne citoyen.ne ? Ca me paraît tellement plus logique, plutôt que de repousser sans cesse la question aux calendes grecques
(j'espère que mon pavé est compréhensible, ce ne sont pas des idées très faciles à dérouler et j'ai fait du mieux que j'ai pu pour les retranscrire
)
(et du coup en écrivant m'est venu un parallèle avec la religion, je me demande si les gens ne font pas des enfants pour résoudre l'épineuse question du sens de la vie, l'enfant devenant ""l'objet"" sur lequel se cristallise cette question du sens. Tout comme on peut cristalliser cette question sur une religion, une pratique, une croyance… Mais comme cette question n'est au final jamais résolue, faire des enfants reviendrait à courir autour d'un cercle en espérant y trouver une fin… d'où le fait que tant de gens soient "déçus", voire désillusionnés par la parentalité)