@Lanfear C'est un super format je trouve, ça te permet de t'exprimer auprès de gens quand tu n'oses pas leur parler directement (ou que tu sais que ça ne sert à rien car ils ne t'écouteront pas), mais ça te permet aussi, une fois que tu l'as écrit, d'affiner ta pensée, de te dire "non, en fait c'est pas vraiment ça que je pense" ou "ce terme ne représente pas exactement mon ressenti" et le jour ou tu en parles vraiment, tu sais un peu mieux où tu en es. Et quand tu les relis plus tard, tu vois comment tu as avancé
Je me lance, je publie la mienne :
Maman,
Tu ne liras probablement jamais cette lettre, mais j’ai besoin de te l’écrire. Ceci résume bien notre relation je trouve, les besoins que j’attendais que tu combles, j’ai dû m’en débrouiller. Tu n’as pas de place dans ma vie parce que tu ne l’as jamais prise. Tu n’as jamais vraiment joué avec moi. Tu n’as jamais écouté ni été là quand j’avais mal au cœur ou à l’esprit. Certes, pas par méchanceté, ni par mépris, ni par désinvolture, tu as ta propre histoire qui t’a éloigné de toi, de ce que tu es réellement, et aujourd’hui tu n’es plus capable de tout ça, plus capable de revenir en arrière. Je ne t’en veux pas Maman, j’ai beaucoup de peine pour toi et pour ce que tu as du vivre, mais j’ai mal parce qu’on m’a privé de toi. La personne que j’ai face à moi aujourd’hui n’est liée à moi que par le sang, une moitié de gènes, un nez qui bouge quand il parle. Plus par des émotions.
Je ne suis plus une petite fille, Maman. Je n’ai plus besoin et je n’ai plus envie que tu me nourisses, que tu décores mon intérieur à ma place, que tu te permettes de parler à mes amis et collègues comme tu parlerais à la maîtresse ou aux parents de mes copains de classe. Tu t’imposes dans ma vie sans me demander ce que je veux, ce dont j’ai envie, ce dont j’ai besoin. Et j’aimerais que cela cesse. Mais je ne pourrais jamais te le dire tout ça. Tu as déjà vécu ça avec ta propre mère, tu ne pourrais pas supporter d’endosser son rôle à ton tour.
Sais-tu ce dont j’aurais eu besoin, Maman ? J’aurais voulu qu’on parle ensemble. Que tu m’apprennes à cuisiner. Que tu m’apprennes à me maquiller, plutôt que simplement me dire ce qui te paraissait vulgaire. Que tu me consoles de mes premiers chagrins d’amour, de mes chagrins d’amitié. Je voudrais pouvoir te parler de mes peurs sans sentir la tienne. Je voudrais pouvoir te dire que je souffre du trouble dysphorique prémenstruel (TDPM, pour les intimes) qui me fait croire que je n'ai plus envie de vivre, quelques jours par mois. Je voudrais qu’on puisse se parler de ce que l’on est, de nos doutes, de la vie dans l’absolu, qu’on ne se contente pas de se donner les nouvelles du front. Du fond, plutôt que de la forme. Mais tout ça je ne l’aurais jamais. Alors je m’éloigne de toi, irrémédiablement. Je ne le veux pas, mais rien ne m’attache plus à toi que de la théorie d’amour maternel qui voudrait nous faire croire qu’une mère aime naturellement ses enfants de la meilleure façon qui soit. Et que donc il ne faut pas s’en détacher. Tu es la première à savoir que c’est faux, n’est-ce pas ?
Je renonce à toi Maman, je ne veux plus attendre cet idéal maternel que je n’aurais jamais. Je veux apprendre à le combler seule, parce que je n’aurais pas le choix. Je te souhaite plus que tout d’être heureuse un jour. Et je te le promets, je le serai aussi.