Le pire , c'est que le pessimisme ne vient pas que des professeurs , mêmes des amis nous poussent vers le fond . Une fois , je discutais avec une amie d'amie ( à Miami) qui est en seconde année de LCE Anglais et qui m'a dit " Mais toi , avec ta licence , tu n'arriveras à rien ! Elle sert à rien !" ( Je suis en Culture et Médias à Lille 3 , pour faire communication/documentation/postes d'administration culturels) . Or , si j'ai choisi cette licence , c'est par envie personnelle déjà et aussi pour le nombre de débouchés possible derrière ( cinq masters différents et possibilité de licence professionnelle ou d'entrée dans des écoles privées) .
Mes professeurs de lycée ( j'ai eu mon bac l'année dernière) nous ont souvent poussés à être indépendants , par contre . J'ai fait un Bac L , la plupart des gens en S me disaient " Tu feras rien avec un bac L , tu finirais chômeuse (ou autre) , ça sert à rien ce qu'on vous y apprend", etc tandis que mes professeurs nous disaient qu'au contraire , vu le nombre de gens qui font un bac S , d'ici à ce qu'on ait besoin de gens de notre âge sur le marché du travail , il y aura saturation de gens au parcours scientifique . Et même , le Bac ne détermine pas tout , mais il y a toujours des étiquettes comme quoi : "S c'est le mieux , ES , c'est pour les doués en tout et L c'est pour les nuls/ceux qui sont pas doués en maths" .
J'ai eu une prof de maths absolument horrible qui m'a rendue malade . Je n'ai jamais eu la bosse des maths , mais en 3e , j'avais quand même 16-17 de moyenne . En seconde , elle est arrivée en nous expliquant sèchement , avec plein d'interros , d'exos , de devoirs chaque soir , parfois même , je ne mangeais pas le midi pour les faire et elle trouvait encore que ce n'était pas assez , que je ne faisais pas d'efforts pour apprendre ou travailler . Elle m'a insultée devant tout le monde comme quoi je me ferais écraser une fois dans le monde du travail , que j'avais le niveau une élève de quatrième , etc . Elle a même refusé que le conseil de classe m'adresse le félicitations lors des deux premiers trimestres car j'avais 6 de moyenne en maths , 12 en SVT et 11 en physique alors que j'avais 17 en histoire , 16 en français ... ( Je les ai eues quand même !)
Mes autres profs nous ont souvent poussés à avoir des activités extra-scolaires : ils nous poussaient à aller au ciné , voir des expositions ou même regarder des films , voir de la culture partout ( On a même regardé Futurama en cours d'histoire , pour tout dire) . Ils nous ont même dit : " Faites un blog , ça vous poussera à réfléchir sur ce que vous voyez et la manière dont vous l'écrivez" . Mais il est vrai que nous avons moins d'activités à l'intérieur de l'école que les Ricains ou même Anglais . J'avais des groupes d'activités comme cela au collège ( club jeux de société, club d'écriture et sport pour moi) et c'était vraiment un moment d'indépendance et même de complicité entre nous et avec les profs . Au lycée , il y a quand même une espèce de pression " On est pas là pour déconner , il faut que vous ayez tous votre bac !" . Le pire , c'est qu'on met cette pression dès la seconde , je me souviens encore de mon premier jour de lycée : " Vous devez étudier dès maintenant pour le bac ! Ce sera très très difficile" . Résultat ? J'ai flippé pendant deux ans , jusqu'à la terminale où j'en ai pas foutu une et eu quand même .
Pourquoi ? A cause d'un voyage au Pays de Galles où j'ai rencontré John , le monsieur qui nous hébergeait . Il nous a dit : " Faites ce que vous voulez de votre vie , trompez-vous , faites ce qui vous plaît , l'avis des autres ne compte pas " . A ce moment là , j'ai arrêté de me prendre la tête et je me suis dit que , malgré toute la pression qu'on peut mettre , on a le droit de se tromper . A chaque fois que j'allais en voyage dans les pays anglophones , je sentais vraiment l'ambiance détendue et je voyais vraiment les gens étonnés quand on stressait de redoubler ou de ne pas avoir de bonnes notes , parce que , pour nous , ça veut dire qu'on est nul.
Bien sûr , les parents peuvent aussi y être pour quelque chose . Ma mère a toujours été assez exigeante avec moi et je me souviens encore d'un 11 reçu en sixième , j'en ai pleuré pendant deux heures parce que je savais que ma mère allait être en colère et que ça signifiait que j'étais moins bien que les autres , que je le serais toujours et que je n'arriverais à rien ( je suis un brin fataliste). Ma mère m'a engueulée une fois car j'avais eu 11 à un bac blanc de français ( très difficile , noté par une prof assez peau-de-vache) alors que la meilleure note était un 13 ou 14 , elle m'a dit : " Et tu penses que ça suffit d'avoir la moyenne ? Alors que tu aurais pu avoir 14 comme l'autre ?" . Et , par rapport à ma prof de maths de seconde , elle disait presque que c'était ma faute , que je ne prenais pas assez sur moi et que je me ferais écraser plus tard .
Pour l'optimisme américain , je me dis " Ouais , c'est sympa mais bon , je préfère encore être pessimiste et faire encore mieux plutôt que de me sur-évaluer et de me planter" .
C'est pour ça que je me dis maintenant que le pessimisme est presque "normal" vu toute la pression qu'on donne de tous les côtés . J'ai eu beaucoup de chance de rencontrer des ami(e)s au parcours chaotique qui s'en sortaient quand même sans déprimer et des profs très compréhensifs .
Du coup , j'essaie toujours de positiver , même si c'est dur . Par contre , je suis devenu quelqu'un de très perfectionniste et qui ne supporte jamais l'échec , même chez les autres . Si je fais la moindre erreur , je me hais et je me dis que toute ma vie ne sera constituée que de ça , alors , je me bats pour faire mieux , encore mieux , toujours mieux . Cette pression très forte m'a poussée à dépasser ce que je pouvais faire , maintenant , je suis un vrai bulldozer
Désolée de 3615 malife , c'était l'instant-témoignage-de-la-pression !