J'ai deux grandes soeurs, la première a neuf ans de plus que moi et l'autre sept. Avec du recul je me dis que comme beaucoup de gens, mes soeurs ont eu le rôle de deuxième et troisième mère. Ils y avaient beaucoup de caractéristiques des parents "lambda" (évidemment aucune relation incestueuse dans tout ça!), ma soeur ainée était autoritaire, quand les parents n'étaient pas là, c'était elle qui faisait la loi, tandis que l'autre était plus douce et plus apte aux concessions. Ce sont mes soeurs qui ont forgé ma personnalité, certains aspects de mon caractère ressemblent évidemment à ceux de ma mère et de mon père, mais si on se place d côté des goûts littéraires, artistiques et surtout musicaux cela se repose sur mes soeurs et plus particulièrement la première. Très jeune j'avais inconsciemment intégré le fait que ma soeur ainée représentait une sorte d'autorité suprême, du coup toutes les musiques qu'elle aimait je les aimais aussi. Je me souviens d'une fois où elle a mis du Lady Gaga et m'a demandé si j'aimais bien, croyant bien faire j'ai répondu oui alors qu'il s'avérait qu'elle n'aimait pas du tout la pop ! Je pense que si ma soeur ainée n'avait pas été là, je n'aurais pas été la personne que je suis aujourd'hui, par ses moqueries elle m'a appris le second degré, la répartie et l'auto-dérision, étant très susceptible de nature, cela m'a aidé quand j'ai eu mes sautes d'humeur à l'adolescence.
Parfois, justement, la présence de ma soeur était étouffante à la maison, je ne me cache pas que quand elle est partie faire ses études dans une autre ville j'ai été soulagée, je l'aime beaucoup, mais comme nous sommes des personnes de caractère toutes les deux, il était dur de passer une journée sans se disputer quand nous vivions sous le même toit. Mais maintenant je suis heureuse de venir la voir au moins une fois par moi, nous avons mûri et il n'y a presque plus de disputes.
Vient ensuite la deuxième soeur, elle aussi subissait l'autorité de la plus grande, mais elle avait également beaucoup de pouvoir sur moi. Il y a environ deux ans, nous parlions de notre soeur ainée et elle m'a avoué l'avoir crainte et parfois (même maintenant) lui mentir de peur de la décevoir, cette révélation m'a beaucoup amusée, car même maintenant après avoir développé ma personnalité indépendamment de ma famille je cache encore des choses à mes soeurs. Si je devais me comparer à elles je dirais que je leur ressemble à 50% chacune. C'est la seconde qui m'a sensibilisée à la littérature, la philosophie, l'histoire et l'anglais. Je la préfère pour les discussions longues, car ayant fait des études de lettres, elle a toujours des propos bien construits et elle sait analyser. Longtemps j'ai cru que ma deuxième soeur et moi étions des presque jumelles tandis que ma soeur ainée régnait en tyran. Finalement je trouve que ma deuxième soeur, malgré sa sensibilité, et sa compréhension, garde une éternelle candeur qui ne me correspond pas. Mais c'est cette candeur dans sa personne qui me rappelle toujours mon enfance et que je serais toujours sa petite soeur.
C'est au lycée que j'ai commencé à découvrir la véritable personnalité de ma soeur ainée, comme quand on découvre qui sont vraiment ses parents... Quand j'étais adolescente, j'était dépressive. En seconde, j'avais très mal pris une dispute avec une amie et nous nous étions fait la tête pendant trois mois, celle-ci m'ignorait. Le weekend suivant la dispute, après ne pas avoir un mot pendant deux jours, j'ai fini par me faire hurler par ma mère qui voulait des explications et je suis partie pleurer dans ma chambre. Après que ma mère se soit calmée, comme toujours elle est venue me faire un câlin, mais cette fois-ci m'a retrouvée en larmes, j'ai dû tout lui avouer car elle voyait bien ma peine. Une heure plus tard, mes parents avaient tout dit à ma soeur ainée qui a voulu venir me parler. Là j'ai découvert en elle une personnalité proche de la mienne, il lui était arrivé les mêmes "grosses disputes" avec ses amies au collège, pour la première fois sa carapace d'autorité se brisait et je découvrait une personne qui avait souffert, elle m'a dit avoir pleuré pendant des soirs entiers tellement elle souffrait, elle m'a dit qu'elle comprenait, elle pleurait presque, là je me suis rendue compte qu'elle n'était non pas la soeur que je craignait mais celle que j'aimais comme mon égale, comme je l'avais toujours fait avec ma deuxième soeur. Maintenant je n'ai plus vraiment le temps de voir mes soeurs mais cela fait plusieurs mois que nous nous promettons des vacances rien que toutes les trois, histoire de nous découvrir en tant qu'adultes puisque partie tôt du foyer familial, elle n'ont pas vraiment eu le temps de me voir grandir...