J'ai choisi de procéder à une interruption de grosses il y a tout juste deux semaines. D'ailleurs j'avais pris les premiers comprimés (ceux qui interrompent le développement de l'embryon) il y a pile 15 jours. Depuis j'ai l'impression qu'il pleut des articles et témoignages sur les IVG.
Je m'étais levée le mardi de la semaine précédente avec un gros doute, j'avais un test vieux de 5 ans dans un tiroir de ma salle de bain, sait-on jamais, j'ai décidé de voir ce que ça allait donner : un gros "Merde" à 6h30 du matin, après avoir passé une nuit agitée. J'ai pris ma douche, ma bouche sortant des "merde" compulsifs tout le temps qu'elle a durée. "En même temps il est périmé ce test".
Mon compagnon se lève : - "Mec, c'est la merde". Je lui tend le test, il a les yeux encore plein de sommeil, réveil brutal : "Merde"
Le journée s'est passée, mon copain écumant l'internet mondial pour savoir si un test périmé peut vraiment se tromper quand c'est positif, la réponse est plus ou moins unanime : NON. On passe à la pharmacie le soir en rentrant, histoire de confirmer tout ça avec un test valide (en priant pour que ce soit négatif). Une fois à la maison, direction les toilettes : "merde"
C'est vraiment la merde, mon esprit s'encombre de tout ce qu'il va falloir lancer comme procédures, j'ère sur le net, me renseigne comme je peux, il est 18h passé tout est fermé, je bosse toute la semaine, pas le temps de gérer ça sur mes heures de travail, qui tombent pile sur les heures d'ouverture des différentes structures, mon médecin traitant est en vacance, j'ai l'impression de devoir gravir une montagne.
Heureusement mon compagnon est au top et s'occupe de voir pour les prises de rendez-vous, de courir après les contacts et les infos, rappelle quand il n'a pas posé les questions que moi je me pose... Je n'ose pas imaginer comme cela doit être compliqué quand on est seule et que l'on bosse.
Finalement j'arrive à arracher une ordonnance pour une prise de sang à mon médecin traitant, afin d' avoir ma carte de groupe sanguin. On file au laboratoire à l'arrache, on est jeudi, mon rendez-vous au planning familial est le mardi après-midi suivant, il faut se magner. Les dames du laboratoire d'analyses sont adorables, mais au moment de la prise de sang "C'est votre premier?", je répond un petit sourire figé sur les lèvres "oui, mais là c'est pas prévu de le garder". La dame comprend tout de suite et est encore plus adorable (surtout que sur moi les prises de sang c'est la croix et la bannière), mais il y aura quand même eu ce petit malaise, à 27 ans, après tout , c'est "normal" de commencer à fonder une famille, j'ai cette impression d'être un extra-terrestre.
En rentrant j'appelle ma mère:
"- Bon, alors, en fait, visiblement, mon stérilet a bougé, je suis enceinte.
-Comment ça se fait? Et tu compte le garder le petit bout?
-Le petit bout, maman, tu me connais, j'ai pas l'intention d'avoir d'enfant dans l'immédiat, et puis là c'est juste un agglomérat de cellules, rien de plus...
-Oui, mais je pose la question, sait-on jamais... Tu as bien vu ton cousin...
-Moui, mais non. Tu connais pas mon groupe sanguin et mon rhésus par hasard?
-Je sais plus, je crois que tu es A, ou B, en tout cas tu es de rhésus négatif, comme moi"
Heureusement, des activités sont prévu pour le weekend, histoire de se changer les idées.
Le lundi arrive, il faut que je pose mon après-midi du lendemain, à l'arrache, ça ne plait pas beaucoup à mon chef. J'arrive quand même à l'avoir, mon compagnon aussi, soulagement.
Le lendemain arrive, nous sommes devant le planning familial très en avance. Je me sens soulagée dès que j'y rentre, tout est calme, il n'y a presque personne, et les gens sont accueillants.
Vient le petit bilan avec la gynécologue, on fait le point sur ma contraception : j'ai un stérilet en cuivre, il y a peu de risque de tomber enceinte mais ça arrive.
Nous allons faire l'échographie de datation, je suis à trois semaines environ vu la taille de l'embryon, mais le stérilet n'est pas visible. Retour au bon vieux spéculum et recherche manuelle, pas de signe de stérilet, rien, nada. "Il se pourrait qu'il ai traversé la parois de l'utérus et se balade dans votre abdomen, si c'est le cas il faudra vous faire opérer et on en profitera pour faire une interruption chirurgicale", mon compagnon, qui m’accompagne, se décompose, et je répond "chouette, du deux en un". Après avoir répondu une dizaine de fois à la question "mais tu l'as pas senti partir?" par "non pas du tout", la gynéco me prescrit une radio de l'abdomen et l'injection pour le rhésus sanguin. Nous réservons un créneau au plus tôt pour celle-ci à confirmer quand l'absence de mon stérilet en train de se balader dans mon corps sera avérée.
La course reprend, vers un cabinet de radiologie cette fois, heureusement, on peut me prendre tout de suite, en 20 minutes c'est plié, non, le stérilet de fait pas de rando du côté de mon gros intestin : OUF. On rappelle le planning familial, le rendez-vous est validé, je suis attendue pour le mercredi suivant à 11h15.
Là, les choses se compliquent un peu, je commence à avoir des nausée, cette sensation dès que je mange, d'être un lendemain de cuite. Je ne vais pas au boulot le jour J je prétexte une gastro, car je ne peux pas poser de jours, mon médecin traitant est conciliant, il pourra me faire une arrêt travail pour cette période sans problème, j'ai de la chance.
Le mercredi j'arrive en avance, j'attends un peu en salle d'attente, toujours aussi calme, une maman dorlote son bébé dans sa poussette, il est très mignon, j'ai un léger pincement au coeur, rien de plus. Une conseillère vient me chercher afin de faire le point avec moi sur mon état, ma décision et m'expliquer ce qui va suivre, ma décision est prise sans hésitation, j'ai bien l'intention d'aller jusqu'au bout de la procédure. Je prends donc les premiers cachets d'interruption en présence d'une gynécologue, on me fait l'injection pour le rhésus sanguin par la même occasion. Normalement pas d'effets secondaires pour ces comprimés. Il faudra absolument que quelqu'un soit avec moi le jour de la prise des comprimés "d'expulsion" c'est à dire dans les 48 heures suivantes. Différents rendez vous doivent-être pris, une prise de sans pour vérifier le taux d'hormone et donc l'arrêt confirmé de la grossesse, et une visite de contrôle, durant laquelle on en profitera pour le poser un nouveau stérilet.
Le premier comprimé aura finalement des effets secondaire, je suis vraiment mal, la gastro n'est pas si loin. Je n'aurais pas pu aller au boulot.
Ma meilleure amie ne peut finalement pas être là pour la journée "difficile" ,mon copain ne peut pas poser de jour. Il sera finalement contaminé par ma gastro.
Le jour de la seconde prise arrive, prévu pour 10h, je prends aussi les anti-douleurs, je me cale bien au chaud dans le canapé, mon copain à proximité. J'ai acheté le stock de serviettes ultra night, je suis parée. Vers midi, je commence à m'inquiéter, toujours aucune douleurs rien du tout. Mais vers 13 h ça se déclenche, comme des règles bien douloureuses, et je me dis que j'ai quand même pris ce qu'il faut pour atténuer la douleur. Cela reste supportable.
J'ai eu de grosses pertes de caillots de sang durant le week-end, et le reste de la semaine s'est passée comme si j'avais des règles assez abondantes. C'est la deuxième semaine et les "spots" commencent vraiment à s'estomper.
Finalement en analysant la situation, avec peu de recul cependant, il faut l'avouer, je regrettes surtout d'avoir du mentir sur la raison de mon absence, d'avoir fait passer ce moment pas évident, pour une "simple" gastro. Je trouve ça injuste. A cette occasion cependant j'ai pu découvrir la facette d'une amie, qui ma confié avoir elle aussi procédé à une IVG, et ma situation ma semblé tellement simple et aisée comparée à ce qu'elle a vécu.
J'ai reçu un grand soutient de la part des amis dans la confidence et cela m'a beaucoup touchée. Mon compagnon a révélé une facette qui m'a grandement rassurée concernant l'avenir, et pourtant cela fait 6 ans que nous sommes ensemble, comme quoi, les gens seront toujours une source d'étonnement.
Et surtout, parce qu'on ne nous le dis pas assez et que j'étais restée bloquée là dessus moi-même : Le délais de réflexion d'une semaine n'existe plus depuis début 2016.
Je ne sais pas si ce commentaire aura été vraiment utile, je pense que parler de notre expérience permettra de sortir de cette sorte de convention du silence, ce tabou étrange surtout à notre époque. Notre corps c'est notre choix, il faut le revendiquer, en être fière.
Bisous.