Ce sujet est dédié aux réactions concernant cette actu : Le tabou autour des hommes victimes de violences sexuelles est-il en train de disparaître ?
c'est que les histoires d'hommes agressés (sexuellement) servent surtout comme faire valoir à la propagande masculiniste
TW: études sur le viol des hommes.
Je voulais partager les résultats d'une étude sur le viol des hommes qui me fait pas mal réfléchir à certaines théories féministes sur le viol. Je préviens tout de suite que j'aurais spontanément balayé d'un revers de main l'article de Vice que j'ai lu en premier comme étant un truc de masculiniste mais il a été relayé sur Facebook par des contacts militant-es féministes et/ou transgenres hyper investis dans ce type de sujet et l'étudiant à la fac. Donc j'en ai déduit que c'était pas un article qui avait pour but de victimiser les hommes au détriment des femmes et je l'ai lu. Au début, je suis restée perplexe, j'avais tendance à rejeter les arguments car ça allait pas mal à l'encontre de l'argumentaire tout prêt qu'on répète souvent sur le viol des hommes pour contrer les masculinistes (ils sont plus souvent violés par des hommes, ça leur arrive surtout dans l'enfance etc.). Mais finalement, il me fait réfléchir au discours sur la culture du viol, je me demande si la grille de lecture qu'on emploie est aussi exacte que je le pensais...
Bref voici quelques articles (en anglais) qui relaie l'étude de Lara Stemple, une prof de UCLA spécialisée dans les études de genre, le féminisme et les droits humains :
http://www.slate.com/articles/doubl..._reveals_that_men_are_sexually_assaulted.html
https://broadly.vice.com/en_us/article/the-hidden-epidemic-of-men-who-are-raped-by-women
http://www.theatlantic.com/science/archive/2016/11/the-understudied-female-sexual-predator/503492/
Et un de ses articles à elle :
http://scienceblogs.de/geograffitic...3d50b6ce07403e0a3d35fe-Stemple_60-HLJ-605.pdf
Je résume pour celles parlent pas anglais. En gros, Lara Stemple a mené plusieurs études de terrain pour interroger les hommes et évaluer s'ils ont été victimes de viol, et elle s'est en particulier intéressé aux perpétrateurs de ces viols. Elle avait travaillé sur la prison avant ça donc elle s'était déjà intéressée aux abus sexuels subis par les hommes en prison (extrêmement élevés, dans certains pays jusqu'à 80% des détenus sont violés).
Et en fait, elle s'est rendu compte qu'au niveau du personnel pénitentiaire, le risque de viol pour les détenus hommes provenait principalement du personnel féminin plutôt que du personnel masculin. Mais pour se rendre compte de ça, il qui faut faire une analyse fine car les détenus ont tendance à présenter ces rapports comme "consentants" (alors qu'une membre du personnel a forcément du pouvoir sur eux et qu'elle n'a pas le droit de faire ça - donc il y a dans tous les cas un abus). Donc le personnel féminin est responsable de 80% des abus du personnel sur les détenus alors que le personnel masculin est beaucoup plus important dans les prisons pour hommes.
A l'inverse, dans les prisons pour femmes, le personnel homme est plus une menace pour les femmes que le personnel féminin. MAIS la chercheuse s'est rendue compte que le viol bisexuel/lesbien était encore moins bien connu que le viol sur les hommes, comme une femme n'est pas perçue comme une agresseuse potentielle, ça parait improbable qu'une femme gay puisse violer. Et en fait, la plus grande menace en matière de viol/agression sexuelle pour les femmes détenues n'est pas le personnel masculin mais les autres femmes détenues.
Ensuite, la chercheuse explique le phénomène connu, que la honte empêche les hommes de parler. Mais ce n'est pas que ça, c'est aussi qu'ils ont tendance à dire qu'un autre homme les a violés quand c'est en fait une femme parce qu'ils ont trop honte ou que c'est plus facile à faire passer, ce qui peut fausser les statistiques sur les femmes "prédatrices" puisque ça les invisibile. Les hommes sont également poussés à évoquer leur viol comme un rite de passage sexuel, parfois un truc quasiment drôle et festif, et donc beaucoup de rapports sont labelisés comme "consentis" par les victimes alors qu'ils ne les étaient pas vraiment.
Le viol des hommes le plus courant c'est quand ils sont contraints de pénétrer quelqu'un et non quand ils sont eux-mêmes pénétrés, ce qui rend l'idée d'un viol plus difficile à accepter dans l'imaginaire collectif, ça correspond plus aux viols "sous la surprise, la menace, la contrainte" etc. qu'aux viols "par l'usage de la force". Or, le grand public perçoit toujours le viol comme un acte où l'agresseur utilise sa force physique pour contraindre la victime.
Quand les hommes sont eux-mêmes pénétrés sans leur consentement, l'agresseur est généralement un homme... mais quand ils sont forcés de pénétrés quelqu'un c'est à 80% une femme.
Aussi, le nombre d'hommes victime de viols semble bien plus important que je le pensais, 1 victime sur 3 serait un homme aux Etats-Unis. Je pensais que c'était une statistique masculiniste.
Du coup, je me dis que le discours sur la culture du viol est peut-être trop centrée sur la thématique de la domination masculine. Or, ça semble bien moins évident que ça. La culture du viol dépend peut-être plutôt des stéréotypes genrés (les hommes aiment ça donc ils ne peuvent pas être violés, les femmes n'aiment pas ça donc il faut les forcer etc.) et des mythes sexuels (sur le consentement notamment) ou sur le viol (c'est forcément par la force physique etc.).
Pour contrer les masculinistes et éviter d'enlever le focus des violences faites aux femmes, on a un peu tendance à dire que les viols sur les hommes représentent une minorité mais en fait, la minorité est peut-être plus significative que je le croyais. J'ai toujours été ok pour dire que le viol des hommes était un tabou etc. Mais j'étais vraiment persuadée que c'était une violence "patriarcale" dans le sens où l'homme y prend une place de dominant. Par conséquent, je pensais que les hommes étaient beaucoup moins victimes, et que quand ils l'étaient, ils surtout victimes des autres hommes (exception pour les enfants car donc ce cas-là le rapport de domination est différent), que donc ça revenait à la domination masculine ou que c'était moins systémique. Et c'est peut-être pas si vrai.
En plus, ça reste bénéfique au féminisme d'utiliser ces études sur les hommes, parce que ça secoue les mythes sur le viol et la sexualité en général. Donc au final, ça bénéficie à toutes les victimes, y compris les femmes.
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Bref, quand on prend conscience de la culture du viol, on a tendance à réaliser que beaucoup plus de femmes de notre entourage qu'on ne croyait on était violées ou agressées sexuellement à l'âge adulte (dans l'enfance aussi mais je parle ici surtout des rapports entre adultes) dans des situations banalisées (par leur copain par exemple), qu'elles-mêmes n'ont peut-être pas qualifié ça de viol mais soudain on réalise que ça en était.
Hé bien je me demande si en fait la situaiton n'est pas un peu similaire pour les hommes. Si ça se trouve, on a vachement plus d'hommes de notre entourage qu'on ne l'imagine qui ont été agressés dans la sphère privée (parce que je periste quand même à penser que les agressions sexuelles dans l'espace public sont largement perpetrées par des hommes sur des femmes et rejoignent plus le concept de "domination masculine"). C'est juste qu'ils ne sont pas en mesure d'analyser ce qu'ils ont subi parce que l'information et la sensibilisation est encore plus médiocre que pour les femmes violées par des hommes. Donc ils n'en parlent pas, et ce n'est pas forcément par honte, mais parce qu'ils ignorent même que c'est "choquant".
il est parfois utilisé pour nier l'ampleur de la violence contre les femmes, parfois invisibilisé pour discréditer les masculinistes.
Parce que oui, le féminisme a permis de libérer la parole autour du viol, et donc également la parole des hommes. Mais le problème c'est que certaines données et statistiques deviennent quasiment des crédos religieux qu'on ne peut plus remettre en cause de peur de donner du grain à moudre aux masculinistes.
car s'il y a des foyer pour femme il n'y en a pas pour homme,
A mettre en parallèle avec les travaux sur les violences conjugales au Canada, qui montrent que les deux sexes sont a peu près a parité chez les agresseurs...