Désolée pour le pavé mais la foire aux bestiaux annuelle me rend assez énervée, surtout que ça permet de bien rappeler, tous les ans, à tous les autres bestiaux de l'étable, leur rôle.
Faudrait pas que les femmes oublient à quoi elles servent, ou qu'elles se permettent de penser qu'elles pourraient faire autre chose qu'être focalisées sur leur physique.
Les tests de culture ou les soi-disant trucs culturels des miss... je suis justement en train de relire Dworkin (Femmes de droite), et y a vraiment des passages où on se dit que rien n'a changé depuis des années. C'est super intéressant, je mets un passage (en entier, parce qu'elle développe bien pour le côté "nuancé") :
"Une femme doit, pour survivre, garder une intelligence timide et restreinte. Il lui faut soit la cacher complètement, soit la masquer sous le voile du style, sinon, elle doit périodiquement devenir folle pour en payer le prix. Elle cherchera à exercer l'intelligence d'une manière qui sied aux dames. Mais l'intelligence n'est pas distinguée. L'intelligence déborde d'excès. L'intelligence rigoureuse abhorre la sentimentalité, et les femmes doivent être sentimentales pour tenir en estime la triste sottise des hommes qui les entourent. L'intelligence morbide abhorre le soleil radieux de la pensée positive et de la sempiternelle douceur ; et chaque femme doit être radieuse et enjouée et douce, ou elle ne pourrait acheter la paix du matin au soir par des sourires."
Dwokin parle de l'analphabétisme, qui enferme les femmes, qui les met au rang des animaux : pas besoin de savoir lire puisque le but est qu'elles soient baisées (c'est comme ça que dit Dworkin) et qu'elles fassent des gamins.
Mais
"Certaines classes de femmes se sont vu accorder quelques privilèges liés à l'alphabétisme, pas des droits mais des privilèges. Les courtisanes de la Grèce antique étaient instruites, alors que les autres femmes étaient tenues dans l'ignorance ; toutefois il ne s'agissait pas de philosophes mais de putains. Ce n'est qu'en acceptant leur fonctions de putains qu'elles pouvaient obtenir le privilège de l'alphabétisation. Les femmes de la classe supérieure se voient traditionnellement enseigner certaines compétences lettrées (nettement plus limitées que celles enseignées aux hommes de leur classe d'alliance) : elles peuvent accéder aux privilèges de l'alphabétisme, si elles acceptent leur fonction purement décorative. Après tout, l'homme ne veut pas côtoyer la chienne reproductrice et sanguinolente à la table du dîner, ou côtoyer le con entrouvert au salon à l'heure de son journal ou de son cigare. Le langage est signe de raffinement : une preuve que lui est humain et elle, non.
La croissance de l'analphabétisme parmi les pauvres des zones urbaines aux États-Unis (le bouquin date de 1983) concorde avec une nouvelle montée de racisme et de mépris ostensible à l'égard des pauvres. L'analphabétisme est programmé dans le système : un enfant intelligent peut fréquenter l'école sans que personne ne lui enseigne à lire ou à écrire. Quand l'appareil pédagogique abandonne ces compétences pour des groupes donnés, il abandonne pour eux toute dignité humaine : il n'est plus que réclusion d'animaux parqués . il n'apporte pas la vie humaine aux êtres humains.
Dans toutes les cultures, les filles et les femmes sont les analphabètes, elles forment les deux tiers des analphabètes dans le monde, une proportion en hausse constante. Les filles ont besoin de maris, pas de livres"
"Elle ne doit pas savoir que les idées ont de la valeur, seulement que sa valeur se résume à être baisée et à procréer"
"Aux Etats Unis, il a été difficile d'obtenir pour les femmes l'accès à l'instruction, et bien des domaines de l'éducation leur demeurent encore fermés. Mais c'est dans l'exercice concret de l'alphabétisme comme instrument et comme capacité que les femmes encourent punition, ostracisme, exil, récriminations et le plus virulent mépris. Pour lire et rester féminine, elle lit des romances gothiques, pas des ouvrages médicaux ; des livres de cuisine, pas de la jurisprudence ; des romans policiers, pas de la biologie moléculaire. La langue des mathématiques n'est pas une langue féminine. Elle peut apprendre l'astrologie, pas l'astronomie. Elle peut enseigner la grammaire, mais non inventer un style ou lancer des idées."
"on apprend que les femmes ont des organes sexuels que les hommes doivent utiliser, sinon les femmes ne seront pas des femmes : elles sont en quelque sorte moins ou plus que cela, ce qui constitue dans chaque cas un tort, rigoureusement réprimé chez elles. On les définit, valorise et juge d'une seule et unique façon : en tant que femmes, à savoir, dotées d'organes sexuels qui doivent être utilisés. Les autres parties du corps ne comptent pas, à moins d'être utilisées dans les rapports sexuels ou comme indicateur de disponibilité ou de désirabilité sexuelle. L'intelligence ne compte pas. Elle n'a rien à voir avec ce qu'une femme est.
Les femmes naissent dans un bassin de main-d’œuvre spécifique aux femmes : leur travail est le sexe. L'intelligence ne vient pas modifier, réformer ou révolutionner cette réalité élémentaire pour les femmes.
Elles sont marquées pour le mariage et la prostitution par une blessure entre les jambes...
L'intelligence ne crée ni ne détruit cette blessure ; elle ne change pas non plus les usages de la blessure, de la femme, du sexe.
Le travail des femmes s'effectue en-dessous de la taille ; l'intelligence est plus haut. les femmes sont en bas, les hommes en haut."
"Le travail des femmes qui n'est pas le mariage ou la prostitution demeure généralement confiné, toujours sous payé, stagnant, stéréotypé selon le sexe"
"On les paie beaucoup moins que les hommes pour un travail comparable, et le travail comparable est difficile à trouver. Les conséquences de ce manque d'équité, quels que soient les pourcentages d'année en année et de pays en pays, ne sont pas chose nouvelle pour les femmes. Incapables de vendre du travail non genré pour gagner leur vie, les femmes doivent vendre du sexe."
"Les féministes semblent penser que le salaire égal pour un travail égal est une simple réforme, alors que c'est loin d'être une réforme : c'est une révolution. Les féministes ont refusé d'admettre qu'un salaire égal pour un travail égal demeure impossible tant que les hommes dominent les femmes, les femmes de droite ont refusé de l'oublier"
"Les femmes de droite ont examiné le monde ; elles trouvent que c'est un endroit dangereux. Elles voient que le travail les expose à davantage de danger de la part de plus d'hommes ; il accroît le risque d'exploitation sexuelle. Elles voient ridiculisées la créativité et l'originalité de leurs semblables ; elles voient des femmes expulsées du cercle de la civilisation masculine parce qu'elles ont des idées, des plans, des visions, des ambitions"
Je pense fort à Alice Coffin là.
"Elles voient que le mariage traditionnel signifie se vendre à un homme, plutôt qu'à des centaines : c'est le marché le plus avantageux. Elles voient que les trottoirs sont glacés et que les femmes qui s'y retrouvent sont fatiguées, malades et meurtries. Elles voient que l'argent qu'elles-mêmes peuvent gagner au travail ne les rendra pas indépendantes des hommes, qu'elles devront encore jouer les jeux sexuels de leurs semblables : au foyer et aussi au travail."
"Les femmes de droite voient que, dans le système où elles vivent, si elles ne peuvent s'approprier leurs corps, elles peuvent consentir à devenir une propriété masculine privatisée s'en tenir à un contre un, en quelque sorte. Elles savent qu'elles sont valorisées pour leur sexe, leurs organes sexuels et leur capacité de procréation, alors elles tentent de rehausser leur valeur : par la coopération, la manipulation, la conformité ; par des expressions d'affection ou des tentatives d'amitié ; par la soumission et l'obéissance ; et surtout par l'emploi d'euphémisme comme "féminité", "femme totale", "bonne", "instinct maternel", "amour maternel". Leur détresse se fait discrète ; elles cachent les meurtrissures de leurs corps, de leur coeur ; elles s'habillent soigneusement et ont de bonnes manières ; elles souffrent, elles aiment Dieu, elles se conforment aux règles. Elles voient que l'intelligence affichée chez une femme est un défaut, que l'intelligence réalisée chez une femme est un crime. Elles voient le monde où elles vivent et elles n'ont pas tort. Elles utilisent le sexe et les bébés pour préserver leur valeur parce qu'elles ont besoin d'un toit, de nourriture, de vêtements. Elles utilisent l'intelligence traditionnelle de la femelle, animale, pas humaine ; elles font ce qu'elles doivent faire pour survivre."