Quand je suis triste, je repenses systématiquement à cet écrit de Richard Siken, qui a écrit beaucoup de choses bien, au demeurant. Enfin ce n'est pas lui qui l'a écrit, mais c'est lui qui le relate, en tout cas.
"The daughter is sad. I’m so sad says the daughter. Why are you sad? asks the mother. The daughter doesn’t know. The days go by. The daughter isn’t getting better and the mother worries, frets, paces. The mother isn’t a doctor, she’s a poet, so she brings home a book. I’m too sad to read says the daughter but it’s not for reading, it’s for figuring: it’s a thesaurus. You can be as sad as you need to be says the mother but you must know what kind of sad you are. Are you sad-lonely, sad-desperate, sad-lacking-in-faith? The daughter sits at her desk and looks at the words she has written on the sheet of paper. It’s not that the words are any less true than she imagined, it’s not that they’re smaller than she thought, but they’re limited, they have boundaries, they’re finite, and she’s bigger than they are, surprisingly bigger and more vast than these words on the page, written in her own hand. Go figure. She starts to feel better."
Et pour les non anglophones, je me fends d'une petite traduction, qui sera forcément un peu interprêtée personnellement... :
La fille est triste. Je suis si triste, soupire la fille. Pourquoi tu es triste, demande la mère. La fille ne sais pas trop. Les jours passent. La fille ne va pas mieux et la mère s'inquiète, s'agite, tourne en rond. La mère n'est pas docteur, elle est poète, alors elle ramène un livre à la maison. Je suis trop triste pour lire lui dit la fille, mais ce n'est pas pour lire. C'est pour déterminer : c'est un thésaurus. Tu peux être aussi triste que tu en as besoin, lui dit la mère, mais tu dois savoir quelle genre de tristesse tu as. Est-ce que tu es triste-esseulée, triste-déséspérée, triste-ayant-perdu-la-foi ? La fille est à son bureau et regarde tous les mots qu'elle a écrit sur sa feuille. Ce n'est pas que les mots sont d'une façon ou d'une autre moins vrais qu'elle imaginait, ce n'est pas qu'ils sont plus petits qu'elle pensait, mais ils sont limités, ils ont des frontières, ils sont restreints, et elle est plus grande qu'eux, étonnamment plus grande et plus vaste que ces mots écrits sur cette page, de sa propre main. Allez savoir. Elle commence à aller mieux.
J'ai toujours trouvé ces mots relaxants. Vrais. Cette fille a toujours réussi à faire son travail de recherche et de réconfort à ma place, quand je pensais à elle.