Alors... J'ai longtemps été élitiste sans le savoir quant à mes goûts musicaux. J'ai grandi dans un lycée catho, je n'aimais pas le rap français et je regardais beaucoup les NMT, ce qui me confortait dans l'idée que parce que le style de musique ne me parlait pas, les artistes de ce style et leurs fans étaient des abrutis incultes et stupides qui ne savaient même pas apprécier des chansons bIeN eCrItEs. (Soit dit en passant, no Shade à Linksthesun, j'apprécie énormément ses vidéos et même lui a admis le côté hyper élitiste des NMT).
Je me souviens qu'au lycée, un gars était hyper ouvert sur le fait qu'il était fan de Jul. Et ça + le fait qu'il n'était pas super bon en cours, ça me faisait le considérer comme un mec sympa mais un peu concon. J'en suis pas fière, à vrai dire j'en ai plutôt honte maintenant, mais c'est pour vous expliquer comment je considérais les gens qui aimaient ce style de musique.
Personnellement, j'ai grandi avec Lady Gaga, Kesha, Britney Spears, David Bowie, et, plus tard, avec Fall Out Boy, Panic at the disco et In this moment (les clichés gay dududu
). Et la seule chanteuse/rappeuse que j'écoutais était Nicki Minaj (maintenant j'écoute un peu Cardi B). C'est dingue, parce que j'ai grandi avec assez peu de personnes de couleur dans mon entourage, et en conséquence la plupart des artistes que j'écoutais et que j'écoute encore sont blancs (sauf Todrick Hall... C'est mort ses chansons elles passent à mon mariage
).
Et des cas comme ceux d'Aya Nakamura me font m'interroger sur comment ma socialisation a influé sur mes goûts, musicaux, mes goûts littéraire, ma culture... Aya, j'ai écouté quelques chansons, je n'aime pas, et bon, je pense que ça restera comme ça. Mais j'ai l'impression que ma socialisation et mon sens du "bon goût" me poussent à rejeter d'emblée des musiques, des films qui pourraient me plaire parce que c'est considéré comme "tacky", comme grossier aux yeux de la cool kid issue d'un lycée catho et qui n'écoute que des artistes qui ont fait minimum 5 ans de lettres. Et j'ai l'impression que les gens qui sont dans le rejet hostile d'Aya Nakamura sont des gens un peu comme ça, des gens qui vont d'emblée avoir un blocage à cause de son style de musique, de son milieu social, voire même de sa couleur et de son genre. Et non seulement c'est triste, mais c'est dangereux. C'est dangereux parce que ça pousse à avoir une hiérarchie entre les cultures, de voir la culture LGBT comme hypersexualisée, le milieu du hip hop comme un milieu d'abrutis sexistes à gros muscles, le milieu de la musique classique comme distingué et réservé aux élites... Et ça pousse les gens à se confiner dans des cases desquels ils ont peur de sortir, donc ils restent dans l'incompréhension, la condescendance ou la peur des gens qu'ils ne connaissent pas. Et, bon, Aya, comme n'importe quelle figure publique issue d'une minorité, est la cible principale de ce genre de comportements.
Perso, j'essaie de travailler là dessus. Je ne vais pas dire que c'est parti youhou je n'ai plus de biais, ça serait faux, on ne déconstruit pas tout une éducation en deux jours. Mais je commence par, 1, essayer d'élargir mes horizons (d'ailleurs si vous avez des artistes LGBT de couleur à me recommander, allez y), 2, me dire que ce n'est pas parce que je n'aime pas que les gens qui aiment la musique d'Aya, de Jul, de Maître Gims sont des gens sympa mais un peu concon.