@Jaliam
En termes d'information il ne peut donc pas y avoir d'entre deux entre les médias mainstream bourrés de stéréotypes et la propagande de traditionnalistes ?
Toi tu es peut-être bien informée sur l'excision, mais je suis à peu près sûre que si on prend une personne lambda, les infos qui l'atteindront seront principalement issues de talk show misérabilistes ou d'articles de presse féminine ultra simplistes. Donc c'est appréciable, pour une fois, d'avoir accès à des sources plus fouillées sur le sujet, issues de personnes qui l'ont étudié sur un temps plus long que des journalistes payés à vendre du papier et faire pleurer dans les chaumières. Rien que de savoir que l'excision peut être pratiquée par des chirurgiens et qu'il y a des recherches sur la vie sexuelle des femmes excisées, c'est complètement nouveau pour moi et ça me fait réaliser à quel point les sources auxquelles j'ai eu accès jusque là étaient biaisées et incomplètes.
Je pensais avoir été suffisamment claire en précisant ça :
à mes yeux l'excision ça reste une pratique misogyne, rétrograde et qui ne devrait plus exister,
mais le but de mon message n'était absolument pas de faire du relativisme culturel et d'encourager à fermer les yeux sur cette pratique au motif qu'elle serait consentie dans certains cas. C'est surtout que je voyais plein de posts réduire les propos de
@Astipalaya à de la complaisance, ce qu'à mon sens, ils ne sont absolument pas. Pour moi c'est de la mise en perspective, qui invite à pousser la réflexion plus loin que l'indignation ou la répulsion immédiates inspirées par l'excision, et qui peut être très féconde à plein de niveaux (prévention, prise en considération des femmes excisées, critique de nos propres représentations, etc.).
Ça me rappelle un autre débat qui a fait pas mal de remous dans le petit monde des chercheurs en SHS sur X. Une historienne de la médecine a exposé un point de vue très argumenté sur la consommation de drogues et l'addiction, mais qui allait aussi à l'encontre de la doxa dominante sur le sujet. Elle s'est pris une volée de bois vert de plein de gens (notamment des médecins), qui s'arcboutaient sur l'idée que "la drogue c'est MAL!!!" et qui ont tout de suite assimilé son discours à de la complaisance envers la drogue, voire à une incitation à consommer. Alors que c'était pas du tout le message, et qu'elle cherchait avant tout à resituer la consommation de drogue et l'addiction dans un contexte beaucoup plus large en mettant aussi en lumière des réalités qui passent le plus souvent complètement sous le radar (notamment le fait que la majorité des consommateurs sont des gens bien insérés socialement et qui maîtrisent leur consommation). C'est un discours qui est très difficile à entendre quand on traite des addictions quotidiennement, mais qui est pourtant nécessaire parce qu'il aide à avoir une vision plus complète de la réalité et qu'il invite à questionner les approches thérapeutiques traditionnelles qui n'ont qu'une efficacité très limitée.
Donc bref, tout ça pour dire que la confusion "mise en perspective" / "complaisance" est très courante alors que ce sont pourtant des choses bien distinctes. Et pour revenir aux femmes excisées, je pense que ça n'aidera personne de taire certains pans de la réalité parce qu'ils pourraient potentiellement être récupérés par des traditionnalistes.