Et les abrutis qui disent "Bernie or Bust" ou bien qui disent si c'est pas Bernie, je vais voter pour Trump devraient prendre en compte ça. Hillary n'est pas Satan, Trump l'est lui.
Le seul petit parti qui est présent dans les 50 états est le libertarien. Mais attention, l'émergence d'un petit parti pourrait donner un résultat similaire à l'éléction de 2000 et envoyer Trump à la maison blanche.
C'est tout le problème de nos systèmes "démocratiques" je trouve. Tout est maintenant concentré sur "comment éviter que Trump accède au pouvoir". Et on a la même logique en France, avec le FN : votez utile sinon c'est le FN qui passera (et on a bien retrouvé cette injonction sur Madmoizelle au moment des dernières régionales). C'est à mon avis une logique qui favorise le vote d'extrême droite, en favorisant le maintien d'un status quo qui continuera de produire les mêmes effets, ne serait-ce parce qu'il maintient le ping-pong d'un bipartisme qui me paraît incapable de s'adapter au nouveau monde. Tu dis que la campagne Bernie a influencé le programme Clinton : je l'espère, vraiment. Mais que on voit la façon dont Clinton a géré Black Lives Matter, quand on voit
les financements de sa campagne (et
l'accès que ça donne aux plus généreux des contributeurs), quand on entend les déclarations de son Bill de mari qui dit aux musulmans
"si vous êtes contre le terrorisme, ne partez pas, nous avons besoin de vous", ou quand il essaye de défendre ses déclarations à propos des "super-predators", tout ce qui me vient à l'esprit c'est
business as usual.
Je pense d'ailleurs qu'on ne peut pas balayer aussi vite la question du "Bernie or Bust" en traitant les citoyens d'abrutis. Pour moi ça pose surtout une question : pourquoi on en arrive là ? Quelles politiques font qu'aujourd'hui des gens ne supportent plus de voter pour une candidate "classique" ? Trump n'est pas Satan, c'est à mon avis le symptôme de ce qu'ont produit les politiques de ces dernières décennies, délaissant et appauvrissant les classes moyennes et populaires (je ne suis à nouveau pas spécialiste, mais c'est en tout cas c'est ce que j'ai lu de plusieurs sources analysant les motivations de sa base électorale). Politiques dans lesquelles Clinton s'inscrit tout à fait.
Un article sur une partie de la base électorale de Trump :
America’s angriest white men: Up close with racism, rage and Southern supremacy
http://www.salon.com/2013/11/17/ame...lose_with_racism_rage_and_southern_supremacy/
Si Trump remporte cette élection ce sera catastrophique pour les étatsuniens, en particulier pour les groupes déjà victimes d'oppressions. Rien qu'au niveau de la libération de la parole raciste et oppressive en général, on a vu ce que la campagne de Trump a donné, et ce que 5 ans de sarkozisme ont donné. Mais est-ce que l'élection de Clinton changera fondamentalement le problème ? Est-ce que ce n'est pas simplement en train de repousser la catastrophe, qui couvera pendant encore 4 ans, sous les politiques d'un parti qui semble tout miser aujourd'hui sur "votez Clinton, sinon c'est Trump qui gagnera".
Un autre article sur l'après-Trump :
Uh-oh: Where does all the white rage go when Donald Trump loses?
http://www.salon.com/2016/04/01/uh_oh_where_does_all_the_white_rage_go_when_donald_trump_loses/
Notamment ce passage me parle beaucoup :
The Republican Party, the story goes, having for too long cynically played upon the ignorance and fears of its white lower-middle class base to gain the votes to pass ever more lavish tax breaks for its wealthy donor class, has had its electorate stolen by a clownish billionaire willing to say in plain English what Republican leaders have for decades been communicating to their constituents only in whispers and dog whistles.
Pour celleux qui ne parlent pas anglais, en gros le parti Républicain s'est vu voler son électorat par un clown billionaire qui disait clairement ce que les responsables du parti ont toujours dit de façon détournée. C'est le principe du dog whistling, de faire passer des notions racistes ou classistes dans des expressions inattaquables (comme par exemple "la France qui se lève tôt", "les mercedes qui tirent des caravane", etc.). Et cette analyse je trouve qu'elle s'applique très bien en France, où PS et UMP jouent avec les mêmes allumettes que le FN, avec le risque constant que les Français-e-s ne préfèrent l'original à la copie.
Et enfin je trouve qu'il y a une certaine hypocrisie et instrumentalisation du vote "utile" : les sondages donnaient Sanders gagnant contre Trump, quand ils donnaient Clinton perdante. Si vraiment l'objectif est d'empêcher l'accès au pouvoir de Trump, Clinton aurait dû laisser la place à Sanders. Alors je sais bien que ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, et que le principe de la primaire c'est que les démocrates choisissent leur candidat, mais comme d'habitude ce vote "anti-extrême" me laisse un mauvais goût dans la bouche. Parce que c'est toujours les mêmes qui en profitent, sans jamais avoir à rendre de compte à celleux qui se sont assis sur leur convictions. Comme quand on avait voté Chirac en 2002. De l'utilité du vote anti-extrême, on aura de quoi en reparler
pour nos propres prochaines présidentielles.