J'ai eu une relation d'un an et demi avec un sale type, qui apparemment avait été profondément blessé par le fait que son ex l'avait trompé (je ne l'ai su que lors de notre rupture... vive la relation de confiance !). Résultat : je n'avais pas le droit d'aimer le sexe. Dès les premières semaines de notre relation, il m'a clairement fait comprendre que je n'avais pas le droit d'exprimer mon envie de faire l'amour (soi-disant qu'une femme qui demande est vulgaire, qu'il n'aimait pas ce "genre de femmes" etc...). Je ne me souviens plus, du coup, de comment on engageait les rapports (en tout cas, si c'était moi qui prenait l'initiative, ça finissait toujours par une leçon de morale), mais il n'y avait quasiment aucun préliminaire. Je pouvais le caresser ou le sucer (mais surtout pas tenter de l'embrasser après, c'était "trop sale pour lui"), mais lui refusait de toucher mon sexe avec ses doigts, encore moins avec sa langue, il me disait qu'il trouvait ça "dégueulasse". Je ne souffrais pas pendant le rapport (de toute façon, il jouissait au premier va-et-vient (inutile de préciser qu'il refusait d'aborder ce problème)), mais je n'avais pas de plaisir non plus. Une fois où il a tenu plus longtemps, j'ai eu le malheur d'avoir un petit orgasme (le premier de ma vie en couple), j'étais contente, mais lui m'a littéralement fait une scène, comme si j'étais la pire traitresse.
Ce qui m'étonne le plus quand j'y repense aujourd'hui, c'est que je m'étais faite à l'idée que ça serait comme ça pour toujours, que c'était "tant pis". Peu avant la fin de ma relation, j'avais même dit à ma soeur que je ne pouvais pas jouir, que j'avais des désirs trop compliqués, que je ne ressentais pas de plaisir sexuel en couple, persuadée que c'était de ma faute.
Au final, jusqu'à maintenant, j'avais fini par attribuer cet échec sexuel à la précocité de mon partenaire. Mais en voyant les illustrations, puis les témoignages au dessus, je réalise que le problème n'était pas là. C'est une évidence : précoce ou pas, si mon partenaire avait été dans l'échange et le partage, l'envie de me donner autant que de recevoir, nous aurions réussi à évoluer vers une sexualité épanouissante pour nous deux.
Plus haut, quelqu'un a écrit "j'avais mal après chaque rapport", et je me suis soudain rappelé d'une visite au planning familial, où la médecin m'avait dit "ce n'est pas normal d'avoir mal, un rapport sexuel n'est pas censé être douloureux (sauf si vous trouvez votre plaisir dans la douleur).", et je me suis rappelé de ce qui avait mené à cette discussion : j'avais toujours le bas-ventre "engourdi", comme une douleur sourde dans l'utérus, après le sexe. Une douleur pas si éloignée des crampes de règles, mais je me souviens que je visualisais, dans mon imagination, de petites fissures violettes, comme des veines gonflées ou déchirées, sur mon col de l'utérus. C'était l'image que j'associais à cette douleur que je croyais normale.
Cette douleur sourde, que j'ai ressentie après chaque rapport pendant un an et demi, a disparu aussitôt que j'ai changé de partenaire, et je l'avais simplement oubliée. Enfouie dans un coin de ma mémoire, avec le reste de cette relation dont je n'ai, finalement, que très peu de souvenirs.
(Il m'est arrivé une ou deux fois, ces 6 dernières années, de la ressentir à nouveau, généralement après un "faux mouvement", un coup de travers un peu trop profond... ces petits accidents qui peuvent arriver quand on explore les possibles de la sexualité.)
En lisant les commentaires, je me disais que j'avais de la chance, de n'avoir rien vécu de ce genre malgré une relation toxique. Mais je viens de comprendre que l'
on peut avoir subit des violences sexuelles, même en ayant toujours consenti aux rapports, et même si le partenaire n'a jamais eu de geste ouvertement violent ou brutal à notre égard.
J'aurais voulu avoir pris la mesure de ce que m'avait dit la gynécologue plus tôt :
ce n'est pas normal d'avoir systématiquement mal après un rapport sexuel.
Merci à l'artiste pour son travail
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