Panama et Colombie, les tribulations de Watou

Esmé.

Old buccaneer of masala chai
24 Septembre 2014
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Voilà, pour pouvoir papoter tranquillou de mon voyage au Panama et Colombie de ce mois de mai sans polluer les sujets sérieux tels que l'ECM ou un vrai topic sur le Panama, je créé donc un topic pour parler de mon voyage, d'un point de vue tout à fait personnel et subjectif. Je ferai sûrement un "guide" plus sérieux et plus objectif, mais là c'est vraiment ma vie mon oeuvre. Si, lisant ce pavé indigeste, vous avez des questions, hésitez pas, je suis quelqu'un d'un poil volubile ! :cretin: (comment ça, "ça se voit" ? :ninja: )
Soyez fortes, y a de la tartine... :lunette:

Pour le résumé du voyage, il est important de savoir que j'étais en bateau : je logeais, vivais et me déplaçais en catamaran, donc le budget et l'approche du pays ne sont pas du tout les mêmes qu'en étant à terre.


Présentation du pays

Déjà, le Panama. Prenons un instant pour présenter le pays. Pour situer, c'est au nord ouest de la Colombie, le tout début de la petite partie de terre qui relie les deux Amériques. "Puente del mundo, corazon del universo" ("Pont du monde, cœur de l'univers", pour les trois non bilingues que j'ai vu échanger des regards paniqués. Je suis trop bonne. :drama: )

500km de large sur 100km de hauteur. Oui, c'est un pays tout en longueur. 3,7 millions d'habitants. Langue : espagnol. La partie touristique et développée est plutôt sur la côte pacifique du pays. Comme exemple probant, la différence entre Panama Ciudad, la capitale (côté Pacifique du canal), qui est une grande ville assez développée et touristique, et Colon (côté Atlantique du canal), où on te déconseille de t'arrêter et où le trafic de drogue amène comme qui dirait une certaine insécurité. Bien bien bien... Le fameux canal lui a donné un essor économique, mais sinon, y a pas grand-chose. Faisait partie de la Grande Colombie, puis a été « soutenu » par les américains qui ont construit le canal, aujourd'hui indépendant, même s'il reste quelques bases militaires américaines. Voilà. Après, je risque de dire des conneries si j'ajoute trop de choses... D'ailleurs, si quelqu'un est calé en histoire panaméenne et que j'ai dit n'importe quoi, reprenez moi !!! :cretin:

La monnaie officielle est le Balboa, alignée sur le dollar américain. Ils n'ont pas le droit d'imprimer de billets (!!!) donc tout le monde utilise le dollar. Quelques pièces de Balboa sont en circulation, mais c'est tout...

Y a un vol direct Paris-Panama, mais je suis passé, à l'aller, par Amsterdam. 17h de vol, tranquilou, KLM est une compagnie sympa, attention à la clim dans les avions, on se pèle !!!


Panama Ciudad

Juste au bord du Pacifique, Panama Ciudad est une grande ville moderne avec plein de tours. Il y a deux aéroports, un national, Arbook, et un international, Tokummen. Attention, c'est taquin quand on prend le bus sans vérifier. « C'est le bus pour l'aéroport ? » « Oui oui ! » Mais pas le bon. Bien bien bien... C'est comme ça qu'on se retrouve au milieu de nulle part à descendre au premier arrêt en espérant chopper un bus dans l'autre sens ou un taxi, là, on a plus le temps de se la jouer aventurière de l'extrême. Ça sent le vécu ? C'est normal... (Toi aussi monte mille marches pour traverser la route par pont et enjambe des mecs qui dorment là ("te réveille pas te réveille pas te réveille pas...") pour reprendre le bus dans le bon sens avec un sac de 25kg (dont 15 d'équipement pour le bateau, j'ai pesé...) !
Le taxi entre Tokummen et le centre coûte entre 25 et 30$, il ne faut pas hésiter à s'arranger avec d'autres gens pour le partager ! Et entre le centre et Arbook, il faut compter 10$. Voilà.

Logement à Panama, je me suis arrêtée dans une petite auberge de jeunesse un peu paumée, Posada 1914, où les gens étaient très sympas, parlaient anglais (MERCI.) et où il y a avait un mur d'escalades où transpiraient des jeunes hommes à moitié à poil. On a fait pire, quoi... Le bâtiment est un peu vieux, ce qui donne un charme un peu désuet à l'ensemble, propre, adresse sympa.

Pour la ville en elle même, malheureusement, j'ai pas grand-chose de plus. Je pensais y repasser plus tard, mais j'en ai finalement pas eu l'occasion. Les Diablos Rojos, des bus locaux dont les décorations rivalisent d'originalité et de couleurs, sont impressionnants, mais c'est à peu près tout ce que j'ai sur la capitale...


Bocas del Toro

A 1h d'avion de Panama Ciudad, la province de Bocas del Toro. 1h de clim intense, où je me pèle en jean et pull. Bonne ambiance. Une petite ville qui a été très touristique il y a quelques années, et qui tombe un peu aujourd'hui (ou alors c'est parce que j'y étais en basse saison. C'est possible.), au milieu de la mangrove, des palmiers et de l'eau verte. La baie est traversée de lanchas, des petites pirogues à moteur, qui relient le continent et les îles de Colon (où se trouve la ville de Bocas) et Bastimentos (où Christophe Colomb aurait réparé sa coque lors de son quatrième et dernier voyage) et qui rendent le snorkeling dans le mouillage un peu dangereux. Il n'y a de toutes façons pas grand monde sous l'eau, à part quelques calamars, des concombres de mer et deux étoiles de mer.

La ville en elle même n'est pas spécialement jolie, pas spécialement propre, et les commerces (tous tenus par des chinois. Vraiment. Genre ils vont pas au marché, ils vont chez « el chino », et ce n'est pas péjoratif comme l'arabe du coin. C'est juste un fait. Les commerçants sont chinois. Point.) sentent particulièrement mauvais. La bouffe est de manière générale peu engageante, et la viande et les poissons font franchement peur. Le poulet est blanc (passé à la javel), les autres viandes sont verdâtres. Heureusement, il y a au bout de la ville un américain qui, en plus de faire un ceviche à tomber (un plat péruvien largement répandu dans le coin, du poisson blanc ou des crevettes marinés dans du jus de citron, du colandro (un genre de coriandre local) et un peu de pimant. Canon.), propose de la viande et du poisson, particulièrement du thon et du filet mignon de porc qui sont à tomber. Le tout au prix local, qui est hyper correct.

Quand on est arrivés, l'eau était coupée, parce que polluée. Pas polluée genre « oh non, y a peut être une bactérie qui traine », polluée genre ils se sont chiés dans leurs conduits d'évacuation. Au robinet, l'eau avait un dépôt brun, avec des genre de grumeaux boueux. L'eau, ici, se boit en bouteille minérale. Enfin à mon avis...


L'île de Bastimentos, à côté, est moins touristique, on passe donc du village local (maisons sur pilotis au milieu de leur décharge, avec les enfants et les poules qui jouent dedans et l'odeur qui va avec) à la plage paradisiaque et cocotiers qui donne sur l'océan, spot reconnu de surf. Pélicans gris, frégates, crabes des cocotiers, oranges pour les petits et bleus pour les gros, avec une seule grosse pince.
Il y a aussi, sur cette île, la plage de Red Frog Beach, où on est censé pouvoir voir des grenouilles rouges tachetées de noir. On s'y est retrouvés sous une pluie torrentielle, donc on s'est un peu assis dessus. Mais la balade le long de la plage est très jolie, avec une végétation impressionnante de taille et de foisonnement.

Autour de ces deux îles principales, il y en a un une tétra-chiée autour desquelles ont a été se balader un peu, dans des mouillages aléatoires, où on navigue à vue en guettant les patates de corail à fleur d'eau sur lesquels il faudrait pas qu'on aille se mettre, au milieu de la mangrove, où on était seuls en tête à tête avec les poissons, les oiseaux et les chicras, qui sont en fait comme les midges écossais (dont je pensais m'être débarrassée !!! Heureusement moins nombreux...), qui sont des espèces de tout petits moucherons qui piquent fort. Joie et bonne humeur. Des petits coins où la mer est suffisamment calme pour mettre le kayak à l'eau et aller pagayer dans la mangrove, Indiana Jones et Christophe Colomb réunis n'ont qu'à bien se tenir !

Des coins où faire un peu de snorkeling, donc, tubas, masque et palmes, et c'est parti ! Des coraux multicolores, des algues qui ondulent paresseusement au grès du courant, et des poissons. Des petits, des gros, des groupes, des solitaires, des timides, des curieux, de toutes les formes et de toutes les couleurs. Que je connais, des chirurgiens, des calandres, et pleins de petits barracudas. Et un gros devant lequel ont fait demi tour, faut pas être trop taquins non plus...


Avec l'iPhone en haut du mât, on arrive à avoir une connexion internet (très relative). J'apprends les rudiments de la navigation, du vocabulaire à bord, des significations des pavillons, les noeuds de base. La douche à bord est rudimentaire : on se mouille en descendant du bateau direct dans la mer, on se savonne, on re saute, on nage, puis on se rince à l'eau claire, parce que l'eau salée, ça colle sacrément...

Le coin de Bocas est assez humide, on essuie quelques orages assez importants, qu'on regarde nous arriver dessus (le ciel est violet, les éclaires illuminent le ciel en quasi continuité, à l'avant du bateau, on se prend des seaux d'eau et on est au milieu de rien, complètement ballottés par les éléments. C'est grisant, et très impressionnant, limite inquiétant.) avant le moment où on doit rentrer parce que la foudre commence à taper un peu près et que les éclairs à proximité avec les pieds dans l'eau, c'est pas le top du top...

Humide, donc, rien ne sèche, les fringues moisissent à vue d'oeil. Le temps de les sortir pour les mettre au vent, il re pleut et on doit les rentrer. Ca devient un peu lassant, à la longue... Surtout qu'on est bloqués dans le coin à cause du gaz : on doit partir bientôt pour San Andres, où il n'y a pas de ravitaillement en gaz possible. Donc, il faut le faire avant. Sketch à la panaméenne. On a deux petites bouteilles françaises qu'on a envoyées à l'usine pour qu'elles soient remplies. Ca devrait prendre une semaine. Devraient, parce qu'entre ce qu'ils disent (tout est toujours possible, demain c'est fait, pas de problème ! "Mañana !") et la réalité, y a comme une marge, la preuve dans cette anecdote.

Donc, par précaution, on planche sur une solution de secours. (Faut imaginer des déambulations chez tous les chinois du coin à la recherche de tout ça, hein... Couplées au mal de terre, qu'on a quand on a pris l'habitude d'être sur un bateau : ça tangue quand on est à terre, avec des vertiges. Comme quand on a bu, mais sans l'alcool.) Option 1 : on a la bouteille panaméenne, qui rentre tout juste dans le coffre du bateau où on range les bouteilles (tout doit être bien stable pour quand on navigue, surtout des bouteilles de gaz...) mais qui dépasse avec le détendeur : impossible de fermer le coffre, ça nous obligerait à brancher et débrancher le gaz dès qu'on veut cuisiner. Ou alors on la couche. Le mec nous dit oui oui, bien sur, pas de soucis, le site internet de butagaz nous dit plutôt SURTOUT PAS MALHEUREUX VOUS ALLEZ TOUS EXPLOSER (je paraphrase un peu). Bon. Option 2 : la bouteille américaine. Elle rentre, pas de soucis. Mais on a pas de détendeur. Vous savez, le truc qui permet de gérer la quantité de gaz que t'envoie dans tes plaques. Le mec nous dit "bah, c'est pas grave, tu l'ouvres juste un peu !" C'est ça. Et on cuisine avec les flammes de l'enfeeeeeeer !!! Non. On penche finalement pour la bouteille panaméenne, pas pratique mais safe. On bricole, du coup, et on fait des trous dans la coque pour faire passer les tuyaux. Fort bien nous en a pris, puisque finalement, le samedi, alors que la fenêtre de départ pour San Andres approche dangereusement (on ne prend pas la mer comme on prend la route : il faut des conditions météos qui ne soient pas absurdes...), on retourne chez le chinois où un premier gars nous dit que le camion de l'usine n'est pas encore arrivé, un deuxième qu'il doit décharger les bouteilles, un troisième qu'elle sont déjà arrivées, et le dernier qu'elles sont en fait pas parties. Joie et bonheur. L'organisation à la panaméenne, donc, où un plan A, A', B et B' sont nécessaires. Au moins.


Boquete

Petit bled en altitude, la fraicheur relative est tellement agréable ! J'y suis allée pendant la période dite "la folle course au gaz" à Bocas. C'est parti.

La route entre Bocas et Boquete se fait en bus, et est très jolie. Bordée au début de murs de végétation entre lesquels se déversent des cascades rouges de boue (il a un peu plus les jours avant qu'on y aille, et la terre est rouge.), qui transforment par moment la route en petits lacs. Route par ailleurs toute relative : c'est parfois plus un peu de béton entre les nids de poule qu'autre chose. Les panaméens conduisent de manière très zen, et là où ils peuvent. Si tu dois rouler à gauche parce que la route est ce qu'elle est, pas de soucis, on roule à gauche, les autres automobilistes ne vont rien dire, si ce n'est un joyeux petit coup de klaxon qui sert plus à dire bonjour qu'à agresser comme en France.
Sur le bord de la route, des enfants en uniformes qui reviennent de l'école. Et des gamins de 5 ans, machette à la main, qui coupent l'herbe. Eeeeuh. Ok.
La végétation luxuriante se transforme en herbe un peu sèche quand on prend de l'altitude, l'évolution est impressionnante...

Boquete, donc, où je m'arrête dans une auberge de jeunesse, Mamallena, très sympa, assez grande, qui propose au matin des PANCAKES DE LA MORT en libre service dans la cuisine. Il faut un peu se battre pour avoir une poêle, mais ils en valent tellement la peine... Je fais une balade avec un guide et deux australiens pour observer les oiseaux, foultitude de couleurs au milieu d'arbres impressionnants, on voit aussi un paresseux et même le fameux Quetzal, cet oiseau vert et rouge grand inspirateur de Quetzacoalt, le Serpent à Plumes, un des dieux principaux des civilisations pré-colombiennes. Oui, je rencontre les messagers des dieux, oui, excusez moi, pardon, voilà... Et je vis mon premier tremblement de terre, apparemment assez courant lors du passage de la saison sèche à la saison humide. Ok, pas de soucis.

Dans le coin, il y a aussi pas mal de plantations de café (et même pour moi qui n'aime pas le café, il est BON.) et un endroit qui s'appelle "Mi jardin es su jardin", et qui est un mec qui ouvre son jardin, juste, comme ça, parce qu'il aime bien les fleurs et qu'il partage. C'est superbe. Il y a des hortensias et des agapanthes (mais... Pourquoi???) mais aussi plein de bougainvilliers extraordinaires et des fleurs d'hibiscus comme des assiettes. Avec des petits colibris dans les coins. C'est beau, quoi...


Navigation

Ensuite, trajet de Bocas, Panama, à San Andres, Colombie, petite île au large du Nicaragua. 200 miles nautiques, 48h de navigation. Dans un sens où on aura forcément le vent et la mer dans la gueule, puisqu'on va vers le nord, ce qui veut dire navigation au près, ce qui est la pire allure qui soit, la moins confortable. On attend donc la fenêtre avec le moins de vent et de mer possible, et on décolle. Le temps de détacher la patte d'oie (le bout qui aide la chaîne de l'ancre) et de lever l'ancre, 10 minutes, j'attrape le coup de soleil de ma vie dans le dos. Aujourd'hui encore, quasiment deux semaines plus tard, j'ai presque fini de peler tout ce que j'avais à peler, mais j'ai une espèce de réaction cheloue. On ne le dira jamais assez, protégez vous du soleil, les enfants... Les premières heures se passent bien. Je reste à l'ombre à l'arrière, y a un peu d'air, c'est très agréable. On a la mer dans la figure, on voit arriver les vagues de 2m50 en plein dans nos mouilles, mais ça va. On prend le coup. Les oiseaux changent à mesure qu'on prend le large, on voit passer des bancs de poissons volants d'un bleu irisé. C'est pas mal...

Et puis je vais faire pipi. Grossière erreur. On ne va pas à l'intérieur sur un bateau qui navigue, surtout quand le capitaine fume comme un pompier toutes fenêtres fermées. (d'habitude tout est ouvert, mais là ça aurait été un coup à se prendre une vague à l'intérieur, et là on aurait pas rigolé...) En ressortant je suis toute nauséeuse, du coup je m'allonge à l'arrière, un peu dans le vent, et ça va. Je suis pas en grande forme, mais allongée ça va. Le bruit des vagues qui s'écrasent contre la coque, le vent dans les voiles, la baume qui couine comme une mouette, les écoutes qui grincent, le moteur qui ronronne... La nuit tombe, il commence à pleuvoir. Il faut donc rentrer. Enfer. Quand je vois dans quel état m'a mise le simple fait d'aller aux toilettes, je suis pas DU TOUT motivée. Mais je vais pas rester sous la pluie... Du coup je rentre m'allonger dans ma cabine.

Et là, le vacarme est assourdissant. Parce que les moteurs sont juste derrière les cabines, d'abord, et que du coup on les a directement dans les oreilles. Ensuite parce que les vagues cognent contre la coque. Tellement fort que j'ai cru au début qu'on avait heurté un obstacle, puis qu'un animal attaquait le bateau. Quand je dis « cogne », ça a l'air mignon, genre « oula, comme c'est exotique, c'est foufoufou ! ». En vrai, c'est comme des gigantesques coups de masse, qui font vibrer toute la cabine, craquer les murs, trembler le lit, et qui résonnent jusque dans votre squelette, font vibrer vos os. On est plus dans un endroit un peu bruyant, la mer nous cogne directement, on encaisse le bruit, on se prend des coups de masse dans la gueule. J'arrive à dormir par intermittence, je pense, parce que cette nuit passe relativement vite. Ce moment où tu fais l'étoile de mer dans ton lit pour pas rouler tellement ça tangue.

Le lendemain, j'ai la tête comme une pastèque, mais ça va un peu mieux. Je me rallonge dehors. Pas longtemps. Je retourne vite m'allonger dans ma cabine, et là, ça devient long. J'ai l'impression d'être bourrée, mais en pire, tout tangue, tout le temps, y a aucune position où je suis mieux. Sur le dos, j'ai tous les muscles contractés, comme une gigantesque crampe. Sur le côté, envie de vomir. J'ose même pas tester le ventre. J'ai des fourmis dans tous les membres, et l'estomac dans la gorge. Le mal de crâne augmente. Chaque vague est un coup de matraque. J'attends la nuit, parce que ça voudra dire que j'aurai plus qu'à attendre le jour pour qu'on soit presque arrivé.

Le jour se lève enfin. Je ressors respirer un peu dehors. Allongée, ça va. J'attends l'annonce de la terre avec tellement d'impatience. Et puis soudain, des dauphins. Genre. Plein. Je m'avance tant bien que mal vers la proue du bateau (Non. Plus mal que bien. Je tiens à peine sur mes jambes, et je m'agrippe à tout ce que je peux parce que ça tangue encore sacrément, d'avant en arrière) et je m'assoie sur la coque tribord. Et y a une vingtaines de dauphins noirs qui jouent avec les coques, qui sautent autour, qui font des bonds dans l'écume. Nous, on pique toujours du nez de manière impressionnante, avant de nous re soulevez et de nous ré-écraser. Je me prends des vagues énormes qui auraient pu m'emporter si je m'étais pas tenue. A défaut, je suis trempée. Et complètement euphorique. Ils restent une vingtaine de minutes, après quoi je retourne agoniser tranquillement...

Et enfin, la terre ! On ancre, on mange. J'ai rien mangé ni bu depuis 48h, je suis complètement HS. Et vais dormir. Au calme. (calme relatif, un bateau n'est pas silencieux et immobile par définition, mais après ce qu'on vient d'être secoués, franchement...)


San Andres


La Colombie, donc. Du monde, partout. L'île est très très très vivante. Il y a très peu de voitures, mais énormément de scooters, sur lesquels ils sont entre un et cinq, tout âges confondus. Sérieusement, des familles entières sur un seul scoot, nourrissons compris, c'est assez bizarre... L'île se décompose grosso modo en deux parties : le nord et la côte, qui sont assez touristiques et très très beau, et l'intérieur, qui est moins touristique et où un gars nous déconseille d'aller parce qu'un peu dangereux : dans l'aprem, un mec s'est fait butter pour ses lunettes. Ah oui bon d'accord ahah on va faire demi tour...

L'air est enfin sec, il y a 20 nœuds de vent (environ 36km/h) et du soleil. La couleur de la mer est tout simplement hallucinante : la délimitation entre les différentes couleurs, allant du bleu outremer au turquoise, est incroyablement nette. Tous les matins, en sortant, c'est "WOH PUTAIN ah oui c'est vrai c'est beau..." Cette différence tranchée est en fait due à une différence de nature de fond, entre le sable, les coraux et les algues, ou à un brusque changement de profondeur, comme là où on a été nager avec les raies. Oui parce que pardon. Il y a au large une petite île où il y a entre 1m et 30m d'eau et où il y a des raies assez grandes qui sont curieuses et très amicales. Et la blinde de courant. C'est extraordinaire de nager au milieu d'elles, et en même temps exténuant.

Tout le tour de l'île est magnifique, chaque vague est d'une teinte différente, cette image qu'on a de la carte postale des Caraïbes où on se dit qu'ils sont obligés d'avoir trafiqué les couleurs, boosté les saturations, enfin fait quelque chose, quoi ! Et bah non. Même pas. C'est tout simplement dingue. L'eau est transparente, on voit le fond à 20 m de profondeur. Certaines plages sont un peu sur-peuplées, mais ça reste viable et très agréable de regarder passer les mecs en maillot les orteils dans le sable et à l'ombre des cocotiers...


Retour


Je vous dirais bien « j'ai pris l'avion et je suis rentrée », mais ce serait trop simple. Ahahah. Le trajet sera donc San Andres-Cali (en Colombie continentale), Cali-Panama, puis Panama-Paris. Go.
Donc, aéroport de San Andres, pas de soucis. La nana me dit que j'ai une taxe de sortie à payer, okay, joie et bonne humeur, mais soit. Je vais donc voir le gars pour faire ça. Il me demande des trucs, je réponds oui oui (mon espagnol a repris des couleurs mais ça reste pas dingue...), avant de comprendre que je viens de dire que j'étais mineure, donc que je n'avais pas à payer la taxe. Oups... Mais bon, il a le nez sur mon passeport ! Et ça passe. Parfait. Puis la première nana me rattrape, en me disant qu'elle s'est plantée et que la taxe était déjà comprise dans le prix de mon billet, donc me file un papier pour que je me la fasse rembourser. Celle que je viens de pas payer parce que je suis crédible en mineure. Euh... Soit ? Je monte dans l'avion, le décors vu du haut est encore une fois scandaleux, c'est beau, y a rien d'autre à dire.

Arrivée en Colombie, on commence à rigoler. J'ai 1h45 de changement. Ca va le faire. Sauf que. Quand je tends mon passeport pour avoir le visa de sortie, il est refusé. Le mec appelle un collègue et me fait signe de m'asseoir sur une chaise. Et j'attends. Je les vois qui discutent, appellent des gens, regardent des trucs. J'ai aucune idée de ce qu'il se passe, puisque mon espagnol est relatif, que eux ne parlent pas un pet d'anglais et qu'ils n'ont visiblement aucune envie d'essayer de m'expliquer. J'attends. J'essaie de me calmer. 1H45, c'est large... J'ai pas l'heure sur moi. Quelle heure il est, quand est mon vol, j'en sais rien. Finalement, au bout de ce qui semble être une éternité mais en fait 1/2h, sorti de nulle part, soudain mon passeport passe, j'ai mon coup de tampon, je cherche pas à comprendre pourquoi, je paaaaaasse !!! Jusqu'au contrôle de douane.

Nouveau poème. Mon sac passe, je passe à travers les portiques, personne ne bipe, allégresse. Sauf que. Pour une raison qui m'échappe totalement (et qui m'échappe encore...), si à San Andres j'ai une tête de mineure, ici je dois avoir une gueule à dealer des trucs. Du coup un policier me fait signe d'attendre. Je suis debout au milieu d'une dizaine de flics et d'agents de la douane, qui ont tous l'air d'avoir autre chose à faire que de s'occuper de moi ou juste de m'expliquer ce qu'il se passe. Donc j'attends. Y a d'autres gens qui passent, sans soucis. Et moi j'attends. Et j'attends. Et j'attends. Le premier flic me demande quand est mon vol, je lui explique qu'après j'ai un changement pour Paris, il a l'air un peu embêté et me dit qu'il va appeler ses collègues. Oui, s'il te plait. Ou pas. Je sais pas. Je m'imagine déjà, dans le meilleur des cas, essayer de contacter mon assurance pour savoir si je dois re claquer des milles et des cents pour rentrer. Tous les scénarios possibles me passent par la tête. Les douanes colombiennes, c'est hyper fiable, ou pas trop ? Je risque d'avoir une fouille corporelle intégrale, intérieur compris ? Je vais me faire violer ? Enlever ? Découper en petits bouts ? Est-ce que je vais avoir mon putain d'avion ?

Finalement deux autres policiers arrivent, et me font signe de passer. Une flic qui était là depuis le début me palpe vite fait (en même temps, short débardeur, où est-ce que tu voulais que je plante la came ???), puis un des nouveaux arrivants me fait signe de passer dans un petite salle à côté. Genre. Une petite salle. Avec juste une porte et pas de fenêtre. Retour du trouillomètre. Trois flics me suivent. Okaaaaay... L'un d'eux me fait signe de poser mes affaires sur la table. Ok. Puis me montre un tapis roulant entre deux panneaux. Je monte dessus. Il me fait tourner pour que je sois face aux panneaux, et pas de profil. Bien. Le tapis se met en marche. Je passe entre. C'est fini. Je mets trois minutes avant de réaliser. C'est bon, c'est vrai ? C'est tout ? Je peux recommencer à respirer ? Enfin à galoper parce que mon avion est dans 15 minutes ? Oui ? Adieu, donc ! Je pars sans demander mon reste, ni merci ni merde.

Le vol Panama-Paris se passe très vite, je sympathise un peu avec mon voisin, un italien qui parle français avec un accent délicieux et sur qui je m'endors un peu, et Paris, enfin. Les pesos colombiens de ma taxe remboursés ne sont pas échangeables en France, je m'assois donc sur une trentaine d'euros. Avis à celles qui partent bientôt !!!:cretin :


Ma vie mon œuvre.

Dans les épisodes suivants, des photos, et ptete même des petits dessins !!! :free:
 
Dernière édition :
1 Avril 2013
501
891
4 804
Je trouve ton récit très très intéressant. J'adore ce genre d'article. Pour une fille seule, tu vas loin et dans des contrées lointaines et sauvages ! Chapeau!!
J'aurais voulu savoir qui pilotait le catamaran, qui t'accompagnait et avec quel(le) association, organisme, agence de voyage tu es partie mais surtout le choix de ta destination?
En tout cas, ça me bleuffe que tu puisse partir comme ça. Je suis très admirative. Encore bravo!
 

Esmé.

Old buccaneer of masala chai
24 Septembre 2014
22 589
268 849
6 154
@ben quoi ? Oula, dis comme ça ça fait très aventurière de l’extrême, en effet !
Mais en vrai j'étais avec ma tante et mon oncle, qui ont traversé l'Atlantique il y a quelques années et qui vivent leur retraite dans la joie et le soleil, donc moins périlleux que ça ne le parait ! :cretin:

Par contre je sais qu'ils ont des amis qui font ce qui s'appelle du charter, c'est à dire qu'ils gèrent le bateau pour emmener des gens où ils veulent. En général, sans "grosse navigation" comme j'ai fait, parce que ça met quand même KO 24h après l'arrivée... Si ça te motive, je peux leur demander s'ils ont les contacts ! :cretin:
 
1 Avril 2013
501
891
4 804
@ben quoi ? Oula, dis comme ça ça fait très aventurière de l’extrême, en effet !
Mais en vrai j'étais avec ma tante et mon oncle, qui ont traversé l'Atlantique il y a quelques années et qui vivent leur retraite dans la joie et le soleil, donc moins périlleux que ça ne le parait ! :cretin:

Par contre je sais qu'ils ont des amis qui font ce qui s'appelle du charter, c'est à dire qu'ils gèrent le bateau pour emmener des gens où ils veulent. En général, sans "grosse navigation" comme j'ai fait, parce que ça met quand même KO 24h après l'arrivée... Si ça te motive, je peux leur demander s'ils ont les contacts ! :cretin:


Merci tout plein pour ta proposition mais je suis quelqu'un qui ne peut plus physiquement parcourir le monde. C'est donc pour cela que je trouve merveilleux que tu puisse me faire profiter de ton voyage !
 

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