Tout le monde dans mon entourage est dans le médical, j'ai l’entièreté de la profession sous la main : infimière, pharmacien, médecin, spécialistes... et même véto ! Et des anecdotes comme ça j'en entends tout les jours...
Un jour y'a ce mec qui vient parce que ça lui gratte la gorge et qui fait un choc allergique grave en plein dans son bureau qu'il faut sortir par la fenêtre avec les pompiers, une fois un infractus, une fois un dépressif grave qui lui explique qu'il a été victime d'abus sexuel incestueux dans sa jeunesse,...
Et puis y'a ce dont cette vidéo parle pas aussi : le rapport à la mort. Alors t'es formé pour, ça fait partie de ton quotidien, mais ma mère infirmière libérale et mon père médecin ont tout les deux, régulièrement, des patients qu'ils aimaient bien et qui décèdent, et dans une journée ça te prend plus de 5 minutes pour amortir, j'imagine, le choc.
Ma mère se lève à 5h du mat' tout les jours depuis plus de 30 ans je crois, elle rentre à 20h quand elle a finit sa tournée et qu'elle a finit les piqures et les toilettes de tout ce dont la société ne veut pas s'occuper : les vieux qui ne se lavent plus, des drogués dangereux, dans des endroits où on lui crève les pneus de sa voiture entre deux patients, des personnes perdues dans leur vie dont l'appart héberge plus de cafard et de rat qu'on peut en imaginer, des acâriatres qui se défoulent sur la seule personne qu'ils verront de la journée...
Mon père c'est pareil, levé 6h, rentré 20h, à midi c'est sandwich dans le bureau. Une partie du temps, il fait pas payer, ou se fait payer 23 euros la consult' pour une famille venu consulter à 7, alors ça prend du temps, ou ne se fera jamais remboursé parce que la CMU du patient a pas été mise à jour. Il bosse aussi dans une association pour prendre en charge les héroinomanes, c'est pas joli, c'est même potentiellement dangereux d'être médecin et de pouvoir prescrire de la métadone. Y'a des cabinets qui se font braquer, et le sien est très sécurisé d'ailleurs.
Ils auront pas de retraite, ou alors celle de l'assurance privée, et surtout en cas de maladie (ironie du sort), pas de chomage. Ma mère s'est cassée la jambe bah c'était plusieurs mois sans travail, point. Et là elle a du partir à la retraite plus tôt, je rentrerais pas dans les détails du pourquoi, mais pendant 3 ans elle aura pas de retraite non plus jusqu'à ce que son organisme privé prenne le relai.
10 ans de médecine, t'es payé 4000/5000 balles par mois, ok, mais tu paies aussi le loyer de ton cabinet, et surtout l'assurance juridique qui te couvre en cas de pépin. Voir ta secrétaire médicale.
Allez, on va virer 1500 pour le total, ça fait du 3000/4000 dans ta poche balles par mois (faut virer les impôts et ton propre train de vie mais ça c'est pareil pour tout le monde) ça fait déjà un salaire que n'importe quel manager parisien d'école de commerce peut espérer égaler en 5 ans d'ancienneté dans sa boite pour faire des powerpoint. Manager qui sera couvert en cas de maladie ou de chomage et dont la cotisation retraite est déjà comprise dans le salaire.
Plus appétissant peut être ? Un chirurgien gagne 10 000 euros par mois en moyenne, mais le tiers de son salaire annuel par en assurance juridique.
Il s'agit d'estimation, les médecins qui pratiquent notamment le dépassement d'honoraire gagnent bien sûr d'avantage leur vie, j'y reviendrais.
De façon générale, je trouve la société française d'une cruauté envers les médecins, qui pour 23 euros la consult', soit moins qu'un coiffeur "low cost" produisent néanmoins d'excellent service.
Ce qui, bien sûr, n'excuse pas les "demi dieu en blouse blanche", méprisant, maltraitant, malhonnête, qui prennent les patients pour du bétail. Ou les aides-soignant maltraitant les personnes âgées, à grand coup de toilette aux gestes violents. Ou les gynécos pervers. Toute cette réalité là je ne la nie pas une seule seconde.
Je pense juste que pour un gynéco aux gestes durs, une infirmière méprisante, un médecin irrespectueux, t'as 10 fois plus de médecin en banlieue qui galèrent et doivent mettre leurs médicaments dans des coffres (spas une blague hein, mon père le fait), de médecin de campagne qui font 40 min en voiture pour une seule consult' à 23 euros, d'infirmière libérales qui nettoient l'urine et la merde, jour après jour, de personnes sans respect pour elles et leur travail alors que c'est même pas leur travail à la base, d'aide soignante qui écoutent les famille et parfois remplacent les familles absentes au chevet des patients, de chirurgien forcé de faire 3 opérations dans la journée, prenant des risques pour les patients mais aussi pour eux et leur carrière, parce que y'a pas le choix...
Actuellement on manque de médecin, d'infirmière, d'aide soignant, et tout particulièrement dans le service public. Je reviens à mon histoire de dépassement d'honoraire : les personnels médicaux sont majoritairement mal payé, peu respecté (les infirmière, les sages femmes, ne batent aussi pour ça), et mal considéré. Si l'image de la blouse blanche suscite encore un certains respect dans l'imaginaire collectif, dans les faits les Urgences sont remplies de personnel médicaux agressés, qui se font cracher dessus ou même poignarder. A terme c'est le service public, le secteur 2 (sans dépassement d'honoraire) qui sont directement menacé par cet état de fait.
Les personnels médicaux suscite mon admiration non pas en raison d'études plus ou moins prestigieuse, et d'ailleurs les cycles des aides soignantes ou des infirmières sont courts, mais en raison de ce qu'ils font au quotidien : aider, soigner et accompagner les plus vulnérables, les plus vieux, les plus paumés, les plus drogués, les plus sales, les plus malades, les plus chiants, les plus apeurés, de notre société. Suffit de passer 5 heures dans une salle d'attente aux urgences pour comprendre que leur taff est pas facile.
Alors on pourra encore me dire que "j'ai pas que ça à faire de plaindre des médecins qui gagnent plus que moi ", et jle comprends. Le truc c'est qu'actuellement on a de moins en moins de médecin etc... justement à cause du fait qu'on prend leur professionnalisme pour acquis. Aujourd'hui dans les campagnes, demain dans le secteur 2, après demain dans les hôpitaux publics, on sera dans la merde pour trouver des gens encore prêt à faire le "sale travail".