C'est intéressant, je trouve, ce débat. J'ai le plus grand respect pour ceux qui osent se lancer dans une carrière artistique, mais je comprends un peu l'esprit "plan B" pour une raison particulière : j'ai toujours voulu être écrivain, mais je suis ce genre de personne qui a peur pour son avenir. Ma famille est comme ça, mon éducation est comme ça, mes parents n'ont jamais manifesté le moindre enthousiasme à me voir sortir du rang et je n'avais pas le cran d'aller à l'encontre de leur volonté. Je suis, du coup, devenue ingénieure.
Mon premier poste m'a beaucoup plu, j'avais des responsabilités, je faisais assez de technique pour me sentir utile et suffisamment peu pour pas me sentir enfermée, j'aimais bien aller au travail le matin. J'ai muté pour rejoindre mon amoureux et j'ai pas vraiment choisi ma mutation. Depuis, mes journées de boulot sont au mieux neutres et au pire un peu pénibles.
Du coup, j'ai commencé à reconsidérer mon rêve comme une manière de m'en échapper (je n'arrive pas à changer de boulot, j'ai essayé avant et je n'ai pas réussi). J'ai trouvé l'énergie de m'y mettre un peu plus sérieusement (j'ai toujours écrit, mais le boulot de relecture, critique, peaufinage me casse les ovaires) parce que ça me permettait d'entretenir ce rêve qui devenait plus important dans mon équilibre mental depuis que je ne trouvais plus mon bonheur en entreprise. J'ai trouvé le petit supplément de courage pour envoyer un manuscrit à un éditeur et j'ai eu le bonheur d'avoir été lue (et oui, maintenant je suis un écrivain refusé, héhéhé), ce que je ne tenais pas pour acquis.
En remettant les choses dans l'ordre, je me rends compte que le métier d'écrivain est pour moi à la fois un plan A (en ce sens que c'est mon rêve depuis toujours) et un plan B (parce que si je ne m'imagine pas encore vivre de ma plume, je me dis que si je suis publiée, ça me donnera peut-être le cran de me mettre à mi-temps pour assumer d'écrire vraiment sérieusement). Disons que c'est le petit supplément de rêve qui me fait me dire, quand je me fais chier au boulot "ma vie ce n'est pas que ça".