J’avais lu il y a quelques années le livre
Sex Matters, How Male-centric medecine endangers women’s health and what we can do about it, du Dr. Alyson J. McGregor. Pour les mauvais(e)s en anglais, je suis nuuuuuulle en langue mais il reste quand meme très facile à lire, surtout avec une liseuse qui permet de traduire les quelques mots complexes. C’est un livre écrit par une médecin - urgentiste je crois - américaine, alors les chiffres donnés ne porte pas sur la France. Cela dit, le raisonnement de la médecine occidentale reste le même.
Elle expliquait notamment que les femmes étaient largement sous-représentées dans les essais cliniques parce que (notamment) historiquement, notre corps étant plus soumis aux variations hormonales que celui des hommes, il était plus difficile à étudier. Et comme notre médecine ne date pas du XXIème siècle, ils n’allaient pas se donner le mal de faire semblant de s’en préoccuper. Il y aussi le cas des femmes enceintes, ou plus simplement prendre le risque de tester un traitement sans connaître les effets sur la fertilité. Mais elle met également en avant que ces sujets peuvent être également pensés dans les essais si cela était une réelle préoccupation. D’ailleurs, contrairement au message de santé publique, elle recommande aux femmes ne pas prendre les génériques parce qu’ils ne seront presque jamais testés sur des femmes, la raison étant qu’en ne changeant que les excipients, les tests n’ont pas à être aussi rigoureux. Or, les excipients jouent un rôle (sur l’assimilation par exemple). Et elle donne des exemples concrets de médicaments (notamment de leurs effets sur l’intervalle QT, truc cardiaque hyper important
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).
Elle aborde vraiment la médecine globalement, des essais thérapeutiques aux examens cliniques crées pour et par les hommes, des tableaux cliniques qui sont en réalité construits d’après les symptômes des hommes (tout le monde ou presque maintenant sait qu’une femme faisant une crise cardiaque aura plus de risque d’avoir des brûlures d’estomac qu’une douleur au bras gauche, mais ce n’est malheureusement qu’un seul exemple). Elle montre aussi combien (tout cela chiffré) les médecins sont davantage enclins à attribuer la déclaration d’un symptôme à un trouble psy à une femme (de la simple somatisation à la véritable psychose), les laissant ainsi mourir de maladies pouvant être diagnostiquées rapidement si on nous écoutait. Qui sait que l’un des symptômes de l’infarctus chez la femme est le
sentiment que quelque chose ne va pas ? Les personnels soignants éduqués sur la question, donc très très peu, le savent. Vous vous voyez, vous, aller chez votre généraliste en disant « hum, je crois que je fais une crise cardiaque » sans avoir peur d’être prise pour une folle et perdre toute crédibilité à jamais ?
Le livre aborde d’autre sujet et à la fin de chaque chapitre, elle donne des conseils sur comment nous, nous pouvons nous comporter pour avoir les examens médicaux et les traitements adéquats. Et ça flingue le moral parce que, quand même, la plupart du temps il s’agit de prendre sur nous, de mettre en avant le fait que nous sommes aussi des êtres raisonnés et non des boules émotionnelles à infantiliser, etc.
Elle aborde aussi très en surface, n’étant pas le sujet du livre, combien il est difficile d’être une personne non-blanches dans le système médical. Saviez-vous que les normes de tension sont celles des ethnies caucasiennes, et que chez d’autres, ils peuvent présenter une tension physiologique de 16/12 et être en parfaite santé ? Eh bien, ils seront d’office mis sous hypotenseurs. Allez, hop ! Et quand on est une femme noire par exemple, il ne faut surtout, surtout, pas crier après avoir attendu 23h en salle d’attente des urgences parce que c’est bien connu, les noirs ne sont pas civilisés, et les femmes noires s’emportent pour rien, et exagèrent toujours tout. Et aussi, elles sont hypersexualisées, et très à risque à cause de ça vis-à-vis des IST. Ca me vrille la tête.
Bref, il s’agit d’un bon livre quand on veut commencer à se pencher sur la question (bien que quelques points m’avaient fait tilter et que l’autrice ne m’a pas parue très sympathique).
Édit : j’ai tellement d’autres choses à ajouter. Mais une seule remarque : est-ce qu’une seule fois, UNE SEULE FOIS, un personnel médical vous à demandé où vous en étiez dans votre cycle quand la consultation n’était pas gynécologique ? Alors que les variations des hormones sexuelles ont un impact sur l’ensemble du corps. Qu’il a été montré que des médicaments n’avaient pas le même effet ou la même puissance selon notre période. Que nos douleurs étaient plus vives quand nous avions nos règles. Celles qui ont des douleurs chroniques le savent bien. Et pourtant, jamais la dose d’un antidouleur pour autre chose ne sera ajustée en tenant compte de ce facteur.