junebouvier;4750582 a dit :
Puis le coté « faut se défendre », c’est culpabiliser les filles, comme moi, qui n’ont pas les moyens de le faire. C’est dire que si elles en étaient capables, cela ne leur tomberait pas dessus. On m’a déjà menacée avec une arme parce que j’ai répondu à un connard. Difficile quand son propre corps ne veut plus bouger à cause de la peur, de riposter. Difficile aussi quand ils sont en groupe.
Bon. Visiblement dans la vie je fais aussi partie de ces gens qui culpabilisent les autres en disant "ne te laisse pas faire, défend toi". Par contre à aucun moment je suggère que les agressions physiques n'arrivent qu'aux filles qui ne se défendent pas.
Je suis blindée en sports de combat et en baston, et pourtant je suis un aimant à emmerdes. J'attire les dragueurs pénibles et intrusifs, je prends des mains au cul, des réflexions dégradantes et insultantes. C'est pas parce que tu sais te défendre que c'est écrit sur ton front et donc qu'on va te foutre la paix.
Je conçois tout à fait qu'il soit difficile de se défendre, de répondre spontanément, de riposter. Le "fight back" n'est pas inné. Je connais bien plus de nanas qui ne se défendent pas que l'inverse. J'ai conscience de l'énergie que ça demande quand on a peur. On ne cherche à culpabiliser personne, on essaye d'encourager plutôt. On n'essaye pas de marquer un clivage, on essaye de s'entraider, d'avancer ensemble. Je ne suis pas plus courageuse qu'une autre ni meilleure parce que je me défends. J'ai d'autres réflexes, c'est tout. Et je comprends tout à fait qu'on n'ait pas toutes les mêmes.
Quand j'entends une copine me raconter une histoire de harcèlement, et qu'elle me dit qu'elle n'a rien su faire tant elle était désemparée, ça me met hors de moi. Pas parce qu'elle ne s'est pas défendue, mais parce que le harcèlement de rue, l'attitude de l'agresseur et la passivité des témoins me font sortir de mes gonds. Spontanément, je dis toujours "ne te laisse pas faire". Je suis en colère à cause de cette injustice, et je suis en colère contre mon impuissance.
Dans une société idéale ce sac n'aurait pas à être une arme parce que dans une société idéale y'aurait pas de harcèlement. On a reçu beaucoup de critiques du genre "porter ce sac c'est tendre le bâton pour se faire battre". Moi ça me fait un peu halluciner quand même. C'est encore un réflexe de culpabilisation de la victime. Elle portait une jupe trop courte, elle affichait un sac à message provoquant.
Dans l'équipe des 9 nanas, on ne vit pas toutes les féminisme de la même manière. On n'a pas subit les mêmes expériences de harcèlement, on ne se défend pas toutes de la même façon. On n'est pas une équipe de 9 guerrières hyper entraînées. On a conscience que ce slogan ne fait pas l'unanimité, c'est pour ça qu'on planche sur d'autres slogans, qui ne feront pas l'unanimité non plus je suppose.
Laura voulait exprimer un gros ras-le-bol, on avait besoin d'un slogan fort en premier lieu. Mais on bosse aussi sur des slogans moins violents et plus légers, promis.