Bonjour, je sous-marine le forum de temps en temps, mais votre discussion m’intéresse
je n’ai pas non plus des réponses 100% parfaites (et je ne suis ni sociologique ni biologiste) donc faut pas me prendre pour argent comptant.
Pour moi, ce qui me marque quand on parle de sexe biologique, c’est qu’à partir de données les gens ont tendance à se faire des modèles simples (voire simplistes, parfois) et à se dire que ce ne sont pas des modèles, mais des observations. Typiquement, ces modèles, ces images qu’on a de ce que c’est un sexe féminin et un sexe masculin, ce sont des modèles très clivés, qui créent une division entre les deux sexes et qui pensent qu’à priori ils sont distincts et ne se recoupent pas. Ces modèles ont tendance à mettre en valeur les éléments qui sont très distincts d’un sexe à l’autre (comme les organes génitaux) et ont un peu tendance à oublier les différences qui sont moins marquées (comme la taille, où on observe une différence entre les tailles moyennes des deux groupes, mais où c’est beaucoup moins distinct au niveau individuel - des femmes un peu grandes et des hommes un peu petits peuvent tout à fait avoir la même taille). Et sur certains éléments corporels, ces modèles les classent comme féminins ou masculins, alors qu’on les retrouve dans toute la population - par exemple, la tendance à considérer la testostérone comme l’hormone des hommes et de la masculinité, et à l’inverse l’oestrogène comme l’hormone des femmes et de la féminité. Et par extension on a tendance à penser certains effets de ces hormones, le développement des caractéristiques physiques, comme masculines ou féminines alors qu’on retrouve ces caractéristiques chez un peu tout le monde, plus ou moins prononcées (et en fait là je pense moins aux caractéristiques sexuelles très prononcées selon un sexe ou l’autre, comme les seins ou la barbe, mais à la myriade de petits trucs, l’arcade sourcilière, la grosseur des mains, l’écartement des épaules, la taille du bassin, la taille des pieds, la pilosité, etc etc, que vraiment les gens ont tendance à catégoriser comme étant des marques d’un sexe ou de l’autre - et c’est en travaillant leur apparence (épilation, choix de vêtements ou de cosmétiques qui accentuent certains éléments ou en cachent d’autres, etc) que vraiment je vais avoir un bon passing ou non).
Enfin bref, pour moi « le sexe biologique est une construction sociale » ça veut surtout dire qu’on a un modèle en tête de ce que c’est le corps d’un homme ou d’une femme, et que la réalité est moins absolue que ces modèles - et que de façon plus large la construction de ces modèles utilise des données biologiques mais n’est pas nécessairement une observation pure du biologique. Ca se voit beaucoup quand on parle de transité (parce que les corps des personnes trans rentrent rarement dans les normes) mais aussi (c’est moins le sujet de la discussion) dans la façon qu’a la société de masculiniser le corps des femmes noires et de féminiser celui des hommes asiatiques (j’ai hélàs pas de bonnes sources à donner sur le sujet, et c’est pas quelque chose que je maîtrise bien, mais pour ce que ça vaut j’ai
un article buzzfeed américain (en anglais) qui en parle un peu): il y a dans ces cas-là un décalage notable entre l’image qu’on a du sexe biologique, et de ce qu’il en est réellement.
(Aussi, ça m’embête toujours un peu (même si je comprends) qu’on dissocie fortement le corps et l’identité, comme si le rapport au corps et l’identité de genre étaient deux choses complètement indépendantes l’une de l’autre. Je crois que pour la majorité des gens, c’est pas vrai? Cela même si c’est intéressant de voir que ce sont deux choses distinctes, qui ne se recoupent pas forcément.)