Est-ce que maigrir, c'est trahir mes convictions et mon féminisme ?

[Bananou]

Merci @Clemence Bodoc Vraiment MERCI.
Tu as mis les mots justes sur ce que je ressens depuis plusieurs mois. Même si l'on est toutes d'accord pour dire qu'il n'y a aucun rapport avec nos convictions bah, j'me sentais franchement mal par moment, une sorte de dissonance cognitive version féminisme...
Cela fait plusieurs mois que je suis en pleine procédure pour une chirurgie bariatrique, dans un peu plus de deux mois je me fais opérer, et je m'en voulais un peu. Même si je le fais pour ma santé, ma qualité de vie et aussi pour me sentir mieux dans mon corps, bah j'avais quand même cette forme de culpabilité illogique.
Et te lire met vraiment des mots sur ce que j'ai pu ressentir jusqu'à maintenant, je ne culpabilise plus à l'idée de vouloir changer pour me sentir mieux dans ce corps qui me gêne franchement au quotidien.
Alors encore une fois, merci
Et je te trouve absolument magnifique sur ces photos

 

[Maud Kennedy]

Je ne comprends pas bien la question,je dois dire... Ca revient à dire qu'une personne assignée femme ne peut pas décider librement de devenir femme au foyer sans trahir ses convictions féministes...
Pour moi,le féminisme,c'est justement le fait de faire ce qu'on veut,sans se proéccuper du regard des autres,y compris ce qui est considéré comme relevant du rôle traditionnel de la femme dans la société patriarcale.

 

[Lunafey]

Bah c'est un peu plus que "faire ce qu'on veut". Faire ce qu'on veut, c'est le but final du féminisme, mais il se définit avant tout comme un mouvement politique et social (et donc pas par rapport à l'individu seul, la vision individuelle du féminisme c'est ce qu'on appelle le féminisme libéral, qui est une variante "grand public" -pour simplifier- très récente, mais ce n'est pas la forme de base du féminisme qui est un courant sociologique et politique et donc se préoccupe peu des choix individuels. Par exemple le féminisme libéral se préoccupe très peu des autres notions rattachées au féminisme qui entravent notre volonté seule comme par exemple les conditions horribles de travail des femmes qui produisent nos t-shirts avec marqué "féminisme" dessus ) qui a pour but l'abolition du patriarcat, l'oppression basée sur le sexe, le sexisme. Or, pour abolir le patriarcat, il faut oser critiquer nos propres choix et se rendre compte qu'aller dans son sens ne le met pas en danger.
Et c'est en ça que ce genre de questionnements est important, parce qu'il y a toujours la question "est-ce que ce que je fais est déterminé par la société ?" (oui, dans l'écrasante majorité des cas, cf les travaux de sciences sociales sur le sujet du conformisme et du déterminisme social) et sa variante "est-ce que je le fais pour moi ?" (non, c'est le principe de tout ce qui touche à l'apparence -> c'est les autres qui la voit, notre image de nous-même se créer à travers le regard de l'autre, cf idem et plus axé psychologie sociale).

Donc c'est un questionnement pertinant et complexe. Mais la solution c'est pas de se rendre malheureuse non plus ! Si on a envie de faire quelque chose qui va dans le sens de la pression sociale, le féminisme voudrait qu'on questionne cette volonté et qu'on essaie de voir si on peut pas faire sans, mais c'est un exercice intellectuel difficile. Par exemple, je fais certaines choses qui sont totalement conditionnées par ma société, j'en ai conscience (c'est pas inné de vouloir porter tel ou tel vêtement, c'est pas inné de vouloir cacher mes poils) mais je n'arrive pas à faire sans, alors je le fais quand même *tout en étant critique* et en admettant que ce que je fais est sûrement le résultat d'un conditionnement et qu'en ce sens, je nourris la pression sociale (parce qu'en y obéissant pas j'aurais pu donner l'exemple à d'autres personnes, et quand y obéissant je change rien).
Ça veut pas dire se flageller, mais juste être auto-critique. Tout comme une anti capitaliste peut acheter des trucs à H&M et être critique sur son incohérence, parce qu'entre l'idéologie et les conditions de la vie réelle, il y a un monde !

Enfin voilà, je comprends parfaitement le raisonnement qu'il y a derrière et c'est un questionnement très intéressant (et très discuté dans les milieux féministes universitaires, il y a plein de littérature sur le sujet si ça vous botte, y compris de façon plus accessible sur des sites de vulgarisation comme antisexisme), et c'est très complexe de jongler entre tout ça
Article très intéressant en tout cas

 

[sheepia]

Clémence tes photos m'ont fait, en quelques secondes, accepté mon corps. Tu es belle.

 

[Mainlinh]

En voyant le titre j'ai cru que c'étais un troll des petits mecs de vous-savez-ou.
Dans le genre "je m'épile totalement, est-ce contredire mon féminisme ?".

Du coup je comprend pas très bien en quoi prendre soins de soi et être en forme est un problème... le féminisme c'est pas l'idée qu'on fait bien ce qu'on veut de sa peau si ça nous fait plaisir ?
* coucou les filles du topic "objectif bonnasse" sur le running *

Après c'est quand même un super chouette témoignage. comme quoi on est jamais totalement à l'abris des inquiétudes et des complexes.

 

[Membre supprimé 226135]

Je n'ai pas pu lire tous les commentaires mais pour moi le lien entre la pensée de @Clemence Bodoc et le féminisme est clair. Peut-être parce que je l'ai souvent ressenti et que j'avais l'impression que ça rentrait en contradiction avec mes valeurs. Si on voulait une ressemblance, il y a un article je crois que le fait d'être femme au foyer et être féministe. On pourrait dire aussi "je m'épile, j'ai l'impression de trahir la liberté des femmes à être libre de leur corps, que je ne revendique pas cette idée et qu'au contraire j'ai l'air d'avoir honte de mes poils alors que c'est pas ça, j'aime juste avoir les jambes douces (par exemple)".

Ben là c'est la même chose. D'un côte pour les femmes au foyer y a eu tellement de revendication pour que les femmes puissent travailler, tellement d'avancées sur l'autonomie des femmes, et de luttes actuelles pour être considérées en tant que travailleuse efficace (et pas que bonne à faire les cafés), que certaines ont l'impression de servir ou de renvoyer l'image d'une femme séduite par le patriarcat.

Et je me ressens bien dans cet article pour cette raison, la perte de poids, la minceur voire la maigreur à tout prix nous sont rabachees à longueur de journée avec des pubs weightmachin, avec des comme jaime, des anacaca3 qu'une fois que t'as perdu du poids ben t'as un peu l'impression de trahir ta parole, celle qui disait que tu avais le droit d'être celle que tu étais. Tu te sens moins légitime en fait.

Et le féminisme ça a beau être la promotion de la liberté, donc de faire ce qu'on veut et ce qu'on peut de nos vies et de nos corps, quand on correspond malgré nous dans nos envies, aux modèles promulgués par le patriarcat, ça nous fait douter de nous même, de nos motivations.

Bref, je le trouve logique cet article.

(et sinon ça me rappelle l'adolescence, quand tu es sois soumis à une autorité, soit en rébellion. Dans tous les cas, tu fais de cette autorité ton repère. Ce n'est qu'en devenant adulte et en assumant d'avoir des traits communs avec cette autorité, d'avoir des oppositions aussi, que tes envies propres peuvent émerger et trouver un compromis acceptable. Tu peux agir pour toi, et pas en "fonction de ce que l'autre a dit". )

 

[Maud Kennedy]

Bah c'est un peu plus que "faire ce qu'on veut". Faire ce qu'on veut, c'est le but final du féminisme, mais il se définit avant tout comme un mouvement politique et social (et donc pas par rapport à l'individu seul, la vision individuelle du féminisme c'est ce qu'on appelle le féminisme libéral, qui est une variante "grand public" -pour simplifier- très récente, mais ce n'est pas la forme de base du féminisme qui est un courant sociologique et politique et donc se préoccupe peu des choix individuels.

Non,ce n'est pas plus que "faire ce qu'on veut",surtout si on n'est pas engagé-e politiquement. J'avoue ne pas très bien comprendre ton post qui semble dire que si,en fait,d'une certaine manière,ça revient à trahir son féminisme et ses convictions.
Pour moi,ça nourrit l'auto culpabilisation.

 

[Skarov]

Je veux moi-même être professeur et vais passer le CAPES alors que mes études me permettent d'entrer en thèse scientifique. Mais la recherche n'est pas pour moi, je n'aime pas chercher des nouvelles solutions. Je n'aime pas les choix en général (d'où ma phobie du shopping, où je l'impression de toujours choisir le mauvais vêtements).

Et quand j'ai dis cela à une femme, elle m'a demandée si ce n'est pas parce qu'on avait tendance à museler les femmes, et que donc je ne me considérais comme non légitime à la prise de décision. Mais nan, enfin, j'ai tenté de devenir ingénieure, et j'ai rencontrée aucun ou très peu de sexisme dans mon école (je n'ai aucun n'exemple qui me reviennent d'ailleurs), au contraire, un prof bourru m'a proposé un sujet de thèse de lui-même car il estimait mes capacités et ma passion et pas mon sexe.

Nan, c'est parce que je veux avoir un programme qui m'est donné chaque année, car mon choix c'est cela.

 

[helvira]

"Maigrir à tout prix,
Devenir fin, élancé,
Rester dans les normes,
Eviter les débordements.
Comment devenir fin sans devenir fou ?"
Les hommes aussi veulent aimer leur reflet dans le miroir; mais je ne pense pas qu'ils se posent de question existentielles sur leurs véritables motivations...

 

[survivine]

Arrêtons donc de nous triturer le système neuronal et ressentons les choses tout simplement, sans complication.
C'est binaire :
- je m'aime, je l'apprécie mon corps, mes formes, mon visage, ma facon de bouger ou non d'ailleurs si pas adepte de sport.
- je m'aime pas, je veux changer, me retrouver, me trouver meme pour certaines, savoir qui je suis et chercher comment justement apaiser mon rapport esprit/corps.

Etre en phase avec son soi intérieur n'est pas de tout repos, que ce soit sur le plan du physique/complexes/formes ou plutot des convictions/idées/envies. Et si ce n'était qu'une question de ressenti et d'autorisation ? J'accepte mes kilos, tres bien alors je le vis bien. Je ne me les autorise pas ? Alors je fais en sorte de bouger le curseur et faire évoluer les choses pour etre sereine : perte de poids ou travail d'acceptation de son image. Et c'est tout aussi valable pour mes cils épilés, ma derniere combinaison moule fessiers, mon plan de carrière, le prochain partenaire genré ou non avec qui je partagerais une danse charnelle horizontale... je me l'autorise ou pas. Et je suis en phase avec le fait de me l'autoriser sinon c'est le merdier hein !!!

Exemple personnel : en admiration je suis et ai toujours été envers les personnes qui s'assument en surpoids. Rien n'y a fait, travail psy sur des années, culpabilité personnelle ou d'autrui, ces kilos étaient ma carapace. Je ne les acceptais pas. Quand j'ai compris qu'il me fallait bouger ma jauge dans le bon sens vers la sérénité, j'ai tranché et fais des choix de vie. Et même si aux yeux de certains c'était une facilté que la chirurgie, je suis plus forte désormais : je sais ce que j'ai fait, je sais le chemin que j'ai parcouru, je sais la force décuplée et surtout je sais et vis à mille lieues de ce que j'étais. Et s'aimer, ca n'a pas de prix, de convictions, c'est un ressenti de bienveillance envers soi-même. Car qui d'autre que soi est si important ? (et ca n'a aucune valeur d'égoïsme dans ce que je dis, pour aimer les autres, il faut s'aimer et s'animer.. la vérité de la palisse tout ca....)

 

[Princess Disease]

Je n'ai pas lu tous les coms mais pour ma petite contribution perso, il me semble que la seule chose à bannir impérativement, c'est "l'injonction de", fut-ce de maigrir, faire des moutards, que sais-je. Mais la notion d'obligation sociale me paraît être la seule chose fondamentalement toxique dont il faut se débarrasser en tant que femme qui fait encore ce qu'elle veut merci. Du même coup, si tu as envie de perdre quelques kilos, par exemple, & que tu ne le fais pas en réaction à une injonction sociale machiste de le faire, eh ben tu fais la même chose en négatif : tu t'imposes de faire un truc que tu n'as pas envie de faire !! Donc non, zguèg, pas de culpabilité : la seule chose qu'il faut garder dans le viseur à mon sens, c'est "de quoi ai-je envie, moi ??". En aucun cas des choses comme "qu'est-ce qui est attendu de moi (du fait de mon sexe & ma supposée place dans la société ok, mais aussi du fait de mes convictions/de mon discours etc., notamment de la part de personne qui souvent n'ont d'ailleurs ni le même sexe ni le même discours mais bref !)" : on s'en cogne la calebasse ce me semble. S'aimer c'est le plus important.

 

[olaflor]

Hmm je sais que pour beaucoup des qu'il s agit de perte de poids c est direct diktat de magazine etc je fais référence au sondage au relatif à une rubrique "sport" mais y a aucun mal à aimer son corps alors qu'on a perdu du poids même si c est pas volontaire. S aimer soi et son corps c est justement ca. Qu on pèse 15kg de plus ou de moins ça doit pas changer l image qu'on a déjà de soi. Ton corps a changé à cause de ton train de vie point barre. Tu trouves bien comme ça tant mieux, tu te trouvais bien avant aussi tant mieux
C'est un truc que j a compris avec le sport (notamment la muscu) vu que je suis en prise de masse tu peux être un chef d œuvre et en travaux en même temps. C est pas incompatible. Bien sûr que je veux modifier mon corps et améliorer certaines parties mais j ai aucun mal à me trouver à mon goût aujourd'hui avec ce que je vois dans Le miroir