L'article m'a paru très intéressant et m'a permis de me replonger avec plaisir dans l'univers d'Harry Potter même si je ne suis pas complètement d'accord ^^
Je n'avais jamais envisagé la rivalité des maisons d'un point de vue genré mais c'est grave intéressant comme perspective ! Mais du coup, comment prendre en compte le fait que les directeurs/trices de maison ne rentrent pas dans cette répartition (Serpentard/homme et Poufsouffle/femme MAIS Gryffondor/femme et Serdaigle/homme) ?
Je suis d'accord que la maternité est sur-valorisée et j'ai été grave énervée quand je me suis rendue compte dans l'épilogue (mais dans mon monde parfait, l'épilogue n'existe pas) que toutes les meufs avaient pondu, genre consécration ultime ! Autant, sur la représentation ethnique, c'est pas si mal dans les bouquins (l'histoire se passe quand même au Royaume-Uni donc c'est pas non plus une mixité absolue ...), autant la représentation familiale bof bof ... Même si, pour le coup, le fait qu'elles s'inquiètent, qu'elles défendent leur famille, etc., je trouve ça assez cool, en mode "je vais pas attendre que mon mari fasse tout le boulot, moi aussi je me bats pour mes enfants" (d'ailleurs, aucune mère ne reste en retrait pour protéger sa progéniture). J'ai toujours trouvé intéressant à cet égard qu'il y ait une forme de "renversement" sur la répartition intérieur/extérieur dans le couple entre Tonks et Lupin puisque ce dernier, en tant que loup-garou exclu de la société, doit rester caché, alors que Tonks continue à travailler et est présentée comme une meuf badass grave cool et grave précoce (une des plus jeunes Aurors si ma mémoire est bonne).
Et c'est vrai que cette injonction à trouver l'amour est assez déplaisante mais je la trouve très déplaisante pour tous les personnages : Harry se fait harceler par Ombrage et Voldy veut sa peau mais non, c'est le moment de vouloir rouler des grosses pelles à Cho ! Rogue est un gros connard avec ses élèves MAIS il est amoureux de Lily donc on ne peut pas lui en vouloir ! Hermione passe une année dans la bouillasse à supporter les deux débiles qui ne savent pas ce qu'ils veulent mais c'est le moment pour vouloir faire des galipettes avec Ron ! etc.
Pourtant, il existe aussi des femmes célibataires et qui semblent n'en avoir rien à faire d'être dans la séduction : du côté des profs (McGo encore, mais aussi Chourave, Pomfresh voire Trelawney) ou du côté des élèves (Hermione dans une grande partie des bouquins, Luna, ou des personnages plus secondaires dont on ne parle pas de leurs amours comme Susan Bones ou Hannah Abbot par exemple), voire des Mangemorts (Bellatrix ou Alecto Carrow notamment). Après, c'est peut-être parce que ces personnages ne sont pas forcément assez développées pour que l'on ait le droit de connaître leur vie amoureuse ... Et, quand dans le cinquième tome les jumeaux commencent à vouloir charrier leur soeur en faisant du slut-shaming (ouuuh, la vilaine fille qui enchaîne les hommes, la sale gourgandine), Ginny et Hermione les remettent à leur place bien sèchement
Le pouvoir n'est globalement une bonne chose pour aucun des personnages : entre Dumby qui tue à moitié sa soeur quand il fait des rêves de grandeur, Fudge qui devient cinglé et aveuglé par son pouvoir au bout d'un moment, Voldy qui cherche à compenser avec tous ces symboles de serpents partout ... Alors, oui, je suis d'accord, les femmes restent globalement au second plan du pouvoir (même si parfois elles gouvernent en sous-main : McGo, Molly Weasley, Hermione ...). Selon moi, Ombrage est encore plus détesté que Voldemort (félicitations à elle !) pour plusieurs raisons :
- elle fait ses saloperies au grand jour : alors que Voldy fait ça discrétos en se cachant, elle fait ses trucs de bâtard en mode rien-à-foutre de ce qu'on va en dire ...
- elle est une méchante directe : ça rejoint un peu le point précédent, la fiction est perçue par le point de vue d'Harry et Ombrage est l'opposition quotidienne de leur rébellion adolescente, ce n'est pas un méchant vague, c'est un méchant qu'ils croisent tous les jours, dont les décisions influent directement et visiblement leur vie, et qui, à leur échelle, est bien plus grave (souvenez-vous de ce prof principal que vous détestiez au collège ...)
- elle appartient au ministère : c'est un point qui est vraiment intéressant dans le cinquième tome et qui est en partie masqué par le point de vue d'Harry (ce teubé intergalactique), mais Ombrage permet de créer une opposition non seulement entre les gentils et les méchants, mais aussi entre le gouvernement (qui cherche à maintenir la stabilité) et l'Ordre du Phénix (qui veut préserver la paix et le bien)
- c'est le pendant de McGonagall : l'une des personnages les plus cools et badass de tout Harry Potter (et la femme de ma vie + Maggi Smith for ever
) face à Ombrage, elles semblent s'opposer sur tout (justice de McGo/injustice d'Ombrage, look sobre et austère de McGo/look à fanfreluches et rose d'Ombrage, attitude mature qui ne prend pas les élèves pour des jambons de McGo/attitude infantile de petite fille capricieuse et boudeuse d'Ombrage, et même fan de Dumbledore pour McGo/fan de Fudge pour Ombrage) --> oui, j'ai un crush immense pour McGonagall
- elle n'assume pas d'être une méchante : Voldy est un connard, il aime le noir, la nuit et les cimetières et son but est d'anéantir une partie de l'humanité pour le pouvoir, alors qu'Ombrage est plus ambiguë que cela, elle cherche à préserver à tout prix le monde de stabilité qu'elle a construit et veut conserver le pouvoir qu'elle a acquis (mais elle semble penser réellement qu'Harry ment au début donc bon ...)
- elle n'assume pas d'être une "femme mûre" : ce qui semble monstrueux à Harry et aux autres, ce n'est pas tant qu'elle aime le rose, les chats et les noeuds mais qu'elle se comporte comme une petite fille capricieuse (qu'elle n'est visiblement plus). Dans le tome 5, on a l'impression de voir une gamine odieuse de primaire dans le corps d'une femme mûre : elle est cruelle (se moquer d'Hagrid notamment), elle refuse qu'on lui dise non, elle boude (quand Rogue ou McGo la remettent à sa place pendant les inspections), elle fait un caprice quand la porte du bureau directorial refuse de s'ouvrir pour elle, elle est jalouse (elle craint même les élèves de la brigade inquisitoriale et ne veut pas qu'ils l'accompagnent voir "l'arme" à la fin du livre) ...
- c'est une putain de psychopathe ! Ok, Rogue n'est pas mal dans son genre non plus, mais c'est la team Bisournous à côté d'Ombrage qui mutile tranquillou ses élèves en mode "écris avec ton sang et ferme ta gueule", leur inflige des punitions plus longues que les interdictions de Rusard et ne supporte pas la moindre contradiction (légèrement monomaniaque sur les bords Dolores ...). Et ne parlons pas du moment où elle devient directrice et où elle autorise carrément Rusard à employer les châtiments corporels sur les élèves sans que personne ne lève le petit doigt ...
D'ailleurs, ce n'est pas le fait d'être une fifille qui la rend détestable puisque même les fifilles de l'extrême (les soeurs Patil, Lavande Brown la gourdasse et autres jeunes filles qui pouffent en groupe) la détestent dès le début ...
C'est la même chose pour les fifilles dans l'univers d'Harry Potter : comme tout est vu de son point de vue de "garçon", il a tendance à faire des généralisations débiles sur les filles qu'il ne comprend absolument pas (ce qui fait qu'Hermione passe quand même un sacré bout de temps à lui expliquer qu'une fille ce n'est pas qu'un truc à cheveux longs qui glousse et qui veut des bisous et du love). Du coup, elles sont décriées parce qu'il ne sait pas réagir avec elles (pour Rita, ses éloquentes réponses aux questions qu'elle pose par exemple, pour Cho quand elle se met à pleurer ...). Mais personnellement, je l'ai toujours interprété comme "je suis un garçon complètement idiot et je ne cherche pas à comprendre l'autre team dortoirs parce qu'elles peuvent avoir des codes différents des miens, sauf quand mes hormones commencent à me titiller la baguette", et il y avait suffisamment de personnages féminins qui n'étaient pas dans ce cliché sexiste pour que je ne m'y intéresse pas outre mesure
Et du coup, le rejet des larmes, j'y ai vu la gêne d'Harry qui ne sait pas quoi faire (c'est tout à fait sensible dans la scène du café de la St Valentin avec Cho : il ne comprend pourquoi d'un coup elle se met à pleurer, ni ce qu'il doit faire, ni comment ça a pu si mal tourner aussi vite). Si les personnages qui pleurent sont souvent ridicules, c'est aussi pour d'autres raisons (pour Pétunia, le contraste entre ses craintes pour son Dudlynouchet et la vraie vie du jeune homme en question, pour Mimi, le fait qu'elle soit inconsolable en permanence et qu'elle en rajoute des caisses). Harry développe une curiosité malsaine envers les larmes, il observe fasciné sans vraiment comprendre et il est assez avide d'en savoir plus (notamment à la fin du tome 6, quand Mimi lui apprend qu'un garçon est venu la voir pour pleurer et se confier ...). Et, pour le coup, quand Trelawney pleure dans le hall quand elle se fait virer, l'instant est pour moi magnifié par la mise en scène (cruauté d'Ombrage, école réunie, pleurs presque inhumains, compassion de McGo et de Flitwick, etc.), comme les pleurs de Rogue à la fin du 7. Mais ce ne sont pas forcément en tant que filles qu'elles sont dévalorisées je trouve ...
Rita Skeeter est pour moi le pendant de Gilderoy Lockhart : des personnages avides de reconnaissance, beaucoup trop apprêtées et qui pourrissent la vie d'Harry par leurs (in)compétences.
Par contre, je ne suis pas du tout d'accord pour Madame Maxime : au début, c'est certes un personnage un peu antipathique qui brise plus ou moins le coeur d'Hagrid, mais elle est vraiment réhabilitée, d'une part parce qu'on comprend qu'elle ment sur son poids pour se protéger des attaques "anti-géants" (qu'Hagrid subit suite aux révélations de Skeeter), d'autre part parce qu'on voit qu'elle a eu un vrai rôle entre le tome 4 et le 5 pour aller avec Hagrid convaincre les géants (celui-ci nous révèle d'ailleurs que, malgré ses apprêts de fifille, elle n'a pas peur de vivre à la dure et qu'elle a respecté son choix de ramener Graup). Je trouve que c'est au contraire un personnage très intéressant qui mériterait d'être plus développé (comment a-t-elle réussi à s'intégrer alors qu'elle est "différente" ? comment dirige-t-elle Beauxbâtons ? quelle relation entretient-elle exactement avec Hagrid ? etc.).
De même pour Fleur Delacour qui progresse un peu de la même façon que Ginny je trouve. Dans le 4, c'est la fille trop belle que tous les garçons désirent et que toutes les filles jalousent (cliché x 1000) et je suis d'accord qu'elle est insupportable dans les rares moments où on la voit. Mais c'est une sorcière talentueuse (on nous le rappelle à plusieurs reprises) et devient une vraie femme forte (sans perdre ses caractéristiques de fifille) quand Bill se fait refaire le portrait par Fenrir Greyback en s'opposant frontalement à Molly Weasley, ou même quand Harry débarque avec toute la troupe en s'enfuyant du manoir des Malefoy et qu'elle cherche à avoir des explications.
Hermione, et je suis d'accord avec l'article là-dessus, est la synthèse de toutes les injonctions contradictoires sexistes : sois belle mais pas trop, sois sensible mais pas trop, sois intelligente mais n'écrase pas les autres, sois dix fois plus forte que les hommes pour être légitime à ta place ... Comme Ginny, elle suit une évolution à laquelle on peut vite s'identifier (jeune fille intello et mal dans sa peau qui devient une femme forte et indépendante), du côté intellectuel de la chose quand Ginny est du côté physique de la chose (sportive et briseuse de coeurs).
Bref, personnellement, j'avais adoré les bouquins justement parce que j'ai toujours eu l'impression de ne pas être dévalorisée en tant que fille puisqu'il y avait plein de personnages féminins géniaux, aboutis, complexes et ambigus. Alors, certes, c'est possible de faire encore mieux mais je voulais aussi rendre hommage par ce gros pavé (désolée à ceux qui m'ont lu et bravo d'être arrivé-e-s jusqu'ici) à cette saga qui a accompagné mon enfance et mon adolescence, que je relis tous les étés avec assiduité et que j'aime d'amour