Facs bloquées et réforme universitaire, t'en penses quoi ? Parlons-en !

[LittleMyrtille]

Moi je suis vieille et ma vie étudiante est loin (au moins tout ça ) mais y'a un truc con qui m'interpelle donc je pose ma question bête ici : Pourquoi est ce que ce sont les étudiants qui se révoltent contre ce projet de sélection, alors qu'ils sont déja à la fac et que donc ils ne vont pas être concernés (enfin sauf si j'ai raté un truc ...)? ça me semblerait plus logique de voir des lycéens bloquer des lycées en fait

 

[Nedjma]

@LittleMyrtille déjà parce que tous les lycéens ne vont pas à la fac
Ensuite parce qu'en général c'est quand on est intégré quelque part que l'on se sent concerné par son présent, mais aussi par son avenir. Quelqu'un qui a commencé son cursus en L1 cette année risque fort de subir la réforme pendant ses années de master. Or, bien des métiers exigent des masters désormais. Donc si tu vas pas jusqu'au master parce que tu n'en as pas les moyens, ça crée déjà une ségrégation sociale.

 

[Rin`]

@LittleMyrtille
Et puis aussi, on peut avoir envie de lutter pour que les autres aient droit aux mêmes possibilités que soi

 

[Herenis]

@Rin` Totalement ! Je soutiens le blocus, parce que si la sélection avait été mise en place avant, je n'aurai pas pu faire les études que je fais aujourd'hui.

La sélection qu'ils veulent mettre en place à l'université va seulement favoriser les riches et les valides. Si lettre de motivation + CV il faut pour la fac, ce sont les jeunes issus de grands lycées parisiens privés qui seront sélectionnés prioritairement, car les enseignants-chercheurs n'auront de toute façon pas assez de temps à consacrer pour creuser plus loin que l'établissement d'origine pour chaque candidature. Des étudiants issus de lycées de ZEP en province, comme moi, pourront aller bien se faire voir.
En arrivant à la Sorbonne, j'ai pu constater que 80% environ des étudiants sont déjà des parisiens friqués, mais pas plus motivés que ça et pas plus doués que ça non plus, et totalement inconscients du privilège qu'ils ont de faire des études. Je ne sais pas si c'est le futur de l'éducation que vous voulez, mais moi pas. L'Université, c'est le seul moyen pour un prolo de s'élever un peu. La sélection, ça serait étendre la séparation qu'il y a déjà entre riches et pauvres dans les grandes écoles (ENS, écoles d'ingé ou écoles privées).

De plus, avec Parcoursup, les étudiants avec un handicap ne sont plus affectés prioritairement à un établissement supérieur possédant les aménagements nécessaires. Beaucoup seront donc obligés d'aller dans leur fac de secteur, qui n'est pas adaptée ... et ne pourront donc pas faire d'études supérieures. Et tout ça oklm.

 

[Rin`]

Et puis l'échec en L1, c'est quoi exactement ?

Oui, il y a des étudiant·e·s qui prennent la fac pour une année sabbatique (le cliché de l'étudiant·e en Histoire de l'Art j'imagine), et puis il y a celleux qui galèrent (santé physique, santé mentale, stress, charges supplémentaires), celleux qui bossent à côté pour payer leurs études/apparts, celleux qui savent pas trop où iels en sont, celleux qui se sont trompé·e·s d'orientation, celleux qui ont échoué tout simplement, etc.

Quant à l'orientation, je me marre. Les boulots, c'est un peu comme la biodiversité : il s'en créé tous les jours, il en meure tous les jours. Des métiers dans les nouvelles technologies, ça ne se prévoit pas nécessairement cinq ans avant. J'en vois passer, sur Twitter, des parcours chaotiques. Et en soi, en quoi est-ce grave de se tromper, de ne pas savoir ?
J'aimerais au contraire qu'on retire cette épée de Damoclès des épaules des jeunes, qu'on arrête de leur dire qu'il faut décider maintenant ce qu'ils feront jusqu'à leur mort car la réalité est toute autre.

En tous les cas, cette réforme c'est encore plus de privilèges pour les plus privilégiés, et plus d'obstacles pour les autres. Je ne me sens pas légitime à émettre un avis sur les blocages étant donné que j'ai quitté les bancs de la fac depuis 7 ans maintenant, mais je suis extrêmement fière de voir que ça bouge autant. Oui, il y aura toujours des petit·e·s con·ne·s pour foutre le bordel, on aura tou·te·s une histoire au sujet d'un mec ou d'une nana qui a fait les blocages pour ne pas aller en cours ou que sais-je. Ça n'empêche qu'iels sont nombreux·se·s aux AG, et le fait de voir autant de jeunes s'investir dans un discours politique (plus que moi à mon âge), ça me fait chaud au cœur.

 

[Chat-au-Chocolat]

Spoiler: Point de vue divergent, ne plaira pas à tout le monde :)

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[Rin`]

@Burial
J'avoue, l'adolescence pour moi, c'est loin, dans mes souvenirs, l'orientation, c'était un peu le grand flou imposé. Il fallait choisir, alors, heu, bah, faisons un choix par défaut (fort heureusement il m'a permis de trouver ce qui me plaît aujourd'hui, mais je n'en avais aucune idée à 16-18 ans )

Là où je te rejoins à 100%, c'est qu'effectivement, il faut arrêter de sacraliser le bac. Laissons les jeunes s'orienter vers des filières professionnalisantes, techniques, artistiques, littéraires si c'est ce qu'iels souhaitent. Ne les forçons pas dans des études qui ne leur conviennent pas, juste parce que plus tard, éventuellement, ça pourra les aider. Il sera toujours temps plus tard de raccrocher les wagons si nécessaires.
En somme, l'orientation c'est bien, et il faut donner des moteurs à ça, à tous les niveaux, mais je rebondis sur mon point ( boing), c'est qu'un choix fait à 16 ou 18 ans ne figent pas dans le marbre le reste de sa vie.

@Chat-au-Chocolat
Alors, oui, si quand j'étais à la fac il y avait eu autant de blocages, j'aurais sans doute pété un peu un câble. Tout en soutenant les bloqueurs. Tout comme aujourd'hui ça me fait chier que mon train soit annulé par la grève. Mais que je soutiens les grévistes.

Je ne vais pas rebondir entièrement sur ce que tu dis, car, soyons honnête, je vais m'énerver, être sarcastique, bref, ça ne fera pas avancer le débat d'un iota, donc let's agree to disagree.

Juste un point :
Le pseudo mythe du mec qui s'est inscrit à la fac juste pour obtenir des bourses, c'est le même que le mec qui touche toutes les allocs et bossent au black, ou que le gars qui se met en arrêt pour aller à la mer : oui il y en a, par contre s'en servir pour taper sur les autres, non. Ce genre de personne est une minorité, qui effectivement profite d'un système qui permet à tous de bénéficier de droits, de privilèges, etc.
Et pour avoir fréquenter des boursiers, clairement, la grande majorité des cas c'est : tu rates deux cours ? tu rembourses ton année.

Par contre, oui, je suis d'accord, il faut une réforme de l'enseignement supérieure. Mais une vraie réforme, un vrai truc qu'on a jamais fait. Donner plus de moyens aux universités, pour pouvoir remettre les locaux aux normes, accueillir les étudiant·e·s dans de meilleures conditions, avec un enseignement à jour, s'assurer que l'éducation avant l'enseignement supérieur soit de qualité, afin que tout le monde ait les « pré-requis » demandés aujourd'hui, rendre les universités plus accessibles, proposer un salaire étudiant afin que le taux d'échec, lié aussi au travail salarié des étudiant·e·s, diminuent, permettre de meilleures passerelles entre les filières, etc.

 

[Mélusine94]

@Chat-au-Chocolat

La bourse est contrôlée. Tu n'as le droit de t'absenter que 3 fois pour un TD sans justification médicale / autres. Si tu n'as pas ces justifications c'est simple tu doit rembourser le Crous.

J'ajouterais également que le problème à la fac ce n'est pas le nombre d'étudiant-e-s ce sont les moyens financiers. Le service se dégrade parce que les facs, quelques soient leur renommées n'ont plus d'argent. Alors les conditions d'apprentissage, les locaux etc tout se dégrade.
Les facs devraient de nouveau être un service public financé par l'Etat et comme tout nos services publics le financement devrait être à la hauteur de leur mission: santé, éducation, administration etc.
Le nombre d'étudiant-e-s est un faux problème.

 

[Hercynie]

Je suis pour la refonte de l'université et la mise en place d'une sélection à l'entrée si une aide à l'orientation est mise en place dès le collège.

De toute manière, la sélection à la fac se fait déjà par l'écrémage de première année. Beaucoup de gens choisissent la fac par dépit et surtout suite à une mauvaise orientation. Demander des pré-requis n'est pas une aberration, personne ne trouve ça choquant de demander un Bac. S pour faire médecine plutôt que L ou ES. Quand on est issu d'une famille où personne n'a fait d'études et donc personne ne peut vous guider, bah on a l'impression d'avoir pas vraiment d'autres alternatives.

Il faudrait donc un peu revaloriser et plébisciter les autres parcours tout au long de la scolarité. Il n'y a aucune honte à ne pas aller à la fac et bon nombre de chef.fes d'entreprises TPE / PME / artisans ont commencé avec un savoir-faire dans les mains. Ainsi, croire que l'université est l'unique ascenseur social est un peu naïf. Quand on évolue par la suite dans le monde pro. on se rend compte que trouver un emploi se fait plus via son carnet d'adresse que par son niveau de diplôme. Et bon nombre d'enfants de la classe moyenne se sont retrouvés en dépression chez leurs parents avec leur M2 en poche mais sans trouver de boulot car pas le bon réseau.

Par ailleurs, les inégalités existent à la fac. Un étudiant qui bosse et un étudiant dont les parents assurent tous les frais ne partent pas sur le même pied d'égalité. Et quand il est dit qu'augmenter les frais de scolarité limiterai l'accès à l'université aux plus aisés, je crois que les CSP+ sont plus intéressées à mettre leurs progénitures dans les grandes écoles de commerces qu'en fac de lettres...

L'université, c'est faire croire à la classe moyenne que ses enfants deviendront des bourgeois. Car même si l'on prend la filière Droit ou Médecine, Notaires, Huissiers etc... préfèrent transmettre leurs études à leurs enfants plutôt qu'au quidam qui vient d'une ZEP et qui s'est cassé en deux pour parvenir au même niveau de diplômes.

Et pour conclure, après être allée sur les bancs de la fac, je conseillerai aucun jeune de mon entourage d'y aller sauf s'il a un métier bien précis en tête qui le nécessite absolument. On n'y apprend pas un vrai métier. On en sort juste avec un papier qui atteste qu'on sait lire et écrire. Or, sur le marché de l'emploi on demande un savoir-faire précis, des techniques. Ainsi, un BTS, un IUT peuvent ouvrir autant de portes q'un M2 selon moi (n'hésitez pas à me le dire si vous n'êtes pas d'accord! )

 

[Herenis]

@Chat-au-Chocolat Je vais essayer de répondre au mieux à ton message : je pense que ce sont les étudiants et non les lycées qui se mobilisent d'abord pour une raison de logistique. La majorité des lycéens sont encore mineurs et habitent encore chez leurs parents. Vu les messages que font passer les médias de masse, qui ciblent davantage les 30 ans et + je dirai, donc tout pile l'âge des parents, à propos de cette réforme, les lycéens ne sont probablement pas autorisés à faire ce qu'ils ont envie. De plus, au lycée si je me souviens bien chaque absence devait être justifiée sous peine de sanction voire de renvoi, donc les actions y sont limitées, ce qui n'est pas le cas à la fac. Et pour la politique, bien sûr que les étudiants de droite ne vont pas faire blocus, car la sélection est profitable à leur classe sociale aisée. C'est tout benef' pour eux d'avoir une fac uniquement avec des gens qui leur ressemblent, avec moins de minorités (femmes, personnes racisées, LGTBI, avec des handicaps ...). Je me souviens de la colère des gens (de droite) de ma prépa lorsque j'avais de meilleurs résultats qu'eux et de grandes ambitions, alors que je dénote clairement dans leur rang.

Les partiels et les cours sont reportés, donc pas d'inquiétude pour cela. Si tout le monde est logé à la même enseigne, ça ne met aucun étudiant en danger pour son dossier. Et que la sélection existe déjà dans les filières cotées, c'est justement la raison pour laquelle il ne faut pas l'instaurer à la fac ! Si on instaure une sélection partout, on se prive de très bons étudiants (qui n'aimaient pas le lycée donc qui n'y ont pas travaillé, qui y avaient des problèmes de santé, de harcèlement ... le monde est vaste et complexe). Le prérequis pour entrer à la fac est le bac, et il est déjà exigé.

Il y a un problème important avec l'éducation en France, mais je pense que le problème est lié d'avantage à notre système économique (le capitalisme). Parce que les filières générales sont débordées et qu'on parle toujours de revaloriser les métiers manuels ou professionnels, mais ils restent moins payés, méprisés, et pourquoi dans ce cas on dit aux bons élèves qui veulent en faire car c'est leur passion qu'ils gâchent leur potentiel ? C'est d'une grande hypocrisie.

 

[PetitePaille]

@Herenis

Il y a un truc que je ne comprends pas, tu dis que les meilleures licences (type la sorbonne si je comprends bien) ne seront accessibles qu'aux personnes qui viennent de grands lycées parisiens mais... c'est déjà le cas en fait !
Tous les provinciaux dont j'ai pu faire parti qui sont domiciliés loin de Paris donc, ne peuvent avoir que la fac proche de chez eux, la zone géographique a toujours été prise en compte pour la L1.
En venant de la Drôme je n'aurais jamais pu rentrer à la Sorbonne et j'étais cantonnée à la fac d'aix en provence ou de grenoble. Donc je ne comprends pas cette inquiétude..
De ce que je comprends une personne avec 17 de moyenne aura plus de chance de rentrer dans une bonne fac avec le système de Macron que le système actuel.
Et justement peut être que les parisiens qui étaient d'office pris à la sorbonne malgré leurs 10 de moyenne, se verront cette fois ci refuser l'entrée.

D'ailleurs pour ce qui est de la sélection, quand on regarde pour Dauphine par exemple. Oui ils prennent en compte le lycée dans le classement mais pas que.. En gros ils vont dévaluer un lycée peu réputé inversement. Si tu as 17 dans un lycée de province pas connu, ils vont considérer que ça correspond à un 14.5 à Henri IV mais ça ne veut pas dire que le mec qui aura 10 à Louis le grand te passera devant !

 

[Hercynie]

@Herenis Les lycéens n'attendent pas d'avoir la permission de leurs parents pour s'exprimer. Ils sont déjà descendus dans la rue pour denoncer le CPE à l'époque ou encore la réforme des lycées. Ce n'est pas un bon argument de dire qu'ils ne sont pas majeurs donc qu'ils ne font rien car par le passé le contraire s'est vérifié. D'ailleurs il existe un syndicat étudiant que je n'ai pas entendu au sujet le loi ORE, ou je suis passée au travers. Les sanctions existent pour avoir sécher les cours mais selon les lycées, c'est plus ou moins appliqué. Si toutes les terminales d'un seul établissement font grève, je ne crois pas que l'administration aura les moyens de coller tout le monde ou tout du moins de prévenir tous les parents.

@Chat-au-Chocolat Je te "plussoie" lorsque tu parles du mouvement de "s'opposer pour se sentir exister". Quand j'étais en fac de lettres, j'avais l'impression que tous les ans certains étudiants du type UNEF voulaient trouver un prétexte pour "mai-soixante-huiter" Car ça peut être payant quant on voit ce qu'est devenu Bruno Julliard : porte-parole de l'UNEF pendant le CPE et aujourd'hui adjoint au maire de Paris...