Je suis autiste — Témoignage

[Somebody else]

Je n'ai pas lu les messages précédents (enfin, si, partiellement, mais y répondre ne m'intéresse absolument pas).

@Roxane E : pour ma part, je ne pense pas qu'une (1) série puisse dépeindre _la_ réalité sur l'autisme, tout simplement car il y a une importante variété de profils Pour créer un personnage autiste, il faudra nécessairement piocher dans certaines caractéristiques classiques et moins classiques que des personnes autistes peuvent avoir. Donc, ça ne représentera jamais, pour moi, "l'autisme" en général. Il aurait fallu, je pense, d'autres personnages, d'autres familles avec personnes autistes de représentées .
Je pense que la série a au moins le mérite de faire d'un personnage autiste un personnage central, après, personnellement, je trouve l'histoire assez basique (garçon cherche fille, point... moi = ), donc ça tombe vite dans les poncifs habituels (stéréotypes de genre et conformité, avec les conseils des uns "les filles aiment les fleurs" par exemple ). Si ça peut faire que quelques personnes se penchent de plus près sur les TSA et aillent creuser après, pourquoi pas, mais bon, c'est pas un support de pédagogie non plus... On a vite fait de pas aller plus loin et de penser qu'un autiste c'est ce personnage quoi

 

[skippy01]

Perso, j'entends déjà suffisamment «ah oui, tu es autiste comme Sheldon/Sherlock/Rain Man/perso-de-fiction-(supposément)-autiste», et ça me gave. Donc je pense que ce personnage va juste nourrir ce lieu commun.

 

[skippy01]

Et Sherlock, autiste ? J'ai toujours cru qu'il étais "juste" sociopathe. Quant à Sheldon, j'ai pas non plus le souvenir qu'il en soit fait mention, ni dans TBBT, ni dans le spin off.

Il n'y a pas de confirmation officielle, mais ils sont généralement considérés comme tels.

 

[Loulouboux]

Moi c'est quand j'entends parler de l'autisme comme d'une maladie que je tombe à la renverse. Ma petite soeur était autiste. Je ne sais pas combien de fois j'ai dû expliquer à des gens qu'elle n'était PAS MALADE. L'autisme c'est pas une maladie, c'est un mode de fonctionnement différent. Il y a pas à la vaincre et de toute façon tu peux pas. C'est comme l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, ça se choisit pas. Il faut juste vivre avec, et le monde étant régi par des neuro-typiques, c'est aux neuro-typiques de faire de la place aux neuro-atypiques. Voilà !

 

[Toffee]

Ça me fait penser que j'ai reçu un mail de l'université (je travaille dans un IUT) pour m'informer que comme c'est la semaine de l'autisme ou un truc du genre, une assoc' universitaire organisait un atelier-conference sur comment adapter les cours et l'environnement universitaire aux étudiants autistes.
Je n'ai pas pu me connecter pour assister aux débats mais deux choses m'ont fait tiquer :
- le mail présentait vraiment l'autisme comme un monobloc alors que, comme dit par plein de madz, il y a autant d'autismes que d'autistes. Donc je me suis demandée si l'atelier allait pas être un peu à côté de la plaque en essayant de plaquer une recette magique toute faite qui ne correspondra en fait qu'à une infime minorité ;
- le nom de l'assoc est "Aspie-friendly", or il me semblait que TSA et syndrome d'Asperger c'était deux choses différentes (on peut être autiste sans être asperger, non ?) et qu'en plus le concept même d'Asperger (ou le nom, je ne sais plus) faisait débat au sein de la communauté concernée.
Bref, je me suis demandé si c'était vraiment sérieux ou si c'était encore un truc pseudo bienveillant mais qui au final allait véhiculer des clichés éculés, voire dangereux pour les personnes concernées...

 

[Clematis]

@Toffee
Non, on ne peut pas être Asperger sans être autiste. Avant, l’autisme était séparé en plus ou moins deux catégories: l’autisme Asperger et l’autisme dit « de Kanner ». Globalement l’autisme Asperger regroupait les autistes qui n’avaient pas de déficience intellectuelle alors que l’autisme de Kanner regroupait les autistes avec déficience intellectuelle ou avec des besoins très importants et surtout visibles, d’aide et d’adaptation.
Aujourd’hui cette distinction n’a plus lieu d’être et ces deux (assez) anciennes formes d’autisme sont regroupée sous l’appellation TSA: trouble du spectre autistique et classifiées selon le niveau de besoin en aide et adaptations. (Ce qui a ses défauts aussi, notamment parce que les critères sont souvent validistes, aka on veut en fait nous aider à nous conformer aux attentes neurotypiques, et aussi parce que les niveaux de besoin varient énormément sur un temps long comme sur un temps court).

L’appellation Asperger fait également polémique parce que le scientifique qui a étudié cette forme d’autisme et lui a donné son nom était une personne peu recommandable et qui est notamment à l’origine de violences vraiment graves à l’encontre des autistes qui ne relevaient pas de la forme dite Asperger (pour lui en gros les autistes dits « de Kanner » méritaient littéralement et tres sérieusement de mourir purement et simplement et il ne se serait pas privé de pousser pour que ca arrive pour de vrai pour nombre d’entre eux).

 

[Toffee]

@Clematis D'accord, merci pour les explications ! (Par contre, je postulais qu'on pouvait être autiste sans être Asperger, pas l'inverse, mais tu as répondu à mon questionnement quoi qu'il en soit)

 

[Clematis]

@Toffee
Ha, excuse-moi alors, j’ai lu trop vite sûrement

 

[Margot Et Sa Bulle]

Et tant que femme asperger, je suis vraiment contente de voir ce témoignage. C'est important de contribuer à faire connaître ce syndrome (et toutes les formes d'autisme en général) dans toute sa diversité, afin de changer le regard de la société sur l'autisme, de lutter contre la discrimination et contre les retards de diagnostic ( qui touchent principalement les femmes). J'ai été diagnostiquée à 16 ans ( donc relativement tôt), et seule une très petite partie de mon entourage sait que je suis autiste. J'ai lontemps eu peur d'être perçue comme une handicapée, voire même comme une malade mentale ( à tort, car l'autisme n'est pas une maladie. Je suis née comme ça) . Même aujourd'hui, je n'arrive pas encore à le voir comme une chance, car les aspects négatifs sont encore trop présents ( pour l'instant, mais je pense qu'un jour j'arriverai à le gérer).

Et à première vue, impossible de deviner que je suis autiste. Cela ne se voit pas, et pourtant cela entraîne tout un tas de difficultés qui finissent par prendre énormément de place (isolement social, difficultés à trouver un emploi car les entretiens d'embauche... Comment dire? Sont pour moi de vrai "pièges"!)...
J'ai sans arrêt l'impression de marcher sur des oeufs, et je me sens très coupable de blesser des gens sans le faire exprès ou de ne pas comprendre des choses simples pour les autres ( genre des métaphores) alors que paradoxalement, je fais énormément d'efforts. Il y a aussi les comorbidités: anxiété sociale, tdah, dépression, et autres joyeusetés!

Donc je trouve cela génial que de plus en plus d'aspies décident de parler ouvertement et de façon positive de leur autisme (Greta Thunberg, Paul El Kharrat...). La neurodiversité est une chance pour la société, et les personnes autistes peuvent apporter de très grandes contributions si ont leur laisse leur chance.

C'est pourquoi je suis vraiment reconnaissante envers ceux qui évoquent ouvertement leur diagnostic, c'est vraiment encourageant, et à mon avis, c'est aussi un grand pas en avant vers une société plus inclusive!

 

[Margot Et Sa Bulle]

Hello !
Je viens de découvrir ce témoignage, et vu qu'il y a l'air d'y avoir pas mal de personnes directement ou indirectement concernées par l'autisme par ici, j'aurai bien aimé connaitre votre opinion sur la série sortie récemment sur Netflix, intitulée Atypical. J'avais personnellement vraiment apprécié la façon dont l'autisme était présenté. J'ai trouvé les personnages touchants tout en étant "vrais". Mais n'étant pas moi-même touchée par l'autisme, je ne me rends pas compte de si cette série dépeint une réalité (romancée bien sûr) ou est à côté de la plaque. Bien sûr j'ai conscience qu'il y a autant de facettes de l'autisme qu'il y a de personnes autistes, mais je me demandais si vous trouviez que cette série véhicule des clichés ou au contraire peut être bénéfique sur le regard des neurotypiques sur les personnes autistes.

Je suis aspie, et personnellement ,j'ai apprecié cette série. Même si le personnage principal était parfois trop stéréotypé (il arrive que l'autisme ne se voit pas de façon aussi évidente), j'ai eu l'impression que l'autisme a été abordé avec beaucoup d'empathie, de bienveillance et de respect ( d'ailleurs, le fait que la série tourne autour du point de vue du personnage autiste est significatif: Sam n'est plus" l'autre", il est le personnage principal, celui auquel on s'identifie, que l'on soit autiste ou pas.).

Et puis j'ai aimé le fait qu'ils parlent à la fois des aspects négatifs et des aspects positifs de l'autisme dans toute sa complexité sans tomber dans le cliché de l'idiot savant ou du génie asocial. Sam est autiste, et si cela est parfois difficile, cela ne l'empêche pas d'être remarquablement sensé et intelligent. Il est dépeint comme un garçon normal qui aspire aux mêmes choses que les autres, mais qui porte une spécificité parfois envahissante. Comme une personne atypique mais normale . Et je trouve ça original!

 

[Clematis]

@Juda Bricot
La France est très en retard, on estime que beaucoup d’autistes n’ont pas de diagnostic (j’ai entendu 1/10 seulement serait diag actuellement mais j’ai pas les sources).

La psychanalyse a fait beaucoup de dégât et a retardé l’avancement et la modernisation de la compréhension du trouble en France. Il est encore perçu comme concernant seulement les petits garçons et souffre de beaucoup de stéréotypes (ne regarde pas dans les yeux, n’a pas d’amis, est un petit garçon blanc...). Les filles sont donc diagnostiquées beaucoup (beaucoup) plus tard que les garçons.

Pour se faire diagnostiquer en France, on peut passer par le CRA, ce sont des centre de ressource autisme, il y en a globalement un par département mais très peu prennent les adultes en charge. Il y a beaucoup de temps d’attente pour les enfants et énormément pour les adultes. Pour exemple, il y a trois ans et demi d’attente pour un rendez-vous adulte au CRA de Brest. C’est remboursé par contre.
On peut aussi passer par un psychiatre mais il faut en trouver un qui soit compétent en la matière et comme c’est en libéral, ce n’est pas pris en charge, à ma connaissance. Il y a assez peu de psychiatres reconnus comme compétents par les associations de patients autistes.

 

[Asperge et cornichon]

@Juda Bricot Coucou
Perso je viens à peine d'être diag et j'ai 29 ans; j'ai l'impression qu'en France il y a tellement de retard (comme mentionné d'ailleurs dans le témoignage) qu'en effet 16 ans je peux comprendre qu'on le considère comme tôt
Encore ce matin j'entendais sur France Inter le témoignage d'une femme qui a reçu le diagnostic à 56 ans et le récit de son errance de diagnostic m'a fait enrager (bien que très commun): elle expliquait qu'au départ, un peu perdue et confuse face à toutes ses particularités, elle avait consulté des neurologues (pensant que "ça" venait de là) et qu'on lui avait répondu qu'elle était sûrement schizophrène, puis des psy avaient voulu la tester/"piéger" à coup de "non vous ne pouvez pas être autiste, vous me regardez dans les yeux" ou encore le célèbre "dites-moi combien font 305841020 X 150054?"


(ne pas me citer please, j'ai tendance à pas trop laisser de traces sur le forum, surtout sur ce sujet encore frais pour moi )

Edit: ajout d'info et détails