Je suis autiste — Témoignage

29 Octobre 2013
82
80
2 194
Calais
@Lerena @Lunafey
Merci de votre compréhension et de vos explications. J'avoue que je n'ai pas pris de recul lors de l'écriture de mon post. Mea culpa. Je prends mon métier et mon accompagnement très à cœur et ne connaissais pas cette forme originelle.
Lerena, ta vidéo m'a choquée, je comprends mieux pourquoi l'ABA est critiquée maintenant. Et je suis d'accord avec toi quand tu dis qu'il faut accompagner les personnes autistes dans un mieux-être. Malheureusement, peu de personnes pensent la même chose et bien souvent on cherche à normaliser les enfants... Tu connais des thérapies plus "douces"?
Vous faites quoi dans la vie les filles?
 
  • Big up !
Réactions : Lunafey
27 Mai 2016
76
709
1 154
Belgique
Cet article me passionne et m'interroge beaucoup à la fois...
Ma mère qui est également mon médecin généraliste m'a avoué il y a peu qu'elle trouvait que j'avais nombres de symptômes autistiques et surtout qu'elle le remarquait depuis longtemps. J'ai toujours senti comme un rejet de la part de ma mère, un malaise entre nous, elle reproche sans arrêt mon comportement... J'ai attendu 23 ans afin de savoir pourquoi. D'après elle elle enverrait des personnes chez le psychiatre poser un diagnostique pour moins que ça mais comme je suis sa fille l'éventualité d'un diagnostique positif l'effraie, le faite que je ne sois pas "normale" lui donnerait l'impression qu'elle m'a "ratée" alors elle préfère l'ignorance en continuant à me reprocher sans cesse de ne pas être "comme tout le monde", en continuant à espérer qu'ainsi je changerai et deviendrai "normale". Sympa à entendre tout ça mais au moins maintenant je sais pourquoi on est en conflit permanent depuis presque toujours, pourquoi elle me supplie de changer mon comportement même si j'ai beaucoup de mal à comprendre... Je suis moi après tout... Je me sens moi, normale, même si avec l'âge je me suis rendue compte que peu de personne me considèrent tout à fait comme telle ou simplement m'acceptent telle que je suis... J'ai fini par penser que je suis différente, incomprise, je dois faire sans cesse attention à ce que je fais ou dis de peur de faire une erreur et de subir moqueries et rejets ce qui me limite beaucoup dans mes relations sociales... C'est tellement frustrant de vouloir se faire des connaissances, des amis, quand on se torture à savoir quoi dire ou faire pour que ça soit le cas, quand on a tout le temps cette peur monstre du rejet, que, de ce fait, l'on préfère parfois se taire, rester dans son coin que de tenter.
Tout ça pour dire que je me suis retrouvée presque en tous points dans ton article si ce n'est qu'à la place de lire et écrire je peind et dessine, c'est le seul moment où je ne dois pas me forcer et m'épuiser à me concentrer sur la tâche (j'ai été diagnostiquée avec un déficit sévère de l'attention). Je ressens une sorte de grand réconfort pendant ces activités qui apaise mon anxiété permanente et qui recentre mes pensées, les empêche de partir dans tous les sens alors que quand je lis, parle et écris j'ai tendance à partir dans tous les sens, je n'arrive pas à me structurer, à me concentrer, je lis 10min et je commence à penser à plein de choses, ça part à gauche, à droite, des trucs qui n'ont rien à voir les uns avec les autres, quand je parle il faut s'accrocher car quand je commence avec un sujet A ça va me faire penser à ce que j'ai mangé le jour B ou à l'horrible bouton que j'avais au milieu de la tronche 5 ans auparavant, des trucs sans rapports, pareil quand j'écris... Je suis d'ailleurs sur ce texte depuis plus d'1h30, je m'amuse à relire 1000 fois pour m'assurer que ça ne part pas en pâte-à-couille même si je sais que ce que j'écris ira quand même un peu dans tous les sens... Tout ça m'épuise, et du coup j'ai beaucoup de difficultés à retenir des trucs théoriques, des définitions, je n'arrive pas à synthétiser mes cours et donc j'ai un mal pas possible à étudier la théorie, à me concentrer... Du coup mes études sont un parcours du combattant, épuisant, je dois bosser plus que tout le monde pour arriver à ne serait ce que la moyenne... Heureusement jai une très bonne mémoire et un esprit pratique pour palier tout ça, j'ai des idées à revendre, un esprit vif, je sais quoi faire de mes mains et ça me sauve la vie.
Jusqu'à ce que ma mère me fasse son aveu je ne m'étais jamais posée de questions, continuant à vivre dans mon angoisse, mes automatismes, mes passions très ancrées dans mon quotidien, continuant à m'en vouloir pour tous ces rejets, toutes ces incompréhensions de la part des autres... Je me rends compte en me retrouvant tant dans cet article que, si ça se trouve, il y a peut être une raison à tout ça et un diagnostique pourrait, peut être, m'offrir une réponse, quelque chose pour arrêter de vivre contre moi mais avec ce que je suis, de m'accepter avec mes "bizarreries", mon comportement parfois inadéquat, de m'apaiser un peu.
 
Dernière édition :
8 Septembre 2016
2
0
52
35
Ce sujet est dédié aux réactions concernant ce post : Je suis autiste — Témoignage
autiste-temoignage.jpg
Salut,

J'ai un collègue que je soupçonne être autiste (il ne regarde pas les gens dans les yeux, ne comprends pas l'implicite, panique dès que sa routine est perturbée), mais le souci, ç'est qu'il ne semble pas au courant lui-même... Comment lui en parler??
 
31 Mai 2014
308
1 811
3 024
30
Liège
Bonjour, merci beaucoup pour ce témoignage :)

Je ne suis pas autiste, ou du moins je ne le sais pas, mais ma psy m'avait diagnostiquée HP, et m'avait évoqué des traits autistiques. J'ai cessé de la voir peu après pour des raisons financières donc nous n'avons pas creusé plus loin. De plus, elle m'avait proposé d'effectuer un test pour confirmer son diagnostique, mais ayant l'anxiété de la performance, j'ai refusé catégoriquement...).
Je me suis énormément retrouvée dans ton témoignage et ça me touche terriblement car je suis en ce moment-même dans une période assez douloureuse de ma vie à cause de cela.

J'ai été virée de mon manège, dans lequel je travaillais de temps en temps. J'ai également appris que certains de mes comportements avaient été mal perçus, et c'est très dur pour moi d'accepter qu'on puisse avoir ce regard sur moi alors que je ne comprends pas d'où vient le problème.
Ma coach a été très avenante en me proposant de travailler pour elle, et j'étais vraiment ravie de faire partie de l'équipe, bien qu'effrayée de ne pas être à la hauteur. Les écuries, c'est ce qui me permet de respirer. Je suis au milieu des animaux, dans un endroit d'où je peux partir à tout moment en cas d'angoisse, et où je ne suis pas enfermée au milieu des gens. C'est vraiment mon petit paradis.

Mais mes "caractéristiques" ont tout gâché. Je n'ai pas "l'air" de ne pas être adaptée. Je joue bien mon rôle, je me suis entraînée pendant des années à regarder dans les yeux, à dire bonjour, à avoir l'air avenante et souriante. Je suis grande, dans la norme, et on s'attend assez facilement à ce que je sois comme tout le monde. Ce qui fait que lorsque je ne le suis pas, on le prend de travers et on m'en veut. On croit que c'est du jemenfoutisme ou pire, un affront.

J'ai par exemple oublié de venir un jour où j'étais supposée aider, car cela m'avait été dit comme ça, pendant que j'étais occupée, une semaine avant. Et comme l'auteure de cet article, retenir les choses ainsi m'est vraiment difficile car mon esprit part partout et ne se fixe pas sur l'information.

Je suis également venue plus tard un matin car j'étais malade et qu'il m'est très pénible de sortir de chez moi quand je suis malade. Je suis alors très vulnérable, plus que d'accoutumée, et je suis alors dans l'incapacité de fournir mon "masque" sans en être absolument épuisée.

Je fais également parfois des faux-pas sociaux, qui se répercutent sur la vision qu'on a de moi. On me dit que je suis impolie et que je ne fais pas d'efforts, alors que j'ai l'impression de ne faire que ça, essayer de m'adapter.

On effectuait à ce moment une formation, dans un petit endroit restreint avec beaucoup de monde. Je me suis assise à l'écart, mais j'ai quand même participé, et me suis montrée intéressée par les intervenants. Mais apparemment, c'était très impoli de ne pas m'être assise au milieu des autres. J'ai tenté, mais ça m'a rendue malade d'angoisse. Je me sentais au bord du meltdown, des gens toussaient autour de moi, il y avait des gens devant, à gauche et à droite de moi... c'était un enfer.

Parfois j'ose demander des choses, parfois je me dévoile trop, puis plus du tout, car je n'ai aucune notion de ce qui n'est pas socialement acceptable. Ça ne m'ennuie pas qu'on me dise des choses très personnelles, et ça ne m'ennuie pas quand me dit quelqu'un vouloir rester seul/e. Mais apparemment, ces choses-là sont impolies. Ce que je ne comprends pas, pour moi toutes ces règles sociales sont totalement absurdes.

Pendant la formation, ça n'allait pas assez vite et pas assez à l'essentiel, ce qui me nouait le ventre d'angoisse. Je me suis retrouvée à danser sur ma pointe des pieds, à tourner sur place, à chantonner, je ressentais le besoin de crier. J'ai eu l'air d'une sale gosse capricieuse...

Je ne supporte pas d'être vue comme impolie, comme ne faisant pas d'effort, comme étant mal éduquée, car je ne comprends pas certaines choses et car je vis les choses différemment. Je suis littéralement en panique quand j'oublie mes écouteurs dans le bus car c'est une torture d'y être bloquée et d'entendre tout le monde discuter. Et là, pour la formation, j'ai dû rester des heures non-stop avec des gens, et ça m'a lessivée. J'en avais la tête qui tourne. Tous ces bruits, toutes ces odeurs, tous ces stimuli... J'ai l'impression de faire des efforts insurmontables pour être "normale", mais ce n'est pas assez et on me répond encore que je n'ai pas été correcte et que je n'essaie pas.

C'est absolument insupportable. Ça me tend de ne pas être comprise. J'ai dit à ma coach (qui m'a donc virée ; ce que je peux comprendre en soi, puisque je ne correspond pas à ce qu'elle attend d'une employée), qu'elle ne se rendait pas compte de la difficulté que c'était pour moi de ne pas être normale. Elle m'a répondu qu'elle ; elle s'en foutait d'avoir l'air normale.
Mais ça n'a tellement rien à voir avec sa vision "d'avoir l'air normale". Quand je dis, avoir l'air normale, je dis que je dois regarder les gens dans les yeux, que je dois aller vers eux pour leur dire bonjour, que je dois répondre "ça va" quand on me demande si je vais bien, même si je ne vais pas bien. Car apparemment, ce n'est pas poli de répondre honnêtement à cela. Avoir l'air normale veut dire aussi que je ne dois pas avoir l'air de souffrir car quelqu'un est assis à côté de moi, que je ne dois pas avoir l'air de souffrir quand on m'a fait la bise alors que juste après, ladite personne se met à tousser. Toutes ces choses qui tombent sous le sens pour tout le monde mais pas pour moi.

J'ai entendu que j'avais 23 ans, que je devais savoir tout ça, que je devais faire un effort pour m'adapter, que je ne me bougeais pas. C'est terriblement douloureux de voir que la personne que je suis ne sera jamais assez bien. Que je vais toujours devoir essayer, et que ce ne sera de toutes manières jamais reconnu car c'est "normal". Pour le moment, je n'ai plus aucune estime de moi car j'ai l'impression d'être juste.. inadaptée au monde.
Je ne sais pas quoi faire de moi. J'ai envie d'abandonner et d'être juste moi, qu'importe que ça déplaise et que ça vexe. J'en ai marre de devoir être comme tout le monde alors que je ne le suis pas, et que c'est très bien aussi. Je ne force pas tout le monde à agir et à voir le monde comme je le fais, alors pourquoi me force-t-on à le faire ? Pourquoi est-ce que les gens prennent personnellement mes différences et les comportements qui en découlent ?
Pourquoi me dit-on qu'on comprend que je sois hp, et qu'on me soutient, mais que lorsque ça se répercute de manière concrète on me dit que je suis une gamine qui ne fait pas d'efforts ?
 

skippy01

Peau lisse partout, justice nulle-part.
16 Avril 2017
6 789
42 672
1 654
36
@Monanged Je ne peux que te conseiller de continuer les démarches pour un diagnostic officiel, car ce que tu décris est tout à fait cohérent avec un TSE. Après ça, ceux qui te reprocheront ton comportement n'auront même pas l'excuse de ne pas savoir ou croire que tu affabules. Ça te dispensera aussi de porter un masque en permanence, qui en plus d'être énergivore, ne fait même pas illusion.
 
31 Mai 2014
308
1 811
3 024
30
Liège
@skippy01 , La seule raison pour laquelle je souhaite parvenir à un diagnostique officiel, ce serait ça : la reconnaissance officielle et tangible de ce que je suis. Mais à côté de ça, le côté 'officiel' et 'test' de la chose me paralysent un peu par rapport à cette démarche. Je pense que lorsque ma vie sera plus stable (notamment sur le plan financier), j'effectuerai la démarche mais actuellement je ne m'en sens pas vraiment capable..
 
3 Avril 2015
459
1 655
804
30
Lyon
Merci pour cet article, dont j'aurais pu écrire certain passage moi-même. J'essaye de trouver la force de me faire diagnostiquer, mais le fait de savoir que c'est extrêmement long ça me décourage pas mal...
 
  • Big up !
Réactions : Loutrinel et Furya
29 Janvier 2017
856
6 184
2 554
31
Ce témoignage est toujours très intéressant aujourd'hui. Juste un petit commentaire sur la critique du film Rain Man, que je vois fréquemment mentionné comme induisant les gens en erreur dans leur perception de l autisme: le film ne présente jamais le personnage de Raymond comme une représentation universelle de l autisme. Dans une scène ou deux, on explique d ailleurs a son frère qui découvre tout cela, que l autisme est un spectre, pas une maladie, que certaines personnes autistes ne parlent pas, que d autres comme Raymond utilisent des stéréotypies pour se rassurer ou font part de facultés intellectuelles ou créatives impressionnantes. Je comprends que le film ait mauvaise réputation, il a bien sûr vieilli depuis l époque où il est sorti, on est mieux informés aujourd'hui mais je trouve que pour les années 80 ce n est pas un film trop cliché. Il a aussi le mérite de poser un débat a la fin
Ce contenu est réservé aux membres inscrit.es. Inscris-toi par ici.
Voilà, juste pour défendre ce film qui n est pas sans défauts mais qui personnellement m a fait tomber pas mal de préjugés sur l autisme. Je pense ce qui pose problème n est pas l oeuvre en particulier mais son succès et la vision qu en ont retenue bcp de personnes après l avoir vue (ou même sans l avoir vue), laquelle leur a fait prendre le personnage de Raymond pour une généralisation.
 
Dernière édition :
24 Avril 2015
1
0
152
29
Merci pour ce témoignage nécessaire que je n'ai pas eu le courage de lire en entier tant il a soulevé des MILLIARDS de questions dans ma petite cervelle. Je sais qu'il va m'aider à essayer de construire une réelle relation avec ma petite soeur de 13 ans qui est elle aussi autiste.
 
28 Avril 2015
1 897
10 120
3 894
Lerena, déjà je te remercie pour ton joli témoignage :jv:

Je travaille avec des enfants handicapés dont une autiste dans ma classe. En me rappelant ton article, j'ai pu être présente pour elle quand ça n'allait pas, cette semaine. Merci de m'avoir aidée à mieux comprendre mon élève. :hugs:
 

Roxane E

Avatar by Patate_masquee
6 Novembre 2014
1 377
8 510
5 194
33
Coutances
www.martyn-photography.com
Hello !
Je viens de découvrir ce témoignage, et vu qu'il y a l'air d'y avoir pas mal de personnes directement ou indirectement concernées par l'autisme par ici, j'aurai bien aimé connaitre votre opinion sur la série sortie récemment sur Netflix, intitulée Atypical. J'avais personnellement vraiment apprécié la façon dont l'autisme était présenté. J'ai trouvé les personnages touchants tout en étant "vrais". Mais n'étant pas moi-même touchée par l'autisme, je ne me rends pas compte de si cette série dépeint une réalité (romancée bien sûr) ou est à côté de la plaque. Bien sûr j'ai conscience qu'il y a autant de facettes de l'autisme qu'il y a de personnes autistes, mais je me demandais si vous trouviez que cette série véhicule des clichés ou au contraire peut être bénéfique sur le regard des neurotypiques sur les personnes autistes.
 
  • Big up !
Réactions : GingerBraid

Les Immanquables du forum

Participe au magazine !
Une info qu'on devrait traiter sur madmoiZelle ?
 
Nouvelle ou perdue ?
Pas de panique, on t'aime déjà !

La charte de respect du forum
Le guide technique &
le guide culturel du forum
Viens te présenter !
Un problème technique ?
Topic d'entraide sur l'orthographe et la grammaire
 
La chefferie vous informe
Les annonces de l'équipe concernant le forum et madmoiZelle
Rendre visite à madmoiZelle
Le médiateur du forum
Soutiens madmoiZelle financièrement
Topic dédié à la pub sur mad
Si vous aimez madmoiZelle, désactivez AdBlock !

Les immanquables
Les topics de blabla
En ce moment... !

Mode - Beauté - Ciné - Musique - Séries - Littérature - Jeux Vidéo - Etudes - Ecriture - Cuisine - People - Télévision

Envie de rencontrer des MadZ ?
Viens trouver le forum de ta ville !

Mode
Le pire de la mode
Ces vêtements qui te font envie
Ta tenue du jour
La tenue qui plaît
Tes derniers achats de fringues

Beauté
Astuces,bons plans économies & dupes
Le topic des vernis
Questions beauté en tout genre
 
Culture
Le meilleur des images du net
L'aide aux devoirs
Tu écoutes quoi ?
Quelle est ta série du moment ?
Quel livre lisez-vous en ce moment ?
Le dernier film que vous avez vu à la maison
Le topic philosophique
 
Société
Topic des gens qui cherchent du travail
Voyager seule : conseils et témoignages
Trucs nuls de la vie d'adulte : CAF, Banque, Mutuelle, Logement etc...
 
Les topics universels
Je ne supporte pas
Je ne comprends pas
Ca me perturbe
Je me demande
J'adore...
Je m'en veux de penser ça mais...

Cupidon
Le topic des amoureuses
Le topic des polyamoureuses
Les Célibattantes