Bonjour, merci beaucoup pour ce témoignage
Je ne suis pas autiste, ou du moins je ne le sais pas, mais ma psy m'avait diagnostiquée HP, et m'avait évoqué des traits autistiques. J'ai cessé de la voir peu après pour des raisons financières donc nous n'avons pas creusé plus loin. De plus, elle m'avait proposé d'effectuer un test pour confirmer son diagnostique, mais ayant l'anxiété de la performance, j'ai refusé catégoriquement...).
Je me suis énormément retrouvée dans ton témoignage et ça me touche terriblement car je suis en ce moment-même dans une période assez douloureuse de ma vie à cause de cela.
J'ai été virée de mon manège, dans lequel je travaillais de temps en temps. J'ai également appris que certains de mes comportements avaient été mal perçus, et c'est très dur pour moi d'accepter qu'on puisse avoir ce regard sur moi alors que je ne comprends pas d'où vient le problème.
Ma coach a été très avenante en me proposant de travailler pour elle, et j'étais vraiment ravie de faire partie de l'équipe, bien qu'effrayée de ne pas être à la hauteur. Les écuries, c'est ce qui me permet de respirer. Je suis au milieu des animaux, dans un endroit d'où je peux partir à tout moment en cas d'angoisse, et où je ne suis pas enfermée au milieu des gens. C'est vraiment mon petit paradis.
Mais mes "caractéristiques" ont tout gâché. Je n'ai pas "l'air" de ne pas être adaptée. Je joue bien mon rôle, je me suis entraînée pendant des années à regarder dans les yeux, à dire bonjour, à avoir l'air avenante et souriante. Je suis grande, dans la norme, et on s'attend assez facilement à ce que je sois comme tout le monde. Ce qui fait que lorsque je ne le suis pas, on le prend de travers et on m'en veut. On croit que c'est du jemenfoutisme ou pire, un affront.
J'ai par exemple oublié de venir un jour où j'étais supposée aider, car cela m'avait été dit comme ça, pendant que j'étais occupée, une semaine avant. Et comme l'auteure de cet article, retenir les choses ainsi m'est vraiment difficile car mon esprit part partout et ne se fixe pas sur l'information.
Je suis également venue plus tard un matin car j'étais malade et qu'il m'est très pénible de sortir de chez moi quand je suis malade. Je suis alors très vulnérable, plus que d'accoutumée, et je suis alors dans l'incapacité de fournir mon "masque" sans en être absolument épuisée.
Je fais également parfois des faux-pas sociaux, qui se répercutent sur la vision qu'on a de moi. On me dit que je suis impolie et que je ne fais pas d'efforts, alors que j'ai l'impression de ne faire que ça, essayer de m'adapter.
On effectuait à ce moment une formation, dans un petit endroit restreint avec beaucoup de monde. Je me suis assise à l'écart, mais j'ai quand même participé, et me suis montrée intéressée par les intervenants. Mais apparemment, c'était très impoli de ne pas m'être assise au milieu des autres. J'ai tenté, mais ça m'a rendue malade d'angoisse. Je me sentais au bord du meltdown, des gens toussaient autour de moi, il y avait des gens devant, à gauche et à droite de moi... c'était un enfer.
Parfois j'ose demander des choses, parfois je me dévoile trop, puis plus du tout, car je n'ai aucune notion de ce qui n'est pas socialement acceptable. Ça ne m'ennuie pas qu'on me dise des choses très personnelles, et ça ne m'ennuie pas quand me dit quelqu'un vouloir rester seul/e. Mais apparemment, ces choses-là sont impolies. Ce que je ne comprends pas, pour moi toutes ces règles sociales sont totalement absurdes.
Pendant la formation, ça n'allait pas assez vite et pas assez à l'essentiel, ce qui me nouait le ventre d'angoisse. Je me suis retrouvée à danser sur ma pointe des pieds, à tourner sur place, à chantonner, je ressentais le besoin de crier. J'ai eu l'air d'une sale gosse capricieuse...
Je ne supporte pas d'être vue comme impolie, comme ne faisant pas d'effort, comme étant mal éduquée, car je ne comprends pas certaines choses et car je vis les choses différemment. Je suis littéralement en panique quand j'oublie mes écouteurs dans le bus car c'est une torture d'y être bloquée et d'entendre tout le monde discuter. Et là, pour la formation, j'ai dû rester des heures non-stop avec des gens, et ça m'a lessivée. J'en avais la tête qui tourne. Tous ces bruits, toutes ces odeurs, tous ces stimuli... J'ai l'impression de faire des efforts insurmontables pour être "normale", mais ce n'est pas assez et on me répond encore que je n'ai pas été correcte et que je n'essaie pas.
C'est absolument insupportable. Ça me tend de ne pas être comprise. J'ai dit à ma coach (qui m'a donc virée ; ce que je peux comprendre en soi, puisque je ne correspond pas à ce qu'elle attend d'une employée), qu'elle ne se rendait pas compte de la difficulté que c'était pour moi de ne pas être normale. Elle m'a répondu qu'elle ; elle s'en foutait d'avoir l'air normale.
Mais ça n'a tellement rien à voir avec sa vision "d'avoir l'air normale". Quand je dis, avoir l'air normale, je dis que je dois regarder les gens dans les yeux, que je dois aller vers eux pour leur dire bonjour, que je dois répondre "ça va" quand on me demande si je vais bien, même si je ne vais pas bien. Car apparemment, ce n'est pas poli de répondre honnêtement à cela. Avoir l'air normale veut dire aussi que je ne dois pas avoir l'air de souffrir car quelqu'un est assis à côté de moi, que je ne dois pas avoir l'air de souffrir quand on m'a fait la bise alors que juste après, ladite personne se met à tousser. Toutes ces choses qui tombent sous le sens pour tout le monde mais pas pour moi.
J'ai entendu que j'avais 23 ans, que je devais savoir tout ça, que je devais faire un effort pour m'adapter, que je ne me bougeais pas. C'est terriblement douloureux de voir que la personne que je suis ne sera jamais assez bien. Que je vais toujours devoir essayer, et que ce ne sera de toutes manières jamais reconnu car c'est "normal". Pour le moment, je n'ai plus aucune estime de moi car j'ai l'impression d'être juste.. inadaptée au monde.
Je ne sais pas quoi faire de moi. J'ai envie d'abandonner et d'être juste moi, qu'importe que ça déplaise et que ça vexe. J'en ai marre de devoir être comme tout le monde alors que je ne le suis pas, et que c'est très bien aussi. Je ne force pas tout le monde à agir et à voir le monde comme je le fais, alors pourquoi me force-t-on à le faire ? Pourquoi est-ce que les gens prennent personnellement mes différences et les comportements qui en découlent ?
Pourquoi me dit-on qu'on comprend que je sois hp, et qu'on me soutient, mais que lorsque ça se répercute de manière concrète on me dit que je suis une gamine qui ne fait pas d'efforts ?