Ele;2759880 a dit :
J'accepte ta décision, en même temps je n'ai pas le choix mais je ne la critique pas. Je pense même qu'il faut savoir arrêter ce genre de discussion qui finit toujours par une prise de position politique.
Ce que je voulais dire et je m'adressais à toi parce que c'est toi qui avais dit
et qui avais dit à Epidaure
Mais j'aurais pu m'adresser à tous ceux qui lisent mon commentaire. Si on ne voulait pas de Marine Le Pen à Dauphine selon moi (et je dis bien selon moi), il aurait été plus malin :
*soit de refuser le débat dès le début puisqu'on sait (et je dirais même surtout quand on le sait) que selon les conditions une manifestation dégénère. Donc, accuser un délit (xénophobie) et en aider un autre (dégradation volontaire de matériel) discrédite le but principal de la manifestation.
*soit une fois arrivé le jour du débat de maintenir le débat et de ne pas avoir peur de débattre avec elle afin : d'exprimer son désaccord, de demander des explications plus précises, de lui parler de ce que l'on considère comme mal dans son programme. J'ai employé peur exprès parce que je ne crois pas qu'il soit si facile pour un étudiant de se retrouver face à une personne qui fait de la politique depuis plusieurs années et qui donc a plus l'habitude de cet exercice. Dire que les étudiants n'en auraient fait qu'une bouchée comme ça a été dit précédemment me semble un peu trop ambitieux que le sujet abordé soit un sujet économique ou non. On a beau maitriser un sujet, savoir le défendre demande aussi une certaine expérience. Mais je ne m'étais pas positionnée là-dessus avant parce que ce n'était pas ce qui m'intéressait le plus et je ne voulais pas créer un débat parallèle là-dessus.
Depuis le début, je ne jugeais pas le fait d'être pour ou contre le FN (je considère qu'aucun parti ne dépasse les autres sur tous les domaines et que tous les partis ont au moins une idée intéressante et cela en analysant leur programme). J'ai mes convictions politiques (que je n'expose pas sur un forum) et je laisse à toute personne la liberté d'avoir les siennes (et de les exposer sur un forum si elle le souhaite). Je ne jugeais que le fait d'annuler un débat dans une démocratie et de la façon dont on s'y prenait pour l'annuler.
Enfin, si on ne considère pas le FN comme un parti démocratique, mon raisonnement tient toujours de toute façon. La raison est simple : une grande partie de la population française adhère au FN. Donc parti démocratique ou antidémocratique quoi qu'il en soit prendre le FN en compte si on veut parler de politique française c'est inévitable aujourd'hui.
Puisque tu prends la peine de t'expliquer je vais quand même te répondre, car je pense que c'est la moindre des choses :
-Oui j'ai dit que je n'aurais jamais accepté qu'elle foute un orteil dans ma fac, donc que je comprenais la réaction des étudiants de Dauphine. Mais j'ai aussi dit que si j'approuvais le fond, je n'approuvais pas spécialement la forme. Manifester, ok ; casser non, ça n'a aucun intérêt et cela n'exprime politiquement rien du tout.
-Ensuite j'expliquais à Epidaure qu'une manif est quasiment toujours infiltrée par quelques casseurs, et que ça ne remet pas en cause le fait que la manif soit légitimement organisée par des étudiants de Dauphine qui sont trop rapidement réduits à une poignée de casseurs externes à l'établissement : dans la réalité ça se passe rarement ainsi. Ce que je voulais dire par là, c'est qu'il fallait se montrer prudent face à la façon dont on interprétait les compte-rendus médiatiques. En ce qui me concerne j'ai participé à assez de manifs dans ma vie pour constater que les médias focalisaient généralement sur un petit dérapage périphérique, qui parfois n'avait rien à voir du tout avec la manif, plutôt que sur une manif de 3h absolument pacifiste et qui se déroulait dans une ambiance parfaitement bon enfant.
D'une manière générale, tout ce qu'on lit dans les journaux n'est pas à prendre pour argent comptant ; le seul moyen de s'informer c'est de confronter plusieurs sources d'information, et non de rester passif et d'absorber un point de vue sans se demander de quel type de média ça vient et pourquoi cela vient ainsi. (Bref, je digresse un peu donc revenons au sujet principal).
-Dire qu'une manifestation dégénère toujours c'est une généralisation abusive. Non ça ne dégénère pas toujours.
Les infiltrations ça se produit presque à chaque fois, c'est vrai, mais le plus souvent elles sont maîtrisées. Si elles ne l'ont pas été ici, c'est regrettable, mais ça ne veut pas dire que la manif est une forme d'action anar complètement inutile qui finit toujours par la castagne, c'est faux.
En plus, là, on nous dit, si je me souviens bien que "du matériel audio-visuel" a été abîmé. Quoi qu'il en soit c'est regrettable, mais mettons qu'il y ait eu une cohue et qu'un rétroprojecteur ait été endommagé, ou qu'une caméra prévue pour filmer le débat soit tombée, ce n'est pas la même chose qu'une scène d'émeute dans laquelle des casseurs seraient vraiment venus dans le but de saccager du matériel !
Bref, la façon de relater ce genre d'incidents est ambigüe et sous prétexte qu'il y a eu de la casse, en déduire directement que des "sauvageons" sont venus dans une fac à laquelle ils n'appartenaient pas dans le seul but de favoriser la casse, c'est favoriser soi-même le discours de récupération politique par l'extrême-droite, en faisant passer l'illusion que toute opposition est indisciplinée, inutilement violente et anti-républicaine (belle façon de renverser les rôles, puisque j'insiste, le FN est un parti anti-démocratique et anti-républicain. Je ne suis pas experte en économie, et concernant le programme du FN à propos de la fiscalité j'aurais probablement analysé ça à peu près de la même façon que
Malaussène. Sans entrer dans les détails, il y a quand même des trucs dont la démagogie et l'irréalisabilité -néologisme ?- me saute aux yeux là-dedans, mais bon je pense qu'elle les a assez bien relevés. Par contre j'ai un diplôme de science-politique qui m'a fait m'intéresser plus amplement aux valeurs démocratiques, et à ce titre-là, je ne comprends pas comment il peut échapper à qui que ce soit que le FN n'est pas, n'a jamais été et ne sera jamais un parti démocratique ni même républicain.)
- Je ne conteste pas la validité de la démarche de l'association étudiante qui a organisé le débat : c'était logique de sa part d'inviter Marine Le Pen dans la mesure où elle invitait tous les candidats. Mais que les étudiants prennent l'initiative d'y faire barrage, ça me parait tout aussi légitime : la fac c'est leur lieu de vie, leur lieu de construction intellectuelle, de débat, de transmission des savoirs, etc. Ils sont parfaitement en droit de ne pas accepter qu'on y propage des discours allant à l'encontre de leur éthique démocratique. Il aurait mieux valu que cela se passe sans incident, certes, et peut-être la manif n'a-t-elle pas été assez préparée (impossible de juger de cela, je n'y étais pas) mais peut-être aussi le discours médiatique sur l'événement est-il également hyperbolique (n'y étant toujours pas, toujours impossible de juger) et dans tous les cas, ça ne remet pas en cause la légitimité de la protestation.
Je pense en outre que des étudiants politisés de longue date sont tout-à-fait capables de remettre en cause et de rembarrer un ou une responsable politique expérimenté-e. Je ne dis pas que c'est inné (les talents innés de toutes façons je n'y crois pas trop), c'est un apprentissage comme tout le reste, mais il y a des personnes qui se politisent très jeunes et qui acquièrent très tôt une expérience de terrain suffisante pour rivaliser dans ce type de discussion. (Et heureusement !) Surtout qu'ici elle venait parler de son programme économique dans une fac spécialisée en économie. A priori pas de novices dans l'assistance, et comme à l'université en général on prépare les débats en amont en étudiant un peu les propos des invités de façons à poser des questions ; sérieusement, je pense qu'en effet il n'aurait pas fallu longtemps aux étudiants pour démonter son petit discours en révélant les failles et les nombreuses incohérences de son programme.
Enfin, même si une manifestation comporte toujours le risque de dégénérer à cause des casseurs qui les infiltrent et qui ne sont pas toujours maîtrisés, franchement je préfère prendre ce risque plutôt que de vivre dans un pays où la population se comporte d'une façon passive et grégaire, sans jamais élever la voix face à l'inadmissible. Je pense qu'il faut faire la distinction entre manif et guérilla : une manifestation est un instrument de démocratie. Puisque l'on ne consulte pas tout le temps la population par référendum, elle utilise ce moyen de se faire entendre quand elle estime que des bornes sont dépassées ou qu'il lui faut exprimer une contestation ponctuelle, je trouve ça très sain.
A la limite, une manif que je ne trouve pas très légitime, c'est celle qui a suivi le premier tour de la Présidentielle en 2002 ; pour moi seuls ceux qui n'avaient pas le droit de vote à ce moment-là, donc grosso modo les moins de 18 ans, avaient le droit de descendre dans les rues protester contre le passage de Jean-Marie le Pen. Les autres ont eu l'opportunité de voter pour faire leur choix et manifester contre le résultat du suffrage universel, de leur part, c'était anti-démocratique.
Dans le cas de Paris-Dauphine, la démarche n'est pas la même : aucune institution n'est remise en cause.
Et puis pour conclure, ce n'est pas parce que Marine le Pen est pressentie selon les sondages actuels comme la 3e figure de l'élection présidentielle en 2012 que cela fait du FN "le troisième parti politique français", c'est une grosse confusion, et laisser croire ça, c'est une forme de manipulation. Fort heureusement, l'importance d'un parti politique dépend de critères beaucoup plus complexes que l'opportunisme politique en période pré-électorale. Mais parce qu'elle est si bien placée dans les sondages (encore que les sondages ne constituent pas une forme d'information, en aucun cas, et que ça m'énerve beaucoup qu'on les relaie dans les médias, parce qu'encore une fois, c'est évincer les idées au profit d'une guerre d'images) sa parole doit être entendue, c'est vrai. Personnellement je suis d'ailleurs fermement convaincue qu'il faut toujours connaître les arguments de son ennemi.
Cependant une tribune doit-elle lui être offerte dans l'enceinte de l'université ? Cette question-là dépend de la conception de l'université que l'on admet, et dans la mienne, la réponse est non.
Voilà, je pense que ton dernier post méritait une réponse plus complexe ; c'est pourquoi j'ai pris la peine de t'écrire tout ça. Mais il me semble vraiment ne plus avoir grand-chose à ajouter dans ce débat ; tourner en rond n'est jamais très constructif. Donc ceci y constitue vraiment mon dernier post. Si tu veux encore réagir sur mes propos (encore que je pense avoir fait le tour du sujet et qu'à mon avis, poursuivre sur tous ces poins ne consistera qu'en une forme de radotage), je te propose plutôt de le faire par MP parce que ça n'entrera probablement plus dans le cadre du débat.