Quand deux personnes que tout oppose s'attablent autour d'une bière...

[Gia_Juliet]

Le sexisme intériorisé existe bel et bien par exemple, chez moi en tout cas je le reconnais et j'essaie de m'en débarrasser. J'ai énormément de méconnaissances sur beaucoup de sujets touchant... à tout. Mais merci à celles qui ont eu la patience de discuter, d'écrire, parfois de m'expliquer avec pédagogie (et non démagogie) que mon opinion est respectable mais parfois maladroite ou très influencée inconsciemment, soit contradictoire, soit pas assez poussée etc. Peu importe.

Sans discussion on ne voit pas ce qui est la source de nos pensées, de nos préjugés ou de ceux des autres, or on ne connaît personne réellement sans prendre le temps d'échanger posément. Combien sommes-nous à avoir de supers ami-es que l'on pensait pestes ou impossibles à fréquenter alors qu'elles sont finalement le contraire parce qu'en creusant on a un peu les mêmes défauts?
Irl, je pends le temps d'expliquer à certains machos (ou non) le Féminisme avec calme, et le plus souvent même si c'est lourd c'est clair et agaçant, j'ai tout un tas de questions vraiment intéressées sur le sujet. Je pense que personne n'est réfractaire à l'apprentissage, que tout le monde est demandeur de connaissances, d'idées qui se rejoignent pour avancer et s'améliorer.
Après il y a une quantité de facteurs autres à l'instant t qui entrent en jeu comme l'humeur, l'implication, l'envie de parlotte etc.

La pub en soi je m'en tape, c'est une pub donc une énième incitation à consommer (pour ce qui n'est pas tant de la bière en plus, désolée, Heineken ça n'a aucune consistance, mais ça se boit et s'élimine tout de suite, et ainsi de suite: beurk).
Pour la bière, Belgium Powa!!


Ici il y a une quantité de madz que je voudrais tarter sur certains sujets je pense, mais aussi et surtout que je pourrais accompagner, suivre aveuglément sur un tas d'autres au contraire (et peut-être inversement, qui sait?!). C'est un travail.
Je pense que ce qui vexe, c'est qu'on peut voir aussi chez les autres certains de nos travers, et c'est gênant. Et s'il y a malaise, très souvent c'est bon signe si on y pense: c'est qu'un travail sur soi est nécessaire, ce qui n'est jamais mauvais en soi. Evoluer avec des personnes d'avis différents me fait plus avancer que des personnes qui me ressemblent. Ce n'est pas non plus de la curiosité malsaine forcément.

Et pour la lassitude, bah j'ai le droit d'être lassée de temps en temps et d'envoyer balader les gens. ^^

 

[AprilMayJune]

@Mymy Plus que les préjugés et les idées reçues qu'ont les gens, je dirais qu'il y a des attitudes propices au dialogue, et d'autres qui ne le sont pas.

Ainsi, par exemple, dans l'exemple de l'article (le mec dans un bar qui te dit "t'es une femen alors, montre-moi tes seins"), pour moi, ça augure d'une discussion pénible, où je vais m'épuiser et m'en prendre plein la figure, et où au mieux je vais faire bouger un peu un inconnu sur ce qu'il pense. Engager la discussion, là, ça ne sert à rien: il vaut mieux l'envoyer bouler le mec, la soirée au bar en sera meilleure pour tout le monde, et lui comprendra peut-être qu'il ne peut pas provoquer les gens ainsi, qu'il va se faire éjecter s'il le fait.

A l'inverse, par exemple, ma famille et mon entourage élargi sont tous catholiques pratiquants, et entretiennent plein d'idées transphobes et homophobes et très ignorantes qu'iels n'ont jamais vraiment remis en question. Mais iels font attention à ne pas blesser les gens, y compris moi, et plusieurs personnes m'ont demandées si elles pouvaient me poser des questions. J'ai dit oui. J'ai passé du temps à répondre à des questions maladroites et sincères; je les ai écoutées parler d'où elles venaient (même si sur ce point c'était court, vu que moi aussi j'ai grandi dans le catholicisme). Je n'ai pas forcément convaincu du monde; mais elles ont beaucoup appris sur moi et sur la transité, et on a toujours des bonnes relations familiales; tout le monde y a gagné, et ça ne m'a pas beaucoup pesé (c'était plutôt cool de voir les gens chercher à comprendre); c'était une bonne chose de discuter, et une décision qui m'a parue évidente.

Le truc, c'est qu'à tenter de dialoguer avec tout le monde quelles que soient les conditions, on finit par fournir des montagnes d'efforts pour des résultats qui ne peuvent être au mieux que médiocres, et pour des gens qui ne le méritent pas. C'est épuisant, émotionnellement, et c'est se pourrir la vie. Et puis ça donne le signal aux gens que tout et n'importe quoi est discutable, qu'il n'y a rien d'inacceptable en soi - et comme résultat ça donne par exemple des gens qui se permettent de venir parler à des gens trans qu'ils connaissent à peine pour leur poser des questions sur les organes génitaux et la vie sexuelle, et qui se disent pas que peut-être c'est déplacé d'aller questionner un-e inconnu-e sur son entrejambe. Vu qu'on n'a pas des ressources inépuisables, il vaut mieux calculer pour faire au mieux, et pour se préserver aussi, parce qu'il n'y a pas que le travail féministe dans la vie.

Et l'autre chose à laquelle je pense, c'est que ce n'est pas toujours facile de bien dialoguer. Ca demande de la patience, de prendre sur soi parfois, ça demande de savoir des choses et de savoir bien les expliquer; il m'est arrivé de ne pas avoir de réponses à des questions qu'on m'a posées, il m'est arrivé aussi d'être complètement crevée et de m'énerver contre quelqu'un - et si souvent j'arrive à me dire "stop il faut que j'arrête je m'énerve et ça sert à rien" parfois je ne m'en rends pas bien compte, et surtout pour le moment la seule solution que j'ai quand je suis crevée et incapable de discuter, la solution est de dire j'arrête. Et puis il y a certains sujets qui me sont difficiles; et non seulement ce ne serait pas bon envers moi que je me pousse à la discussion alors que ça me chamboule et me fait du mal, mais en plus de par le fait que c'est un sujet difficile je ne risque pas de faire un bon travail.

Enfin voilà. Je ne pense pas qu'il s'agisse de refuser le dialogue, autant que de poser ses conditions? Ne pas accepter toutes les conditions de son interlocuteurice ("je veux un dialogue où je peux être aggressifve et insulter si je veux / je peux faire des provocations en guise d'arguments et c'est à toi de réfuter mes absurdités / je peux jouer à "l'avocat du diable" et poser des questions blessantes sur un sujet qui m'intéresse pas en soi parce que pour moi c'est théorique et je suis là pour le plaisir de démonter les raisonnements d'autrui" etc - parfois les gens rejettent des dialogues comme ça), poser ses conditions ("il y a des points que je refuse d'aborder / il y a des idées que je considère inacceptables / je veux pouvoir entamer la discussion sans me sentir mal à l'aise / je veux la possiblité d'arrêter ou de refuser, de dire non" etc) et donc travailler dans un cadre qui ne soit pas néfaste pour soi, et qui ne soit pas inutile.

Et puis la façon même dont on pose la discussion aide beaucoup: à un moment je participais beaucoup aux sujets des questions pas si cons, qui changeaient beaucoup la nature des discussions de par leur format même, en axant les discussions sur l'échange de connaissances et d'expériences, plutôt qu'en débat pour savoir qui a raison (ce qui antagonise les gens, comme format de discussion).

Et malgré tout (et j'ai même envie de dire, grâce à tout ça), j'ai quand même appris beaucoup plus de choses à propos du féminisme sur les forums madmoizelle qu'ailleurs. Je ne pense pas que ce soit nuisible d'être sélectifve sur la façon dont dialogue et sur les dialogues qu'on accepte de faire, au contraire.

 

[Amanda0]

Vous savez à quoi me fait penser cette pub? A moi et mon copain... Lui: éduqué dans une pension ultra catho et vieille école, issu d'une famille très nombreuse et militaire vs. moi : féministe, childfree (pour l'instant) et bisexuelle. Il m'a dit des mots hyper violents et homophobes quand un jour le sujet est tombé sur la manif pour tous je sais plus pourquoi. Ma réponse "mec, je suis bi...donc soit tu retires ce que t'as dit soit tu vas te faire voir..." a été suivie d'un long message d'excuses et d'une grosse remise en question pour lui sur ce qu'il a entendu tout au long de sa vie. De mon côté, plutôt que juste l'envoyer se faire voir, j'ai juste essayé de comprendre pourquoi il pensait comme çà et ce qui l'avait amené à le penser sans juger. Et çà a marché... Donc oui, des gens opposés en termes d'idées sur la vie peuvent parfaitement arriver à se comprendre et çà peut même amené à une remise en question si il y a ouverture des deux côtés et volonté d'écouter et de comprendre.

 

[skippy01]

Ton copain est exceptionnellement intelligent, presque n'importe qui d'autre que lui se serait braqué et conforté encore plus dans ses préjugés. Les gens réellement capables de remettre leurs certitudes en question sont une petite minorité, les autres préférant -consiemment ou non- minimiser ou ignorer les arguments qui ne vont pas dans leur sens, quelle que soit la manière d'aborder la discussion, donc sur ce coup-là, tu as eu le cul bordé de nouilles.

 

[Amanda0]

Je plussoie skippy, mais c'est mon chéri qui est parfait