Je dois être la seule, ( j'attends tomates et huées et assumerai chacunes d'entre elles
) mais j'ai été absolument dégoutée par
"Respire" -même si ce n'est pas vraiment ce a quoi je m'attendait au départ. Et comme a chaque fois que je déteste vraiment un film, genre gros coup de gueule, je serais incapable de le déconseiller.
Je précise que j'avais lu le bouquin avant et qu'il m'avait bien plu.
Premier point négatif : la forme. Trés maniériste, genre branlette esthétique. On dirait que Mélanie Laurent fout sa caméra n'importe où pour jouer à l'artiste (les plans sur la pieds de Charlie, les loooongs moments où elle reste seule à la fenêtre, ceux sur les oiseaux dans la brume ...), et monte des séquences avec des effets d'un cliché ahurissant (La passion en cours de philo, Charlie qui marche dans l'eau avec sa robe bleue, les filtres style Instagram pour les soirée d'ados, les ralentis mal utilisés). Pour le scénar, les changement sur les personnages, particulièrement celui de Sarah, ne m'ont pas convaincue
Aprés pour le côté positif, j'ai trouvé les actrices très bonnes, des dialogues vivants (rare, rare dans le cinéma français) et une musique particulièrement bien utilisée, créant une vraie tension.
Pour le fond ... eh ben, pour moi, c'est COMPLETEMENT bidon. Mélanie Laurent s'était pourtant choisi une base solide, mais elle joue des cartes faciles pour faire pleurer les chaumières. Elle mélange deux choses très différentes que sont les relations malsaines et le harcèlement scolaire, alors forcément, ça donne quelque chose de bancal, limite puant. Et rien de personnel envers
@Marie-Charlotte, mais j'ai trouvé l'article tellement loin de ce que j'ai vu à l'écran que je me suis demandée si on était allées voir le même film.
"Je suis sortie de la projection de Respire avec l’intime conviction que ce film devrait être montré à tou•te•s les collégien•ne•s et les lycéen•ne•s du pays, qu’il doit permettre des discussions ouvertes sur le harcèlement scolaire, permettre de comprendre comment et pourquoi les dynamiques de groupe ont tendance à profiter aux pervers•es narcissiques comme le personnage de Sarah.
(...)
Respire n’est qu’une fiction. Mais combien d’entre vous y reconnaîtront, au moins pour parties, leurs propres histoires ?"
Pour avoir vécu et des relation toxiques ET du harcèlement scolaire, oui, j'ai effectivement reconnu des choses. Dans la dépendance affective de Charlie, le fait de se laisser maltraiter, au nom de l'amour/l'amitié, de croire que personne ne pouvait comprendre, que je ne pourrais jamais vivre sans cette personne. Et à ce niveau là, ça m'a fait du bien d'entendre cette histoire, de réaliser combien j'ai été ridicule à l'époque, à me prendre pour une grande romantique incomprise alors que j'étais surtout une petite froussarde vaniteuse, qui se cachait derrière l’obsession par peur de se prendre quelques baffes, de sortir de sa coquille, d'évoluer. C'est ça, la claque que j'ai reçue, et j'ai été contente de la prendre en pleine poire.
Mais dans le harcèlement scolaire ? Non. Jusqu'ici, j'ai surtout vu (au travail, car je bosse en collège) et connu du harcèlement "à la tête", si tu vois ce que je veux dire. Il n'y pas de raisons autre pour justifier ces actes de violence physique et psychologique que le fait que tu existes et ne plaise pas a la brutasse de la classe et ses sbires. Evidemment, ça a sûrement des motivations plus profondes, liées a leur vécu familial ou que sais-je, mais quand tu es dedans, tu te te demandes surtout
"pourquoi moi ?". Si je ne me trompe, dans
"Respire", on est dans une logique de vengeance pour des faits concrets, dont Sarah comme Charlie sont conscientes et comprennent. Même si c'est une réactions d'une violence extrême, ça n'est pas gratuit. Je ne dis pas que c'est moins grave, que l'attitude de Sarah n'est pas condamnable mais je doute qu'on puisse parler ici de
"l'histoire courante et banale du harcèlement scolaire" (dans le sens ou ce n'est pas sa forme la plus fréquente) présentée dans un but de dénonciation/briser un tabou. Honnêtement, je pense que ça n'est pas le vrai sujet du film ,et
qu'il ne s'attarde pas suffisamment sur la question pour provoquer des débats, des discussions ouvertes ayant quelconque influence positive sur des lycéens/collégiens. En fait, la situation est tellement particulière que j'aurais presque peur qu'il soit mal perçu par les élèves. Au mieux, il excuse la harceleuse
, montre des images d'agressions perverses en tous genre, mais a aucun moment je n'ai vu expliqué ou même montré
"comment et pourquoi les dynamiques de groupe ont tendance à profiter aux pervers•es narcissiques comme le personnage de Sarah". On ne montre pas comment d'autres élève qui n'ont foncièrement rien contre la victime suivent, comment la chef les manipule, ou comment avoir bouc émissaire solidifie le groupe... ça n'analyse que dalle, donc ça n'a pas d'interêt.
Mais ce qui m'a le plus choqué dans l'article comme dans le film, c'est ce raisonnement-là :
"On ne comprend pas trop comment ni pourquoi cette belle amitié vacille, comment Charlie, l’amie fidèle et aimante se retrouve victime et bouc émissaire d’une Sarah qui montre en privé un visage si différent du masque qu’elle porte parfaitement aux yeux de tous les autres.
Pourquoi Charlie pardonne-t-elle constamment à son bourreau ? Elle aussi a de bonnes raisons."
Je dois vivre sur une autre planète. Il faudra qu'on m'explique comment une amitié aussi déséquilibrée, où une partie prends clairement l'autre pour son faire-valoir et décide a sa place
dès le début, et que l'autre accepte tout sans broncher, peut-être considérée comme
belle, ou assimiler l'attitude soumise de Charlie à de la
fidélité (j'appellerai plutôt ça possessivité, pour ma part, vu son attitude de mari jaloux ne serais-ce que pendant leurs premiéres vacances.) et à de l'
amour (fascination, obsession). Faut arrêter avec ça.
"De toute évidence, Charlie est fascinée par cette fille, sur qui sa jalousie est sublimée en inspiration.Sarah, c’est la fille qu’elle aimerait être… mais à défaut, elle se satisfait d’être son amie.". Là, je suis d'accord. Mais en quoi ce schéma est-il synonyme d'
une belle amitié, saine, admirable, un joli exemple de complicité entre ados ?
Je suis convaincue, pour ma part, que si les gens arrêtaient de croire que l'amour/amitié idéale est dans la passion, l’obsession, la fusion avec l'être aimé, quelqu'un qui décide pour toi et te prends en charge affectivement (ou l'inverse, d'ailleurs) on aurait réglé une grosse partie du problème. Je n'ai pas compris pourquoi Mélanie Laurent comme l'article tiennent absolument à nous faire croire que Charlie est LA lycéenne lambda, tranquillou, alors que le bouquin insiste justement sur sa complexité, sa façon particulière de voir la vie. Et même dans le film, je n'ai pas cru à la fille
"timide, discrète, plutôt introvertie (...) excellente élève, bien intégrée, bien entourée". Suis-je la seule à avoir été choquée, dès le début, par son apathie, par le côté très superficiel de son amitié avec Victoire, de combien elle a l'air de s'ennuyer avec elle, d'être là sans être là ? Je trouve dangereux que, dans le film (à l'aide de quelques petits arrangements chronologiques) comme l'article, on essaye de nous faire passer cette fille pour un personnage simplement gentil, positif, et sans gros problèmes dont l'existence est détruite par la seule intervention de la méchante
"perverse narcissique".
. Mélanie Laurent sous-exploite un personnage très ambigu, histoire de nous éviter des questions un peu dérangeantes sur le rapport extrêmement complexe entre les deux filles, et jouer sur la corde de la pitié. Plus côté dans les festivals, peut-être.
Je suis encore plus sceptique quand à la dernière phrase. Dirait-on d'un héroïnomane, d'un ludopathe ou d'un alcoolique qu'ils ont de
bonnes raisons de ne pas décrocher, de se détruire eux-mêmes et éventuellement son entourage avec ? Des circonstances atténuantes, peut-être. Des explications, à la rigueur.
Eh ben la dépendance affective, c'est pareil. On peut comprendre pourquoi quelq'un tombe dedans, mais je ne vois aucune
bonne raison de se complaire dans cette situation alors qu'on en souffre
. Je lis aussi :
"L’équipe pédagogique est d’ailleurs la grande absente de ce scénario : malgré de nombreuses scènes filmées dans l’enceinte de l’établissement, les adultes responsables, professeurs comme conseillers, brillent par leur absence. Que leur intervention ait été sollicitée ou non par Charlie ou sa mère, cela ne fait aucune différence : le harcèlement continue." N'est-ce pas plutôt qu'ils ne sont pas mentionnés parce que leur intervention n'est justement pas sollicitée ? Je rappelle que Charlie, tout le long de cette période, s'isole, n'en parle jamais à sa mère, refuse les mains tendues par ses amis d'avant. Est-il vraisemblable qu'une personne fait passer l'éventuel retour de l'être qui l’obsède avant toute dignité aille se plaindre à des représentants de l'autorité du mal qu'on lui fait, pour en finir avec elle/lui ? C'est comme ces femmes battues qui ne veulent pas porter plainte contre leur mari, même si elle bénéficient d'un placement en foyer. Des couples dysfonctionnels qui n'arrivent pas à divorcer même s'ils pourraient refaire leur vie.
. Oui, Sarah est coupable, elle connaît les insécurités de son amie mieux qu'elle-même, joue avec, en tire du pouvoir. Son attitude est absolument abjecte.
Mais je trouve complètement débile, voir dangereux de glorifier celle de Charlie (ou de sa mère) comme celle d'espèces de martyres bibliques sans jamais se poser la question de leur responsabilité, ce qui les motive, de ce qu'elles ont dans la tête et tout expliquer dans leur attitude soumise par des facteurs externes. Et pourtant, c'est exactement ce que fait le film.
Les gens qui s'engagent dans des relations malsaines et qui se complaisent dedans ne sont pas plus sains que les bourreaux. ça ne veut pas dire qu'ils l'ont bien cherché, que ce sont des êtres foncièrement mauvais,
mais que se laisser entraîner là-dedans au point de se perdre complètement n'est pas dû au hasard, a la poisse, au simple pouvoir de persuasion du manipulateur. Il faudrait réfléchir un peu peu à ça, aussi, plutôt que de faire de la pitié à trois sous qui n'aide personne. C'est as pleurnicher qu'il faut, mais réagir. Non, on ne choisit pas de tomber sur quelqu'un de mal intentionné qui exploite nos faiblesses. Mais si on le laisse faire sans réagir après avoir vu son vrai visage, je suis désolée, mais on est complice et quelque part, on y trouve son compte. C'est une des choses sur lesquelles le roman était particulièrement juste.
Je suis désolée pour ce looong pavé, peut-être un peu agressif par moment. Mais ces sujets me tiennent à cœur et effectivement, il faut en parler à haute voix, au cinéma comme ailleurs,
mais je n'ai aucune envie de crier au génie quand je le voit fait de façon aussi manichéenne et maladroite dans un film prétentieux.