@Lunafey Je suis tout à fait d'accord avec tout ce que tu as dit sur l'influence de la société patriarcale sur les hommes, sur toutes les injonctions à la virilité qui pèsent sur eux, et les dégats que ça peut faire. Je ne remets absolument pas ça en question, et j'ai déja constaté dans mon entourage à quel point ça pouvait être source de souffrance chez certains hommes.
Maintenant, il ne faut pas oublier que d'un point de vue global, sociétal, la domination masculine confère aux hommes le pouvoir dans la majorité des domaines de la société (la politique, les médias, l'espace public, mais aussi le domaine privé, et j'en passe), et ce qui en résulte, c'est une société façonnée selon un regard masculin, hétéro, blanc, cis etc.
Alors quand on est un homme (j'entend bien "homme cis" à chaque fois que je mentionne les hommes dans ce paragraphe), oui, on est aussi victime dans une certaine mesure de la société patriarcale, mais on naît aussi avec un sacré paquet de privilèges (le privilège par exemple de ne pas être sexualisé sur la base de son genre, le privilège de s'approprier le corps des femmes, le privilège de commettre des viols sans être trop inquiété, le privilège d'écrire en majorité l'histoire telle qu'on l'étudie à l'école, et j'en passe).
Et je pense que si le féminisme a aussi mauvaise réputation, c'est parce que les hommes sont quelque part conscients, sans forcément s'en rendre compte, des privilèges que cette société leur confère (et c'est aussi selon moi parce que le féminisme le plus mediatisé est le féminisme blanc, bourgeois, cis, hétéro, et donc un féminisme pas très inclusif et ouvert, mais bon ce n'est pas là le propos). Et c'est pourquoi autant d'hommes s'acharnent à ne pas s'intéresser et à ne pas comprendre le féminisme et/ou à véhiculer des clichés sur le féminisme pour s'assurer que les femmes "restent à leur place". Un exemple ? L'insulte suprême qu'on balance à tord et à travers aux féministes ? "Moche et mal baisée" = en gros "reste à ta place de chose uniquement bonne à être regardée et laisse moi dominer".
Après, évidemment, je ne considère pas que par nature les hommes sont tous voués à être contre le féminisme et qu'on doit se battre contre eux. C'est pas du tout mon propos et j'espère que c'est pas comme ça qu'il sera interprété. Je sais bien qu'il existe pleins d'hommes favorables au féminisme, et ça ne peut qu'être une bonne chose pour nous parce que ça signifie moins de batons dans les roues, et évidemment pour eux également comme tu l'as bien rappelé.
Mais je pense que la lutte feministe ne peut pas se faire
par des hommes, mais seulement, au mieux,
avec, tout simplement parce que leurs privilèges masculins ne leur permettent pas de s'exprimer avec assez d'objectivité sur ces sujets.
Après, le fait qu'un homme se déclare féministe ne me pose pas un gros problème en soi, parce que pour certains, être féministe, ça va juste signifier agir au maximum dans son champ d'action, sans jamais s'exprimer à la place des concernés.
Mais c'est vrai que j'aurais tendance à me méfier, parce que ça peut vite se transformer en mansplaining. Et ça arrive (beaucoup trop) souvent.