Bonjour à tous et à toutes,
Merci d’avoir lancé cet appel hyper important. Merci pour tout le boulot de la rédac. Bravo et merci aux Madmoizelles qui témoignent pour le courage avec lequel vous replongez dans ces souvenirs difficiles et vous arrivez à les partager pour qu’on se sente chacune moins seule. Bravo aussi pour certaines réactions inspirantes ! Et celles qui « regrettent » de ne pas avoir « bien réagi », sachez que c’est normal d’être sidérée, de ne pas savoir quoi dire ou quoi faire, ces situations semblent tellement irréelles, tellement impossibles quand elles arrivent. Ne regrettez jamais vos réactions, elles ne sont pas « bonnes » ou « mauvaises », elles sont ce qu’elles ont été, parce que vous étiez la personne que vous étiez au moment où ce que vous avez vécu est arrivé. Je pense que c’est avec le temps et avec l’expérience (mon Dieu c’est terrible à dire) qu’on apprend à se blinder, à reconnaitre les situations anormales et à réagir de plus en plus automatiquement. Pour ma part je vais vous raconter des expériences de « jeunesse », où j’ai réagi mollement, et des expériences plus récentes où j’ai commencé à être plus ferme.
Quand j’essaie de faire le bilan, j’ai eu un ou deux « compliments déplacés » à base de « t’es charmante », mais le mec est juste passé et ne m’a pas laissé le temps de réagir.
Une autre fois dans un tram, un mec m’a tapé la discute de manière assez insistante, il voulait mon numéro, j’ai tenu bon en refusant, mais il a fallut argumenter, me justifier en disant que j’avais déjà un copain… alors que je n’étais bien sûr pas du tout intéressée. C’est vraiment difficile de réagir quand le mec reste poli MAIS qu’il est insistant et qu’on se sent mal, qu’on n’a pas envie de discuter.
Je cache ce qui va suivre car je n’hésiterai pas à employer des mots forts pour exprimer le dégout et la rage que j’ai ressenti quand deux autres expérience me sont arrivées.
Une autre fois, un homme très imposant s’est assis à coté de moi en attendant le métro. Il sentait fort l’alcool. Il s’est mis à fumer une cigarette et m’a demandé « ça va ? ». J’étais pétrifiée, mon cœur s’est mis à battre très fort. Je sentais son regard me détailler des pieds à la tête. Il m’a demandé « pourquoi tu réponds pas ? » J’ai répondu du tac au tac, en le regardant droit dans les yeux et en me levant « parce que j’ai pas envie de parler. » « ah, t’as pas envie de parler ? » et j’ai sauté dans le métro. En relisant mon paragraphe je me rends compte que ce n’était pas tellement les mots qui importaient (il ne m’a pas insultée), mais son regard, sa façon de se mettre trop près de moi, de me faire sentir qu’il était plus fort que moi.
La fois où j’ai réagi quand ce n’est pas à moi que c’est arrivé est plus marrante : je marche dans la rue et je vois devant moi deux mecs debout à l’entrée d’un bar, avec des bières, en costards, mode « afterwork », qui s’amusent à détailler chaque nana qui passe. La fille devant moi est en jupe, talons, ils matent son cul et la siffle. Ils sont trop occupé à regarder ses fesses qui s’éloignent pour me voir passer devant eux, du coup je me retourne et leur lance le regard le plus dédaigneux, le plus méprisant possible, genre « seriously ?! », et j’ai vu leur réaction en deux temps : la stupéfaction, puis les sourcils qui se froncent : j’ai vu la bouche d’un des deux s’ouvrir, sans doute pour m’insulter, mais j’ai marché très vite sans me retourner.
Il n’y pas longtemps aussi, j’entends un homme et une femme qui s’engueulent dans le métro, elle qui dit « lache moi, sérieux ! », et sans réfléchir je me retrouve devant le mec qui fait deux têtes de plus que moi à demander « Qu’est ce qui se passe ? » (je crois que j’ai été aussi étonnée que lui). Mais là, truc très bizarre, ils se sont mis à se marrer tous les deux, la fille aussi, et à me dire « non non c’est bon tout va bien ». Donc je pense que c’était un délire entre eux. Je sais pas trop, j’ai pas voulu insister.
Voilà en gros mes anecdotes les plus marquantes. Je n’en ai pas beaucoup d’autre, fort heureusement. Je pense que plus ça va, moins j’hésite à réagir sérieusement, à ne pas rentrer dans le jeu en souriant, ou à ne pas ignorer, quitte à refroidir le mec par un regard ou une phrase simple, que ça soit pour moi ou pour les autres. Mais j’avoue que je fuis aussi sec, le coeur qui cogne dans les oreilles.
J'avoue que je ne suis pas à l'aise quand je suis en jupe, et je n'en met jamais au dessus du genoux sans collants. J'adapte aussi mon comportement en allant très peu à certains endroits à certaines heures. Ce n'est pas normal, je devrais avoir le droit de circuler partout, tout le temps, c'est le droit de tout citoyen/ne. Après, je pense que mec comme fille, on peut se faire potentiellement agresser, ce n'est pas un problème strictement féminin (contrairement au harcèlement de rue?). C'est juste que nous les filles, on a, en plus de la menace vol/agression, la menace de viol qui est latente.
Pour finir sur une note plus positive, essayons de ne pas avoir peur et de garder confiance en l'humanité. Il y a des cons et des connes partout, et il y a des êtres merveilleux, hommes comme femmes.
Beaucoup de pensées et d’amour à toutes et tous.