Cet article m'a tordu le bide...
J'ai été victime de harcèlement scolaire pendant cinq ans, du CM1 à la Quatrième, parce que j'avais deux ans d'avance et que j'étais "inadaptée". Des moqueries, des insultes, des bousculades, des croche-patte, un ostracisme permanent... Rien de "violent", mais une accumulation suffisante pour détruire une estime de moi déjà fragile, déclencher une phobie scolaire et provoquer ma première dépression alors que j'avais dix ans.
Ce que j'ai vécu n'était pas du bizutage, mais cela m'a poussée très jeune à me révolter contre toutes les formes d'injustice, et en particulier celles qui consistent à maltraiter des personnes (ou des animaux) considérées comme "faibles". Or le bizutage, à mon sens, c'est ça: des gens plus vieux, plus avancés dans leurs études, qui profitent de leur pseudo-autorité pour en maltraiter de plus jeunes qui se laissent faire pour pouvoir s'intégrer.
Par la suite, je suis partie à Louvain-la-Neuve en Belgique pour y faire des études vétérinaires. Le "baptême" tel qu'il est décrit dans la seconde partie de l'émission y est exactement le même que celui qu'a vécu et fait vivre le témoin. Mais je trouve qu'il n'a pas conscience de la gravité de ces actes, et que ce qu'il dépeint comme "bon enfant" est potentiellement destructeur. J'ai vu les "Bleu-es" enchaîner les "gueule en terre", se faire insulter, être réduit-es en esclavage etc. pendant six semaines et ça m'a ramenée direct à mon enfance. Les humiliations peuvent marquer autant que les coups, et se faire traiter de sous-merde ou servir de repose-pieds à quelqu'un, pour moi, c'est horrible et ça devrait être interdit.
Je pense que le bizutage tel qu'il existe aujourd'hui gagnerait à être remplacé par une sorte d'"initiation" en rapport avec la filière d'études par exemple, ou en mode Intervilles. Personnellement, ça m'aurait plutôt fait rire de devoir faire des noeuds avec des intestins de boeuf ou autre puisque j'étais en médecine vétérinaire, ou alors de devoir me rouler dans la boue ou ramper sous des planches. En revanche, boire jusqu'à risquer le coma ou devoir mimer une fellation, ça, jamais (et pourtant je ne suis jamais la dernière à lever le coude et pas vraiment une "sainte-nitouche").