Y a-t-il une écriture féminine ?

[Reiyel]

Mais si c'est inconscient, tu penses qu'il y a possibilité de s'en tirer ? D'autant que c'est quelque chose qui peut se faire de la même façon, avec plus ou moins de lucidité, au moment de la lecture...

Quelle que soit notre écriture, je ne suis pas sûre qu'on puisse la changer. Je pense que c'est une question plus générale là, pas seulement au niveau de l'écriture féminine.
Je pense qu'on peut travailler son style, évidemment, mais changer de style?
Enfin je sais pas.

 

[Reiyel]

Juste, pour celles que ça intéresse, il y a un paragraphe là-dessus à la fin de L'Histoire des femmes en france (XIX-XXème) de M. Zancarini-Fournel, et des ouvrages de bibliographie.
Evidemment c'est une approche historique et non littéraire.

Didier B., L'Ecriture-femme, PUF, 1981
Stistrup-Jensen M., "La Notion de nature dans les théories de l'écriture-féminine", CLIO, Histoire, femmes et sociétés, n°11, 2000, p. 165-177 (c'est une revue d'histoire des femmes, ça se trouve dans les BU normalement)
Naudier D., "L'Ecriture femme, une innovation esthétique emblématique", Sociétés contemporaines, 2002, n°44, p. 57-73

 

[Reiyel]

Un résumé peu résumé du manuel (c'est chiant dans les manuels tout est important :-/)


Après 1970, revendication d'une "écriture féminine" (à l'opposé de la stigmatisation des femmes de lettres au XIXème). Notion lancée en 75 par Hélène Cixous qui publie La Jeune Née en collaboration avec Catherine Clément.
Figures: Annie Leclerc, Annie Ernaux, Monique Wittig, Lucie Irrigaray, Hélène Cixous.
Maison d'édition: Des Femmes
Revue: Sorcières
Appui universitaire: le département d'études féminines à Paris 8.


Caractéristiques de l'écriture féminine pour H. Cixous:
-oralisation de la langue
-privilège du corps (jonction corps-langage)
-dépersonnalisation qui permet l'ouverture aux autres (importance de l'expérience de la maternité qui permet de vivre ce qu'elle nomme le 'clivage' -je comprends pas très bien ça alors je recopie bêtement là)
-> un paradoxe: refus de l'identité à soi alors qu'est avancée une affirmation du féminin qui se confond pour Cixous avec le maternel -> la mère = le centre et la figure idéeale de LA femme

1974, "L'écriture a-t-elle un sexe", question posée par La Quinzaine littéraire. Dénonciation de l'oppression masculine et éloge de la différence sexuée qui s'énonce en 'paroles de femmes'.
Cette prise de position esthétique (aussi celle de Cixous) est contemporaine d'un débat dans le mouvement féministe: partisanes d'une différence/partisanes d'un égalitarisme refusant l'idée de spécificité féminine

Le "féminin" devient une thématique littéraire subversive, une littérature "insurgée" (terme de Cixous) -> arme pour se positionner dans l'avant-garde littéraire et philosophique


Ce courant dure environ 10 ans, décline au début des années 80. Mais renaît aux Etats-Unis avec l'engoument, dans les Gender Studies et Cultural studies pour 'The French Feminism'

 

[eclairauchocolat]

J'ai justement étudié ça cette année en théories littéraire. D'ailleurs à mon partiel j'ai même eu droit à "Existe t il une lecture féminine?".
Je pense sincèrement que tout dépend du ressenti du lecteur et de la façon d'écrire.
Certaines auteurs (auteures?) comme George Eliot ou Charlotte Brontë ont essayé d'écrire comme des hommes mais d'après Virginia Woolf dans son essai 'A Room of one's own", elles n'ont pas réussi.

D'ailleurs en cours, on a fait un petit jeu. On avait un corpus de textes à lire, sans titres ni noms d'auteurs et on devait deviner si c'était un homme ou une femme qui avait écrit tel ou tel texte.
Et ben le 1er texte était très dur, il n'y avait pas beaucoup d'émotions, que des faits. On a toutes (ou presque) répondu que c'était écrit par un homme. Finalement, c'était de Jane Austen...

En fait c'est surtout les critiques féministes françaises qui pensent qu'il existe une écriture féminine (et en particulier Cixous, comme disait Reiyel) avec des structures grammaticales plus "vagues", moins rigoureuses et avec plus de jeux de mots.

 

[Ethyline]

J'ai lu six livres d'une série (je crois que la série [plus sa série parallèle] compte quinze livres), dont le prénom de l'auteur était "Robin", et j'étais vraiment, mais vraiment persuadée que c'était un homme qu'il l'avait écrit. Ca raconte des histoires guerrières, et c'est plus "glauque" qu'esthétique. Et en tombant sur une critique, je me suis rendue compte que c'était écrit par une femme. J'ai continué à lire la série, et finalement ça ne m'étonne pas. Et ça n'a pas modifié mon regard sur l'oeuvre. Donc en fait non, je ne pense vraiment pas qu'il existe d'écriture féminine. Après j'ai lu "Roméo et Juliette" de Shakespeare, et ça côté de ça, c'est un truc de fillettes .