Y a-t-il une écriture féminine ?

16 Septembre 2005
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Paris
Pour C. Mc Cullers, déjà il faut savoir que j'ai lu que Le coeur... et L'horloge sans aiguilles. Et dans le deuxième j'ai été un peu déçue par ce qui m'a plu dans le premier et que je n'ai pas retrouvé, justement ce à quoi je faisais référence. J'ai un peu de mal à en parler parce que je sais pas si c'est pas juste un sentiment à la lecture, comme ça, je suis pas sûre d'avoir de quoi répondre.
Quoiqu'il en soit elle me donne l'impression, quand elle narre les trucs, d'avoir une distance qui fait d'une certaine façon qu'elle ne part de rien. C'est peu clair, je sais pas si tu vois ce que je veux dire, mais il me semble que ça pourrait rejoindre ton idée de naïveté (et je crois bien avoir eu le même terme après l'avoir lu !). Bref contrairement à ce qui serait une écriture féminine qui peut-être même en narrant des faits de façon tout à fait extérieure à l'intrigue et aux personnages, garderait quelque chose marqué par, disons, une référence implicite à des grands principes, au grand tout de la vie, aux sentiments universels, même si c'est sans jamais le dire.
Tandis que dans ce roman, ça m'a fait l'effet inverse (et j'adore ça !), autrement dit qu'il n'a pas l'air d'y avoir de référent implicite qui serait la base d'un jugement de l'intrigue (supposé provoquer tel ou tel effet), mais qu'il y a quelque chose qui fait que c'est seulement le texte qui compte, rien derrière, tout a l'air très naïf au début (j'avais fini par me demander si c'était pas C. Mc Cullers qui l'était) puis on découvre que c'est pas le cas du tout.
Ca doit être du charabia mais c'est parce que c'est déjà comme ça dans ma tête.


Ruby a dit :
(Finalement, je remarque que toutes, plus ou moins, on reconnaît plus la part "culturelle", donc constructionniste, me trompe-je?)

Ben, moi, j'ai beau avoir dit le contraire tout à l'heure par rapport à l'origine, j'ai l'impression que non, puisque je n'arrive pas vraiment trouver une femme aussi masculine qu'un homme, tandis que pour l'inverse ça va sans problème... Il faut dire aussi que j'ai pas lu des masses de femmes.
Mais c'est vrai que d'une certaine façon, on peut peut-être voir ça aussi culturellement, par rapport à ce à quoi faisait référence Kenza tout à l'heure (pas de femmes pendant longtemps). Je me dis que c'est peut-être à cause de ça : quoiqu'elles fassent les femmes débarquent de toute façon tard par rapport aux hommes, et il y a peut-être quelque chose qui fait que, même en cherchant à avoir une écriture masculine, elles restent obnubilées (malgré elles) par ce par rapport à quoi elles écrivent (= les hommes) et écrivent donc différemment de ça.
Ce qui expliquerait qu'il n'y ait pas (enfin je n'en connais pas) de femmes comme Orwell ou Mirbeau, qui selon moi sont des écritures fortes mais exemptes de quelque chose qui n'est jamais dit... alors c'est pas facile à expliquer. Comme dit Nephtys, des écritures qui sont l'inverse de ce qui est "teinté de sentiments" (mais pas forcément mièvre), une teinte, justement : quelque chose qui est ailleurs... ahah. Alors que là il n'y aurait rien : rien que le texte, ses idées, sa franchise et sa force.

J'aimerais bien trouver deux textes du même style (dans l'idée), de la même époque et traitant plus ou moins du même sujet, mais écrits par un homme et une femme, pour comparer.
 
18 Mars 2006
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Paris
miss-ter a dit :
Une femme qui aurait une écriture masculine alors aurait forcément un problème avec sa féminité ? Là j'avoue que je suis pas d'accord, bien sûr j'ai pas d'exemple étant donné que je sais pas comment les écrivain se sentent avec leur féminité, mais je pense pas autant que toi que l'écriture aille nécessairement de pair avec la façon dont on se sent par rapport à tout ça.

C'est pas une question de 'problème avec sa féminité', mais je sais pas, par exemple je ne me sens pas femme en priorité, si on me demandait de définir ce que je suis ça serait loin d'être la première chose que je répondrais. Pourtant j'ai pas non plus l'impression d'avoir un problème avec ma féminité.
Ce que je veux dire c'est juste que la féminité c'est culturel, et du coup il y a énormément de façon de la vivre, des degrés différents, et que ça influence ton écriture. Après j'ai un peu du mal à percevoir ce que tu appelles 'écriture masculine' donc bon.
Pour moi on ne peut pas 'avoir un problème avec sa féminité' en fait. A la limite on peut avoir un problème avec 'ce que la société appelle féminité' mais à mon sens la 'féminité' en soi ça ne veut rien dire, ou plutôt ça veut dire environ 3 milliards de choses.
J'dois vraiment pas être claire...
 
A

AnonymousUser

Guest
Kenza a dit :

Et comme dit Ruby je crois, je déteste cette distinction entre artistes hommes/femmes, et je pousse des grands cris à chaque fois que je vois auteur ortographié avec un e. C'est stigmatiser la part des femmes, désolée de jouer la chienne de garde, et c'est stupide.
J'aime pas du tout non plus le mot auteur avec un e :confused:
 
16 Septembre 2005
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Paris
Reiyel a dit :
C'est pas une question de 'problème avec sa féminité', mais je sais pas, par exemple je ne me sens pas femme en priorité, si on me demandait de définir ce que je suis ça serait loin d'être la première chose que je répondrais. Pourtant j'ai pas non plus l'impression d'avoir un problème avec ma féminité.
Ce que je veux dire c'est juste que la féminité c'est culturel, et du coup il y a énormément de façon de la vivre, des degrés différents, et que ça influence ton écriture. Après j'ai un peu du mal à percevoir ce que tu appelles 'écriture masculine' donc bon.
Pour moi on ne peut pas 'avoir un problème avec sa féminité' en fait. A la limite on peut avoir un problème avec 'ce que la société appelle féminité' mais à mon sens la 'féminité' en soi ça ne veut rien dire, ou plutôt ça veut dire environ 3 milliards de choses.
J'dois vraiment pas être claire...

Oui, je vois ce que tu veux dire, mais j'ai pas l'impression que la féminité, quelle que soit la façon dont on la vit (comme tu dis, que ça ait une importance ou pas), soit la cause du fait que l'écriture soit féminine. Par exemple je me dis que même quelqu'un qui ne se sentirait pas femme en priorité pourrait avoir une écriture très féminine. C'est pour ça que j'étais pas d'accord avec Petoncule, ni avec cette phrase "la féminité c'est culturel, et du coup il y a énormément de façon de la vivre, des degrés différents, et que ça influence ton écriture".
 
23 Août 2006
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Paris
Ca m'arrive souvent de m'arrêter au milieu d'un livre en réalisant que je n'ai pas lu le nom de l'auteur, et dans ces cas-là je devine souvent si c'est un homme ou une femme. Je ne sais pas si ça tient à des effets de style ou autre, mais je ne pense pas qu'il y ait des "critères" d'écritures féminines ou masculines. Une écriture brutale, pour moi, n'a rien de spécifiquement masculin. En fait je n'arrive vraiment pas à expliquer pourquoi c'est évident pour moi que tel livre à été écrit par un homme ou par une femme. Peut-être que je lis différemment le livre en fonction du sexe de l'auteur, même si ça n'explique pas pourquoi j'arrive la plupart du temps à le deviner. C'est peut-être plus en fonction des enjeux du livre que des effets de style.
 
18 Mars 2006
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miss-ter a dit :
Oui, je vois ce que tu veux dire, mais j'ai pas l'impression que la féminité, quelle que soit la façon dont on la vit (comme tu dis, que ça ait une importance ou pas), soit la cause du fait que l'écriture soit féminine. Par exemple je me dis que même quelqu'un qui ne se sentirait pas femme en priorité pourrait avoir une écriture très féminine. C'est pour ça que j'étais pas d'accord avec Petoncule, ni avec cette phrase "la féminité c'est culturel, et du coup il y a énormément de façon de la vivre, des degrés différents, et que ça influence ton écriture".

En même temps j'arrive pas à comprendre vraiment ce que vous appelez écriture féminine et écriture masculine alors :P
 
A

AnonymousUser

Guest
Je vais essayer de dire à ma manière ce que Ruby dit, que je pense aussi, du moins je crois, enfin, si j'ai bien compris ! ... Presque pareil.
Je pense que l'écriture peut être féministe, bien entendu ; comme ce qu'écrivent Simone de Beauvoir, Virginia Woolf, voire Jane Austen même, je manque d'exemple, mais faire passer les revendications ou tout simplement dénoncer par le texte, c'est facile, voilà. Après, si on sort du contenu pour voir l'écriture, je ne sais pas très bien, je reste indécise : je pense que bien entendu la femme a vécu ces petites choses que l'homme ne vit pas, les seins qui apparaissent, les règles, tout ça ... Mais je crois que pour l'essentiel, c'est quand même des choses qui ne sont pas dues à son caractère de femme, mais à ce qu'on en fait ; je veux dire, s'il y a une écriture féminine, parfois, une écriture qui sonne "comme celle d'une femme" parce que c'est fleuri, poètique d'une certaine façon, tout ça, je trouve que c'est plutôt à cause des clichés dans lesquels on emprisonne la femme. Dans la mentalité courante, une femme, c'est poètique, c'est gentil, c'est doux, c'est tendre ; une petite fille, ça joue à la poupée, ça porte du rose et ça écoute Illona - c'est décidé par la societé, pas franchement par la génétique ... Je trouve alors que si une écriture est féminine, c'est parce qu'elle répond aux critères que la societé a fixé et que l'auteure, en en étant plus ou moins consciente, suit.
Je ne sais pas si c'est très clair ou très logique, ce que je dis ...
 
16 Septembre 2005
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Paris
Mais si c'est inconscient, tu penses qu'il y a possibilité de s'en tirer ? D'autant que c'est quelque chose qui peut se faire de la même façon, avec plus ou moins de lucidité, au moment de la lecture...
 
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AnonymousUser

Guest
miss-ter a dit :
Mais si c'est inconscient, tu penses qu'il y a pissibilité de s'en tirer ? D'autant que c'est quelque chose qui peut se faire de la même façon, avec plus ou moins de lucidité, au moment de la lecture...
Je pense qu'on y échappe plus ou moins suivant notre vécu ; les auteures d'aujourd'hui ou demain ont sans doute plus de chance d'y échapper que les auteures d'hier : celles d'hier écrivaient encore à l'heure où les filles ne pouvaient pas porter de pantalons, où elles allaient dans des écoles de filles et fréquentaient des filles uniquement ; bref, c'est l'évolution de la societé qui fait évoquer le statut de la femme et qui lui permet alors de sortir de cette écriture "type" qui est certes féminine mais construite par la societé. Je ne sais pas si j'explique très clairement.
 
16 Septembre 2005
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Paris
Ambre : qui a dit qu'il fallait ? je mets en question la possibilité de le faire uniquement, pas la nécessité.

Copenhague : je suis d'accord avec toi, n'empêche qu'il me reste cette interrogation, même aujourd'hui. Je sais bien qu'on ne juge pas une femme qui écrit de la même façon qu'on aurait pu la juger par le passé. Disons que c'est nettement moins radical, mais je me demande s'il ne reste pas quelque chose, de beaucoup plus sournois, beaucoup moins évident que de considérer que les femmes n'écrivent que des trucs niais sur l'amour. Parce que par écriture féminine je n'entends en fait pas seulement style épuré et poésie à tout bout de champ. Le problème, vous l'aurez compris, c'est que je ne sais pas définir le truc, puisque je ne suis pas tout à fait sûre de penser qu'il existe ;)

(Je précise, vu qu'il semble y avoir confusion, que je ne dis pas que tout le monde femme ou homme doit écrire comme les hommes parce qu'il n'y a que ça de bon, j'ai seulement le sentiment comme je l'ai dit au début qu'on considère beaucoup plus souvent que les hommes ont une écriture féminine que l'inverse, et je me demande simplement si cet inverse est possible aussi évident que ça puisse paraître. Possible aussi bien au niveau de l'écriture que de la réception...)
 
18 Septembre 2005
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Grenoble
miss-ter a dit :
Ambre : qui a dit qu'il fallait ? je mets en question la possibilité de le faire uniquement, pas la nécessité.
Dac.

miss-ter a dit :
(Je précise, vu qu'il semble y avoir confusion, que je ne dis pas que tout le monde femme ou homme doit écrire comme les hommes parce qu'il n'y a que ça de bon, j'ai seulement le sentiment comme je l'ai dit au début qu'on considère beaucoup plus souvent que les hommes ont une écriture féminine que l'inverse, et je me demande simplement si cet inverse est possible aussi évident que ça puisse paraître. Possible aussi bien au niveau de l'écriture que de la réception...)
C'est ça que je n'avais pas compris
 

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