Mathilde, infirmière en psychiatrie, nous raconte son quotidien fait d'empathie et de soins

24 Août 2011
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Dijon
ça me fait mal également de voir que certaines ont autant souffert de leur passage en psychiatrie. Personnellement, dans la plupart des services où j'ai travaillé les équipes respectaient les patients et étaient bienveillantes. Mais je sais que les services où ce n'est pas le cas existent (j'ai connu, dans une autre ville, un service où les infirmières restaient planquées une bonne partie de la journée en salle de pause, laissant les patients à eux-mêmes, c'est le seul).
N'oublions pas que parfois, une décision prise pour le bien du patient peut être vécue extrêmement douloureusement (on m'a déjà qualifiée de "sans coeur" car j'ai refusé de laisser partir un patient le lendemain d'une TS grave... c'était pour le protéger car on sait que le risque de récidive est majeur dans les jours suivant le geste mais lui ne le voyait pas de cet oeil). Et parfois on s'exprime de façon maladroite, comme tous les êtres humains en fait.

(Par rapport aux douleurs neuropathiques et troubles apparentés, je suis d'accord car beaucoup de médecins confondent "on a rien trouvé sur les examens" et "c'est dans la tête", et nous envoient les patients de manière assez brutale. ça me met hors de moi)

En tout cas bravo à la Madz pour ce chouette témoignage !!
 
Dernière édition :
22 Mai 2015
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Paris
Ayant moi aussi fait des séjours en psychiatrie pour dépression/psychose, je suis un peu amer aussi de l'idée de "dédiaboliser" la profession. Oui, la Madz qui témoigne a l'air d'une infirmière qui fait bien son boulot, et j'en ai connu, des infirmier.es cools qui ont aidé à ce que j'aille mieux... Mais je me souviens aussi d'infirmier.es qui en avaient pas deux grammes, d'empathie, pour qui tant qu'on souffrait en silence tout allait bien, mais dès qu'on sortait du rang et qu'on "dérangeait" trop, on devenait des poids à gérer, et plus des personnes. Et encore, je faisais partie des patient.es "léger.es", j'ai vu et entendu bien pire pour celleux qui étaient dans un état pire que le mien. Donc oui, c'est bien d'avoir des personnes comme la Madz dans le métier, mais ça veut pas dire qu'on se prend pas des violences par ses collègues.

Aussi, conseil aux personnes qui comptent se lancer dans le métier : une grosse partie des personnes trans ont eu des problèmes psys dans leur vie, donc de bonne chance que vous en croisiez dans votre carrière. Du coup, renseignez-vous, éduquez-vous sur le sujet, ça ne pourra qu'aider vos patient.es.
 
30 Janvier 2015
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Pour dédiaboliser la psychiatrie, il faudrait encore qu'elle cesse de maltraiter les gens qui y passent. Je n'ai rien contre le témoignage de cette infirmière, mais je grince un peu des dents sur la partie sur l'isolement, comme s'il s'agissait de quelque chose de normal et souhaitable, fût-ce en psychiatrie. Un rapport du Contrôleur des lieux de privation parle d'ailleurs des pratiques d'isolement et contention comme thérapeutique... pour les soignants, pas pour les patients. Parce qu'il faut l'admettre, c'est utilisé comme punition (et une bonne partie de la psychiatrie repose sur des soins punitifs, en témoigne la persistance de la pratique du pyjama dans certaines unités, alors qu'il a été démontré qu'elle n'a aucun effet thérapeutique).
 
30 Janvier 2015
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@Barbe Bleue Basiquement, ça consiste à t'interdire de t'habiller et être obligé-e de rester en pyjama (généralement fourni par l'hôpital) durant plusieurs jours, pour te "punir" d'un de tes comportements. À savoir que les punitions arrivent régulièrement lorsqu'on a le malheur de rechuter dans sa maladie, ce qui est tout de même sacrément ironique. Ça n'a aucun intérêt thérapeutique, et ça tient plus du dressage qu'autre chose.
 
16 Octobre 2015
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@Salpêtre Oui je parle de la chambre protégée de manière décomplexée car cela fait partie de notre quotidien : comme je le dis dans le témoignage, cela nous demande de faire des soins qui nous prennent beaucoup de temps. En aucun cas je ne généralise son utilisation, ni ne dit que c'est un passage "obligé" lors d'une hospitalisation.
Pour ce qui est de ces histoires de "punition", je me demande où tu as bien pu être hospitalisée parce que, j'ai beau travailler dans 23 services différents je n'ai jamais assisté à ce genre de chose. Comme tu le dis, nous sommes désormais soumis à rendre des comptes sur l'utilisation de l'isolement (et c'est une très bonne chose !), du moins les médecins car la mise en chambre protégée est une prescription MÉDICALE et non une décision qui dépend de l'équipe paramédicale.
Après, la mise en isolement peut bien entendu être vécue comme une punition par le patient mais l'intention n'est jamais JAMAIS punitive ! Il faut aussi se souvenir que nous travaillons avec des personnes qui n'ont pas toujours conscience de leurs troubles (c'est même une partie de la définition de la psychose), autant dire qu'ils ne comprennent pas toujours l'intérêt de leurs soins puisque "ils ne sont pas malades".
Nous sommes soignants pour des raisons qui nous sont propres bien sûr mais elles sont je pense majoritairement bienveillantes : prendre soin, l'expression en elle-même est assez parlante. J'ai l'impression que vous dessinez un portrait de soignants sadiques et à la recherche du pouvoir sur l'autre et ça m'attriste de voir l'image véhiculée par notre métier.
Alors bien sûr des abus existent et c'est bien dommage, mais c'est pas pour autant qu'on ne s'en offusque pas : il y a quelques temps des soignants de mon hôpital sont venu à un comité de direction avec des photos et des objets issus des chambres protégées pour s'opposer aux conditions dégradantes d'hospitalisation que subissent certains patients (dans des services vétustes par exemple). Et j'ai moi-même, hier soir, passé plus d'une heure à me démener avec médecin de garde, cadre de permanence et administrateur de garde pour faire sortir un patient de chambre protégée car il n'y avait pas sa place. Avec succès :)
 
16 Octobre 2015
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Ton expérience m'intéresse :)
Je suis étudiante en soins infirmiers, et mon prochain stage aura lieu dans une clinique psy post-cure. Que peux-tu me dire des soins relationnels en psy ? Et du rôle infirmier dans les ateliers ?
Merci d'avance :)

Difficile pour moi de te répondre car tous les services ne fonctionnent pas de la même façon mais ce que je peux te dire c'est que ton rôle infirmier dans les ateliers n'est pas de faire des activités au hasard, tu travailles avec des objectifs bien précis notamment en fonction de la problématique du patient (addicto à priori pour ce type de lieu). Les soins relationnels sont au premier plan en psychiatrie (du moins quand les autres soins nous en laisse le temps...), mais les entretiens infirmiers ne sont pas fait au hasard et demandent quelques connaissances. Je suis sûre que tu auras l'occasion de voir ça avec les infirmiers qui t'encadreront. :d
Bon courage pour ton stage !
 
30 Janvier 2015
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@Hysteriafol Je ne parle pas de mon expérience personnelle de la psychiatrie. En revanche, faire comme si les abus en psychiatrie n'étaient le fait que de quelques individus isolés, c'est passer à côté du problème. C'est en juin 2016 que le Comité contre la torture des Nations Unies a alerté sur la situation des hôpitaux psychiatriques en France – je doute qu'en un an tout ait radicalement changé. C'est l'année dernière également qu'un très long rapport est sorti sur la contention et l'isolement en France, et il n'est clairement pas tendre avec les pratiques actuelles. Il ne s'agit pas de mon cas. Il s'agit d'une situation globale sur laquelle j'aimerais qu'on ouvre enfin les yeux. Je ne souhaite pas dédiaboliser la psychiatrie à cause de ce genre de choses, et du fait qu'on nous réplique toujours que ce sont des cas isolés.

Je n'en veux pas aux gens qui travaillent en psychiatrie, dont la plupart ne peuvent pas même prendre de décisions ni s'élever contre ces pratiques. Ce n'est vraiment pas le but de mon intervention, et ce serait contreproductif.
 
30 Janvier 2015
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@Nyxi Si jamais ce n'était pas clair, je n'essayais pas de dire autre chose que ce que tu as dit. Dans le deuxième lien que j'ai fourni, on aborde justement le manque de moyens, le sentiment par les soignant-e-s d'être abandonné-e-s par le gouvernement et les dérives sécuritaires qui transforment encore plus les hôpitaux psychiatriques en simili-prisons et lieux non plus de soins mais d'enfermement, de punition. Je pense que la plupart des gens qui bossent en psychiatrie ne sont ni sadiques, ni flemmards (c'est vraiment pas un boulot quand on a la flemme, vu le nombre d'heures et les conditions de travail) ; en revanche, il y a une certaine déshumanisation des malades mentaux portée par notre société validiste qui ne les épargne pas.

Edit : et ce que je voulais dire, surtout, et que tu as bien dit aussi, c'est que les maltraitances ne sont l’œuvre de quelques uns, mais de tout un système.
 
23 Août 2011
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Je vous rejoins sur la maltraitance institutionnelle.

En tant que patiente, j'ai pu échanger avec des soignants aux conditions de travail qui ne cessent de se dégrader.Quand avez deux infirmières pour x patients, comment voulez faire votre travail correctement, pouvoir ne serait ce que prendre le temps de parler, juste parler. Alors oui j'ai rencontré des vrais conna*ds durants mes hospi (dont un souvenir qui me restera, j'étais dans un service en attente, j'avais la sensation d'étouffer,j'étais mal, lorsqu'une ash m'a conseillé d'aller cracher dans l'herbe).... mais la majorité des personnes étaient bienveillantes et faisaient tout leur possible. J'ai rencontré des perles d'infirmiers et d'ash, dont une qui a pris le temps à noël de faire tout son possible pour rendre le service scintillant et chaleureux aux malades, une autre qui m'a coiffée et maquillée avant de partir faire son réveillon à elle, d'autres qui ont toujours eu un moment ou une petite attention pour moi quand ça allait mal... j'ai plein d'exemples, de "petits riens" qui rendent l'hospi un peu plus supportable...il faut arrêter de taper sur le personnel quand il fait de son mieux.
 
9 Mai 2016
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Merci de ta réponse :)
mais les entretiens infirmiers ne sont pas fait au hasard et demandent quelques connaissances.
De quelles connaissances penses-tu ? Ok pour ce qui concerne les pathologies, les signes... mais un entretien infirmier en psy diffère t'il d'un entretien infirmier classique ? Par exemple, y a t'il des écueils spécifiques ? Une posture différente ?
 
22 Mai 2015
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Paris
Je pense aussi qu'il y a un problème de moyens qui joue dans les violences subies en hospitalisation psychiatrique, mais aussi comme dit @Salpêtre le fait de vivre dans une société validiste/psychophobe associé au pouvoir que les soignants ont sur les patients. Je ne dis pas que tous.tes les les soignant.es abusent de ce pouvoir, mais qu'iels en ont la possibilité, et en sont dédouané.es pour beaucoup par la société dans laquelle on vit. Il y a aussi le fait que pour elleux, s'occuper de notre maladie c'est un boulot, tandis que nous, c'est nos vies : la tentation est là d'essayer de s'aménager des conditions de travail plus sympatoches parce qu'iels sont fatigué.es, parce qu'il n'y a pas assez de moyens (on y revient), parce qu'aujourd'hui c'est pas le jour, je pense.

Encore une fois je dis pas que c'est le cas de tous.tes les infirmier.es, et heureusement. Juste que c'est un phénomène qui est là, et qui n'est pas isolé.

Perso j'ai subi beaucoup plus de choses de la part des psychiatres que de la part des infirmier.es (infantilisation, changement de mon traitement sans me prévenir, devoir attendre 6 ans (!) pour qu'on me dise que j'étais psychotique (je sais que c'est pas de ça dont tu parlais @Hysteriafol mais du coup ça m'a fait rire jaune quand tu as dit que les patient.es psychotiques en étaient pas conscient.es - bah oui faut commencer par le leur dire sinon on n'est pas arrivé.es :rolleyes:), transphobie...), mais ça ne m'étonne pas que ces choses-là arrivent. Ca ne veut pas dire que tu es une mauvaise personne @Hysteriafol , ni même que tous.tes tes collègues le sont, ou que ton boulot est intrinsèquement pourri : on dit juste que c'est des choses qui arrivent, qui existent, et auxquelles il faut faire gaffe.
 

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