Bonsoir !
Je vais répondre sur certains points, mais il y a une erreur de raisonnement globale :
l'article est une explication de texte juridique. Je commente une proposition de loi et plus précisément
un amendement de cette proposition de loi (cité dans l'article).
Je réponds aux critiques que j'ai pu lire aujourd'hui au sujet de cet amendement, entre ceux qui disent que c'est pas assez, c'est trop, c'est inefficace, etc... -> c'est un amendement d'une proposition de loi, pas une révolution juridique ni une politique publique.
Je ne suis pas compétente pour critiquer toute une politique publique de diffusion de la culture à partir d'un amendement de 2 lignes (mais beaucoup de gens visiblement le sont, allez lire ce qu'ils en disent, hein !
)
hole;4396859 a dit :
Or cette pratique constitue de la vente à perte, une concurrence déloyale vis-à-vis des libraires indépendants (de toutes tailles), qui ne peuvent pas s’aligner sur ces pratiques.
La concurrence deloyale est un concept a la con. Le principe de la concurrence est que certains s'adaptent, d'autres crevent. D'ailleurs, j'aimerais une preuve tangible de la "vente a perte" d'Amazon (autre concept a la con de toute maniere).
La concurrence déloyale est le résultat d'un abus de position dominante et d'une rupture de l'égalité. C'est une spécificité du droit français, et quand on vient faire du commerce en France, on est soumis au droit français.
Note que je ne prends pas position sur la pertinence/le bien-fondé/l'efficacité de ce concept de droit français.
La "preuve tangible" de la vente à perte est une simple équation mathématique : le prix du livre français est fixe, la livraison a un coût, si tu ne répercute pas ce coût, tu perds de l'argent.
Bien entendu quand tu es une multinationale, tu peux "te refaire" sur d'autres secteurs, sur lesquels tu fais une meilleure marge.
Exemple : Volkswagen a bien résisté à la crise, car même si le marché européen s'est cassé la gueule (et qu'ils produisent en Europe à coût élevé), leur croissance sur les marchés canadien et chinois leur ont permis de rester positif.
hole;4396859 a dit :
Alors non, le but de la proposition de loi adoptée ce matin par l’Assemblée Nationale n’est pas de faire augmenter le prix des livres vendus sur internet
Si.
,et ce n’est pas non plus sa conséquence.
Si.
Son but est de faire respecter la loi Lang par tous
Ce qui revient au meme.
Sur Internet, le prix des livres ne va pas augmenter. Sur certains sites de vente en ligne (comme Amazon et la Fnac, par exemple), oui, les livres seront plus chers. Mais leur prix n’aura pas augmenté : il sera désormais respecté.
Non mais c'est pas possible, t'as fait Sciences po ou l'ENA ?! Personne d'autre au monde ne peut pondre une contradiction, la renier, tordre le sens des mots et presenter ca comme un progres !
Je ne vois pas où c'est "présenté comme un progrès !" C'est présenté comme un fait !
Encore une fois c'est une analyse juridique. Et en droit, la nuance est importante.
Je suis désolée que tu ne saisisses pas la nuance (enfin ça va pas m'empêcher de dormir, hein !
) mais la nuance est pourtant bien là :
Le but de l'amendement cité, c'est d'empêcher le cumul de deux réductions : 5% ET frais de port.
L'effet de l'amendement cité, c'est d'empêcher le cumul de deux réductions : 5% ET frais de port (5% si tu vends en librairie, frais de port si tu vends sur internet).
Jusqu'ici, tout va bien : l'effet de la loi correspond à son but, c'est qu'elle est bien écrite ! (ne croyez pas que j'enfonce des portes ouvertes, il y a suffisamment de textes législatifs qui produisent des effets éloignés de leurs buts !)
Et je me permets d'insister sur la dimension juridique simplement parce que
c'est l'angle choisi dans cet article : les effets en droit (et pas les effets sur l'accès à la culture, dont je ne sais strictement rien puisque le texte n'est pas en application ; mais je pose la question aux lectrices à la fin pour sonder sur le sujet).
hole;4396859 a dit :
Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la Librairie Française, se dit satisfait du vote de cette loi [...] Elle est à l’avantage de tous les libraires qui ne peuvent pas offrir les frais de port.
Tu m'etonnes. Crony capitalism.
Les syndicats saymal, je sais. Je lui ai posé la question parce que je lisais justement des critiques CONTRE la loi au motif qu'elle frapperait aussi les "petits" libraires qui vendent en ligne. Il m'a expliqué que non (je vous ai livré la version courte.)
hole;4396859 a dit :
Le but de la loi n’est ni de favoriser les libraires indépendants, ni de favoriser la vente de livres : l’objectif de l’amendement voté ce matin est de faire respecter le prix unique du livre.
Je confirme : Sciences Po ou ENA. T'as pense a faire de la politique ? La dialectique est impec.
J'ai fait Sciences Po section Administration Publique (option droit public) + un master en RH (en entreprise).
Et je crois que nous avons effectivement un sérieux problème de dialectique
Le but de la loi n'est pas de favoriser les librairies indépendantes, quoi que tu puisses en penser, de toute façon
ce ne serait pas possible : Amazon (& co) ne se priveraient pas pour porter toute loi anticoncurrentielle au niveau européen ; encore une entité bureaucratique qui se mêle de faire respecter la concurrence !
Donc l'amendement voté consiste bien
à faire respecter la loi Lang sur le prix unique du livre.
Je ne joue pas à être idiote tu sais, j'ai bien conscience qu'il y a derrière la présentation de cet amendement, le vote de cette loi, les attentes du Syndicat de la Librairie Françaises qui vont plus loin que "faire respecter le prix unique du livre".
Mais je me cantonne ici à
analyser les effets juridiques de cette loi.
L'erreur de dialectique serait d'en tirer des conclusions à partir d'hypothèses ou d'extrapolations ; ou en changeant l'hypothèse de départ par exemple :
La loi Lang dispose que le livre
n'est pas un produit de consommation comme un autre. Changer cette hypothèse et fonder ton raisonnement à partir d'une autre, C'EST une erreur dialectique puisque ton hypothèse de départ ne correspond plus à la réalité !
hole;4396859 a dit :
Car le livre n’est pas un produit de consommation comme un autre.
Si.
CQFD.
Par ailleurs, n'hésite pas à me mentionner lorsque tu t'adresses directement à moi. Même si je parcours régulièrement les sujets de réaction de mes articles, je préfère recevoir la notification des mentions, ce qui me permet de réagir plus vite, et ne pas laisser 3 pages de débat se développer sans avoir pu répondre.
(C'est d'autant plus civile de le faire si tu vas lancer des piques sur ma formation !
)
Je ne vais pas être de mauvaise foi ; les points que tu soulèves peuvent tout à fait être débattus. Mais ce n'était pas le sujet de l'article, ni remettre en cause le droit de la concurrence, ni la logique capitaliste, ni la nature de l'objet "livre" sur le marché, ni même disserter des conséquences hypothétiques sur la consommation ;
Le but était de clarifier l'objet et l'effet de la loi et plus particulièrement de l'amendement qui est cité, notamment par rapport aux extrapolations fausses que j'ai pu lire dans d'autres médias.
Quant à savoir si le livre est un produit de consommation comme un autre, juridiquement la réponse est non. Philosophiquement ? Je laisse les madmoiZelles libraires/bibliothécaires/éditorialistes rebondir sur cette question.