Oh vraiment bravo pour ce superbe article. J'attendais de voir ce sujet traité par Madmoizelle et le voilà.
La cancel culture c'est un sujet qui me rend très mal à l'aise. Et je le mets en lien avec la pureté militante.
Je vais parler surtout de la cancel culture dans les milieux militants parce que je considère qu'elle peut-être justifiée envers des personnalités condamnés pour des crimes comme Polanski et Cantat par exemple. Alors oui la notion de peine dans le cadre de Cantat se pose parce qu'il a été en prison. Mais quand un artiste a commis un crime, pour moi il ne devrait plus être placé sur la scène publique, par respect pour les victimes et les proches. C'est un jugement assez dur je le conçois. Et il peut s'appliquer individuellement quand la personne a réellement exprimé des remords et a commis une faute (certes impardonnables). Mais pas quand il n'y a aucune remise en question et selon la gravité de la faute.
Pour revenir sur la cancel culture dans les milieux militants. J'y vois déjà une volonté de censurer la parole. Un groupe se considère comme supérieur par sa pensée et censure ceux qui ne sont pas d'accords. Par exemple je vois beaucoup de critiques sur le féminisme essentialiste. Ce n'est pas la pensée que je soutiens mais c'est aussi une forme de féminisme qui a le droit d'exister.
Tout comme les critiques faîtes envers les lesbiennes qui expriment ne pas pouvoir avoir de rapports sexuels avec des personnes ayant un penis. Pour certains c'est transphobes. Pourtant elles sont légitimes de refuser un rapport. Oui il peut y avoir questionnements sur ce qu'est le genre et sur pourquoi il n'est pas définit par un organe génital, c'est important. Et d'ailleurs la plupart reconnaissent que c'est paradoxale d'être transfriendly mais de refuser un rapport. Pourtant ce refus est légitime malgré tout tant qu'il est dit avec bienveillance, on ne peut pas forcer quelqu'un à avoir un rapport sinon c'est du viol. Et cela n'empêche pas les remises en questions de pourquoi elles accordent de l'importance à ça. Je comprends aussi les personnes trans qui ne se sentent pas reconnus comme des personnes cis cependant et qui le prennent mal.
Un autre sujet que je vois aussi souvent sur twitter, c'est la remise en question de l'appartenance au mouvement lgbt des personnes aro/ace parce que la communauté ne considère pas que leurs oppressions sont aussi importantes que les autres (oui on en est là à mesurer qui a la plus grosse souffrance) parce que pour eux, l'acephobie n'existe pas. Et elle est du au sexisme de refuser un rapport. Alors certes l'argument est défendable et ils n'ont pas forcément tords non plus. Mais est-ce une raison pour nier le vécu des personnes ace/aro ? Parce que souvent on leur fait comprendre qu'elles ne sont pas normales. Parce que si on part de ce postulat, tout est dû au sexisme, la transphobie, l'homophobie, parce qu'au final c'est tout ce qui sort de la norme du mâle cis alpha blanc qui est dénigrés par considérer comme plus faible. Et pourtant les mots transphobies, homophobies sont légitimes. Donc pourquoi nier le mot acephobie ?
Bref c'est des exemples de cancel culture que je vois régulièrement dans les milieux militants twitter. Je n'attends pas forcement de débats sur ces sujets là en particulier. Comme les critiques faîtes aux whites feminist parce qu'elles ne prennent pas en compte les personnes racisées mais quand elles le font elles n'ont pas le droit de s'exprimer car non concernée.
Il y a cette norme qu'il faut être intersectionnels sur tous le sujets pour être un bon militant. Mais ne pas prendre la parole si on est pas concerné. Mais ça devient un peu compliqué du coup.
Tout est sujet à critiques et à être défini par xphobies aujourd'hui sur ce réseau. Il devient très difficile de s'exprimer, de défendre un point de vue qui sort de la masse car il y a risque de cancel et d'harcèlement derrière par ces mêmes personnes qui luttent contre le cyber harcèlement. Et ça fait la joie des oppresseurs qui voient le mouvement se gangrener de lui-même. Diviser pour mieux régner et ça marche.
Moi j'y vois une forme de censure de la liberté d'expression parfois. Et au final, tout mouvement extrême même s'il part d'une bonne intention peut devenir une sorte de facisme quand la parole qui sort de la norme est systématiquement mise de coté et surtout basher. C'est les dérives des mouvements militants. Et c'est forcément ceux qui font aussi le plus de bruit et sont donc mis en avant. Je ne suis pas sûr que ça aide vraiment les causes. Et la nuance n'est pas connue non plus pour être entendue à l'air des réseaux où la polémique fait cliquer.
J'y vois aussi une forme d'immaturité (d'ailleurs c'est souvent pratiquer par des communautés d'ados ou de jeunes adultes). Et ça peut se comprendre aussi car les plus jeunes sont en générals plus motivés à militer car ils ne sont pas essouffler encore par la vie quotidienne. Et quand tu as la tête dans le guidon, tu as en général moins le temps, l'envie, la patience de t'impliquer. Et c'est une bonne chose du coup qu'ils portent la parole. Je critique mais je pense que c'est utile. Grandir c'est aussi mesurer mieux les limites et du coup l'un dans l'autre ça fait avancer. C'est quand la parole de l'un n'est pas écouté que c'est dangereux sur le long terme.
Puis enfin cette cancel culture n'a pas une volonté à faire de la pédagogie, à comprendre les causes du pourquoi c'est problématique. Et ça me semble utile de les comprendre pour mieux lutter efficacement. Parce que quand on comprend le mécanisme de départ, on peut agir à la source pour le changer. Braquer une personne qui a tenu un propos problématique ça fait pas avancer la chose. Alors oui certains ne changeront jamais, ça n'excuse pas les comportements problématiques qu'on a tous pu avoir mais il me paraît important de laisser le temps aux gens de changer en mieux parce que c'est possible.
Je comprends la nécessité que tous aille mieux de suite or la société est lente à changer, aller plus vite c'est reculer.
Après je parle de choses comme des propos tenues par exemple et pas des crimes. Je parle d'une personne par exemple qui tient un propos homophobe oi sexiste mais qui souhaite aussi le dialogue, qui mets du temps à intégrer des notions, qui n'est pas forcément d'accord avec la parole du concerné à un instant T mais qui dans quelques mois aura eu le temps de se remettre en question et de changer d'avis. Or en insultant direct et en cancelled la personne, ça la braque encore plus dans son avis.
Mais il est aussi important de noter que le militantisme c'est fatiguant et qu'on a pas tous les cuillères de la pédagogie, que parfois on veut juste dire merde à une énième question posée 10 000 fois. Du coup c'est peut-être mieux dans ce cas de laisser une autre personne prendre le relais ?
Tout cela est à mesurer en fonction des propos aussi. Je rappelle que je parle dans le cas d'avis différents dans un groupe militant, avec des personnes qui ont la volonté de s'instruire sur des notions mais qui sont encore en réflexion personnelle.