Je pense que l'auto-diagnostic mérite une discussion nuancée, plus qu'un simple rejet du phénomène. J'ai vu les deux "coins" de la chose de mes propres yeux, le bon comme le mauvais.
Plus jeune, j'ai commencé à m'interroger sur mes difficultés sociales et mes troubles de sensibilité vis-à-vis du bruit, de la lumière etc. J'ai trouvé une communauté auprès de la communauté autiste, dont l'expérience coïncidait avec la mienne de bien des façons.
Par la suite, j'ai appris que, un, j'avais failli être diagnostiquée à l'âge de deux-trois ans, mais que mes symptômes ont été attribués à l'époque au divorce douloureux de mes parents, et que deux, ma mère a toujours été convaincue que j'étais autiste, mais qu'elle avait peur que le diagnostic me vaille d'être "mise de côté".
Au début, je m'étais contentée d'un auto-diagnostic parce que j'appréciais d'avoir une communauté qui pouvait me conseiller, me donner des techniques pour me relaxer etc. Toutefois, au fil des années, il est devenu évident que je ne pourrais pas travailler sans accommodations appropriées, et j'ai donc vu une thérapeute, qui m'a aidée à trouver une équipe formée pour les diagnostics d'autisme chez les adultes. J'ai eu mon diagnostic en 2018, et ma RQTH qui me permet aujourd'hui de conserver mon emploi et d'avoir des accommodations indispensables au quotidien.
D'un autre côté, une personne de ma connaissance a commencé à googler toutes sortes de choses et à faire du "shopping de docteur" pour obtenir un diagnostic (aller de docteur en docteur en docteur, insister et payer fort jusqu'à obtenir ce qu'elle souhaitait d'eux).
Les opérations qu'elle a subi par la suite lui ont retiré sa vessie, et d'autres organes indispensables ont été retirés ou altérés d'une telle manière que cette personne est aujourd'hui véritablement handicapée. Nombre de médecins avaient refusé de faire quoi que ce soit, et certifiaient qu'elle était en parfaite santé jusqu'à ces opérations.
Bref, pour ma part, l'auto-diagnostic m'a beaucoup aidée et m'a permis d'obtenir un diagnostic et des aides dont j'avais vraiment besoin au quotidien, quand, pour une autre personne de ma connaissance, cela a vraisemblablement ruiné sa vie et sa santé. Réduire l'auto-diagnostic à l'une ou l'autre de ces conclusions serait une réduction et une simplification regrettables du sujet, qui mérite beaucoup de discussion.
L'auto-diagnostic est en grande partie né en raison des biais des professionnels médicaux vis-à-vis des femmes, des personnes qui ne sont pas blanches, des personnes de la communauté LGBT etc.
Une femme de ma connaissance a remué ciel et terre pour obtenir un diagnostic d'autisme pour son fils, qui présentait pourtant tous les symptômes typiques, parce que son fils était noir et que les équipes médicales étaient biaisées, tendant à attribuer ses comportements à des "colères" ou des signes d'agressivité ou tout autre préjugé pouvant être entretenu envers la communauté noire.
Et moi-même, on a rejeté l'idée de me diagnostiquer jeune, quand je présentais pourtant des symptômes très parlants (gestes auto-stimulants, non-verbale, contact visuel peu présent, sensibilité marquée etc.), parce que j'étais une petite fille et que, à l'époque, l'autisme était surtout vu comme un handicap "masculin".
Bref, une discussion qui mérite d'être nuancée, au lieu de mener directement à la condamnation du phénomène.