Je trouve votre témoignage très bien écrit et surtout la réalité qu'il dénonce me parle. Personnellement, j'avais 13 ou 14 ans lorsqu'un homme plus vieux que mon propre père m'a sifflé dans la rue. Mais ayant vécue dans un milieu féministe, j'ai été sensibilisée très jeune et je n'ai jamais considéré comme normal le fait de me faire siffler ou celui d'avoir peur quand je marche dans certains quartiers, de nuit le plus souvent.
Il y a un argument que beaucoup de gens reprennent quand on leur raconte une histoire de ce genre, c'est "Et comment tu étais habillée ?". Et à chaque je réponds "Qu'est-ce que ça change ?". Ce sentiment que si je porte une jupe alors forcément pour recevoir une approbation, ou alors que c'est un prétexte pour me toucher ou me déshabiller du regard. Je le vois tous les jours, ce changement de comportement en fonction de comment je suis habillée. Attention ! Je ne dis pas que je ne me fais pas arrêter lorsque je suis en pantalon, mais seulement que c'est pire quand je suis en jupe avec des talons ou sans d'ailleurs. Je les vois ces sourires lubriques, ces yeux qui me dénudent comme si j'étais un bout de viande, et ça me dégoûte.
Alors moi qui suis d'un naturel souriant, chaleureux, qui aime la vie, rencontrer des gens, et bien dans la rue je regarde droit devant moi, sans sourire, en faisant attention au hommes que je croise. Et ça n'est pas normal ! Peu importe, que je sois en jupe, ou pas, maquillée ou pas, l'espace publique est un endroit ou toutes les femmes doivent se sentir en sécurité. C'est pour ça que quand je vois une femme en difficulté, je vais l'aider, lui apporter mon soutien, parce qu'on fond, je sais que si je ne le fait pas, si je détourne le regard, alors je suis un peu coupable.
Nous devons être solidaires entre femmes d'abord, et ensuite expliquer aux autres personnes, et notamment aux hommes ce que nous vivons. Parce que je pense sincèrement que certains ne pensent même pas que le harcèlement de rue existe. Il a fallu que j'explique à mon mari ce qui se passait pour moi, pour qu'il réalise et arrête de râler quand je lui demande, parce que je rentre tard, de venir me chercher. Parce que, pour lui, ce que nous subissons tous les jours dans la rue est inimaginable et que jamais il ne le ferait.
Voilà pour cette réponse longue et détaillée.