Bonjour,
C'est la première fois que je commente un article alors que ça fait un moment que je suis MadmoiZelle de plus ou moins près (année de concours oblige ...). Mais l'article m'a (un peu trop) interpellée, j'ai lu quasiment tous les commentaires et je voulais ajouter ma pierre à l'édifice (comme si ça allait changer quoi que ce soit). Je remercie grandement la courageuse Madz qui a fait ce témoignage et je lui souhaite beaucoup de courage pour la suite.
Pour la faire courte, un peu avant mes 15 ans, mon père nous a annoncés (à ma mère, mon frère, ma soeur et moi) qu'il avait rencontré une autre femme dont il était amoureux et qu'il voulait partir vivre avec elle. Dans la théorie, cela ne concernait que ma mère, nous n'avions pas à nous en mêler, dans la pratique, c'est un peu plus compliqué.
D'une part, je ne suis pas d'accord pour dire que l'infidélité ne concerne que les parents. Bien sûr que ce sont leurs histoires de couple, qu'en tant qu'enfant on ne sait pas tout ce qui se passe, etc. Il n'empêche que quand on découvre l'infidélité d'un de ses parents (en l'occurrence le père), l'enfant est complètement concerné. c'est sa famille, son noyau, sa vie qui est en train de changer ; et bien souvent, de manière inconsciente ou non, on doit "choisir", se positionner face à cet élément.
C'est pour cela que je me suis sentie "trahie", pas dans le même sens que ma mère sans doute, mais trahie aussi. Mon père n'a jamais compris ce sentiment et a toujours essayé de le disqualifier, parce que "ça ne me concernait pas" justement. Sauf que si. J'ai été trahie ce jour-là parce que les valeurs de courage et d'honnêteté que m'avaient enseignées mon père étaient visiblement fausses puisqu'il ne les appliquait pas à lui-même. J'ai été trahie ce jour-là parce que la vision de la famille dans laquelle on m'avait fait grandir était fausse. J'ai été trahie ce jour-là parce que mon père brisait la famille et a tout fait reposer sur mes épaules. J'ai dû faire le deuil de beaucoup de choses ce jour-là et c'est ce qui fait que je me suis sentie trahie.
Quand on a découvert l'infidélité de mon père (et j'ai l'impression que c'est le cas pour beaucoup de celles qui ont témoigné dans ce sens), ma mère s'est en partie effondrée, elle ne s'y attendait pas, elle n'avait rien vu venir. Sauf qu'il a bien fallu continuer et que j'ai dû assumer plus de choses qu'une gamine de quinze ans n'a à le faire normalement. J'ai dû grandir, très vite parfois. Beaucoup d'ami-e-s me disent souvent que je parle comme si je n'avais jamais été vraiment une enfant, et j'ai souvent le sentiment d'avoir sauté des étapes pour "gérer" l'infidélité de mon père.
Cette infidélité a eu pas mal de conséquences sur ma vie d'adultes. Je mets un temps infini à faire confiance aux gens et particulièrement aux hommes avec qui je sors. Et même après avoir accordé ma confiance, j'ai peur qu'ils ne me fassent du mal en sachant ce que je suis. J'ai une peur panique de l'adultère et de l'abandon. Mon copain actuel a passé des mois à me rassurer, à me consoler, à essayer de me montrer qu'il n'est pas comme ça. J'ai peur de reproduire le couple de mes parents.
D'autre part, je suis d'accord pour dire que ce n'est pas bien de s'immiscer dans le couple des parents, qu'il faut les laisser gérer leurs problèmes entre eux. Mais quand on vit sous leur toit, qu'on subit les disputes, les changements d'humeurs, les crises de larmes des parents, on est censé-e-s faire quoi ? S'enfermer dans sa chambre, se boucher les oreilles et chanter très fort pour oublier que ça existe ? Félicitations à celles et ceux qui y arrivent, moi je n'ai jamais pu. Je n'ai jamais géolocalisé ou fouillé les mails (parce que je n'ai aucune compétence là-dedans) mais ça m'est arrivé de fouiner aussi, pour me confronter moi-même à cette réalité des choses, faire mon propre deuil, anticiper ce qui pourrait se passer, etc. Quand j'ai trouvé dans la salle de bains que sa nouvelle "compagne" y entreposait des tests d'ovulation pour faire des enfants avec mon père qui n'était divorcé que depuis quelques mois, ça m'a fait un choc mais j'ai eu le temps de digérer la nouvelle et de mieux "réagir" (quoique ...) quand mon père nous a annoncé qu'elle était enceinte, alors qu'il ne nous en avait jamais parlé auparavant. Et que celui qui n'a jamais succombé par curiosité lui jette la première pierre ...
Et puis, au moment du divorce de ses parents, il y a toujours un moment où il faut choisir : choisir avec quel parent on va habiter, choisir comment on le vit/digère, choisir comment on comprend la séparation. Personnellement, je n'ai jamais compris l'infidélité de mon père, j'ai trouvé ça facile de jongler avec les deux, de ne jamais parler des problèmes avec ma mère jusqu'à ce qu'il parte, de partir quand il était sûr que sa maîtresse voudrait bien de lui sur le long terme, etc. Je suis peut-être dans le jugement, mais franchement je m'en fiche, ça a été ma thérapie pour accepter ce qui s'était passé.
Quand mes parents ont divorcé, j'avais donc quinze ans et mes parents ont pensé que j'étais assez mature pour entendre certaines choses. Par nature même, je me suis immiscée dans leur couple, parce qu'on m'a prise pour confidente, parce qu'on m'a demandé mon avis, parce que j'étais assez grande pour comprendre la différence entre le désir, l'amour, la vie maritale ou le sexe.
Du coup, je trouve aussi que le témoignage peut avoir des aspects malsains, mais parce que la situation est malsaine. Son père a menti pendant des semaines, sans dire à sa femme qu'il y avait un problème, qu'il était attirée par une autre femme, comprendre pourquoi ça arrivait ; quand la Madz a découvert ce qu'il se passait, elle a dû se taire, faire semblant que ça n'existait pas, que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes ; et aujourd'hui encore, tout le monde le sait mais personne n'en parler, l'ambiance est ultra pesante et elle doit accepter la situation sans pouvoir en parler tous ces éléments me choquent bien plus que sa curiosité à fouiller ... Et à toutes celles et ceux que ça dérange parce que c'est hyper personnel et que ça ne concerne que les parents et que ça n'a pas été fait avec leur accord, euh, je ne vois pas le problème ... C'est un forum anonyme, elle n'a pas donné de détails précis (la ville, le lieu de travail, le nom, ce genre de choses) donc bon. Quand vous racontez vos aventures à vos ami-e-s, vous demandez à votre patron-ne, petit-e ami-e/coup d'un soir/plan cul, à l'inconnu-e qui vous a fait rire, si vous pouviez parler de lui ?
Voilà, premier commentaire, premier pavé ! Merci beaucoup MadmoiZelle pour tout ce que vous faites