zoebonhomme;4118700 a dit :
Cet article m'a gênée. Ce n'est pas l'a-sexualité en en elle même — il me semble évident qu'il y a des petits appétits sexuels comme des gros —
C'est pas une question d'appétit, c'est une question de désir sexuel pour un genre ou un autre. Asexuel, en gros, c'est le contraire de bisexuel.
L'appétit sexuel, ça varie d'une personne à l'autre quelque soit son orientation sexuelle.
Il y a des madz non ace qui ont témoigné ici parce qu'elles ont une libido faible. Moi je suis demi et j'ai une libido normale à forte.
mais le témoignage de la jeune femme de 19 ans : comment à 19 ans peut-on se poser la question de l'a-sexualité alors que l'on n'a pas encore découvert toutes les potentialités de son corps ?
A 19 ans, on n'est plus un enfant non plus. On a généralement passé son adolescence à se développer et à se rendre compte où en était notre désir par rapport à celui des autres.
Je ne dis pas que c'est définitif (parce que clairement, l'orientation sexuelle, c'est pas une chose figée chez tout le monde), mais à 19 ans, on est largement capable de prendre du recul et de se poser des questions par rapport à sa propre sexualité.
Et on n'a certainement pas besoin de goûter au sexe ou à l'orgasme pour savoir qu'on est ace ou non. Des tas d'asexuels ont des rapports sexuels, se masturbent ou ont des orgasmes, certains avouent s'être forcés à l'adolescence pour faire comme tout le monde, d'autres avoir été curieux comme ils ont été curieux pour apprendre la cuisine ou faire du saut à l'elastique parce qu'il n'y a pas que le désir de l'autre qui peut motiver.
Bref, à 19 ans, si on peut dire qu'on n'a pas envie de coucher avec les personnes du même sexe ou du sexe opposé sans avoir essayé, on peut aussi se dire asexuel.
Il me parait normal d'éprouver peu de désir à l'âge de dix neuf ans. Pour qu'il y ai désir, il faut savoir ce que l'on désire.
A 19 ans, on peut savoir ce que l'on désire et on peut savoir ce que l'on ne désire pas. On peut être paumé à 13 ans, 20 ans, 40 ans ou 70 ans. C'est une question individuelle.
Or le corps change, évolue, surtout le corps de la femme. Le corps d'une femme, c'est un work in progress. C'est entre trente et quarante ans que la femme est la plus épanouie sexuellement, parce qu'elle connait son corps, sait dire ce qu'elle aime et ce qu'elle n'aime pas, de nouvelles zones érogènes sont apparues avec l'âge……
Le plaisir et les zones érogènes n'ont aucun rapport avec l'asexualité.
L'activité sexuelle non plus (un prête abstinent mais qui sait qu'il est hétéro, c'est autant possible qu'un mec actif qui sait qu'il est ace).
Et au passage, y a pas que le corps qui peut changer constamment : l'orientation sexuelle, la libido, tout ça ça bouge, mais ça ne veut pas dire que l'étiquette passée était fausse. Je sais que notre sexualité est jugée fixe par beaucoup de personnes, c'est pour ça qu'il y a un problème d'occulation de la bisexualité et de l'asexualité, mais c'est plus complexe que ça.
A 19 ans, j'étais une jeune vierge effarouchée, inhibée, incapable de parler à un garçon, sans désir car non désirée et mes orgasmes les plus prodigieux je les ai connus après 30 ans.
C'est bien, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Et on peut désirer sans être désirée, être vierge sans être effarouchée, ne pas être vierge et ne pas avoir de désir finalement, etc.
Si je tenais à intervenir dans ce forum, c'est que l'idée que des jeunes femmes de 19 ans lisant cet article puissent se dire "C'est donc cela ? si j'ai si peu de désir, c'est que je dois être a-sexuelle !" me navrait profondément. On va se retrouver avec une épidémie d'a-sexuelles...
Bon, bah je suis carrément choquée par la dernière phrase. Une épidémie ? On recommence avec les peurs d'invasion et de mode ? Comme on l'a fait pour la question homosexuelle et bisexuelle ?
C'est différent, on l'explique, on en parle DONC des jeunes vont se croire à tort faisant partie de ce groupe et s'enfermer dans une catégorie qui ne leur convient pas ?
J'y crois moyen (notamment parce que ces étiquettes minoritaires ne sont pas bien vues et que le premier réflexe est plutôt de les rejeter). Et ce n'est pas un drame non plus que les gens se questionnent.
Nous ne sommes pas toutes faite sur le même moule, bien entendu et rien ne justifie que l'on s'impose des relations sexuelles sans désir, mais peut-on se dire a-sexuel avant quarante ans ?
Oui. Sérieusement, on dit la même chose aux personnes qui ont le malheur de se dire homosexuels parfois. "T'es encore jeune." "Est-ce que t'as testé pour en être sûr ?" "Tu vas peut-être encore changer." Et ça continue jusque dans la vingtaine, c'est pas qu'aux jeunes de 12 ans.
On peut se dire asexuel à 16 ans comme on peut se dire asexuel à 50 ans. Et comme je l'ai dit : il n'est aucunement obligatoire de faire de la sexualité une chose figée. On peut évoluer dans un sens ou dans l'autre,
ça n'invalide pas l'étiquette passée.
Et puis comment peut-on parler d'amour sans parler du cocktail hormonal ocytocine-dopamine-endorphines ? L'amour sans le sexe, cela s'appelle… l'amitié.
Non, ça s'appelle le
companionate love (
en gros : un compagnon). Ca peut effectivement exister entre amis (rare), mais c'est plus fréquemment présent chez les couples
(par ailleurs, l'amitié est une forme d'amour).
(Ah oui, c'est pas réellement les hormones de l'amour, juste les hormones du sexe.)
Certains asexuels parlent de "compagnon" ou de "partenaire" pour cette raison particulière : ce n'est pas de l'amitié ordinaire qu'ils recherchent, mais ça ne correspond pas à l'amour tel qu'il est vu par les non-asexuels.
Bref, on est encore dans cette fameuse idée que pour être asexuel, il faut soit avoir testé, soit être suffisamment âgé pour pouvoir en parler.
Ces arguments reviennent horriblement régulièrement. Pour toutes les minorités sexuelles.
Donc résumons :
-oui, on peut se réveler tardivement,
-oui, ça peut être une phase,
-oui, ça peut être un blocage,
-oui, on peut se tromper.
Mais aussi :
-ca peut durer toute la vie,
-le fait de changer n'invalide pas l'expérience précédente,
-si t'as pas 8ans, personne n'a de raison de douter de ce que tu ressens vis à vis de ta sexualité,
-en parler, c'est rendre visible le groupe et dire aux gens : "c'est possible" pour déculpabiliser les asexuels, pas risquer de convertir des personnes paumées dans leur sexualité,
-se poser des questions sur sa sexualité, se dire qu'on pourrait être ace ou autre, c'est pas grave ni figé dans le marbre,
-personne n'a le droit de jouer les polices des étiquettes.