@AFRO INSOLENTE : pour "putain" et "bordel" c'est expliqué plus haut. Ce sont des mots qui font référence à la prostitution. En gros putain = prostitué, la question c'est pas tant le sens que toi tu donnes au mot, c'est le sens que ce mot contient quelque soit ton interprétation. Ton argument me fait penser aux personnes qui disent que "pd" n'est pas insultant parce qu'il n'y a pas de mal à être homosexuel. Bien sûr qu'il n'y a pas de mal à être homosexuel, tout comme il n'y a pas de mal à être prostitué. Mais en faire une insulte, ou une interjection vulgaire (comme putain), c'est ravaler une condition (la prostitution) à un statut insultant ou vulgaire.
Dire "bordel", par exemple "qu'est-ce que c'est que ce bordel ?" pour parler d'un désordre, c'est adhérer en soi à une vision du monde où la prostitution (le bordel) constitue un désordre moral. Tout comme dire "qu'est-ce que c'est que ce bazar ?" c'est adhérer à une vision du monde où le marché iranien (bazar) est un symbole de désordre (et, oui, si vous vous posiez la question, c'est raciste). D'ailleurs à ce sujet, je suis très contente de voir des enseignes reprendre le terme de "bazar" pour désigner ce qu'il est à l'origine : un grand marché.
Après pour la question de la crédibilité, c'est là que prend tout le sens de l’insulte utilisée. Je ne vais pas traiter une fille que je veux blesser de "pute" parce que je refuse de considérer une personne prostituée comme moins digne de respect que la fille que je veux blesser (verbalement).
A titre perso, quand vraiment je veux insulter basiquement (pour montrer que je suis pas contente mais que ça va pas m'empêcher de dormir pour autant) je me tourne vers le lexique des excréments et autres gaz (va chier, petite chiure, sale merde, gueule de bouse, péteux-se...). Pour faire du mal, j'emploie de préférence le lexique de la mort, qui est, à mon sens, le plus parlant niveau violence (sale crevure, va crever, crevard, t'es juste bon à manger du marbre...). Par expérience "crevure" et "crevard" ont un plutôt bon effet sur les gens.
Tu dis que :
ce ne sont pas les mots qu'il faut changer, c'est la société
mais en même temps... la société on la change comment ? En réfléchissant sur le sens des mots qu'on emploi et leur effet. Tu parles du mot "nègre", mais ce terme a fait l'objet d'une réappropriation par des intellectuel-les et militant-es noir-es, c'est pas les gens qui utilisaient ce terme comme une insulte qui ont permis ça. Et encore aujourd'hui, moi en tant que blanche je ne vais pas parler de personnes noires en disant "les nègres", parce que ce terme a toujours un sens oppressif.
Cyrano disait, à l'imprudent qui se moquait de son nez, " Eussiez-vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut pour pouvoir là, devant ces nobles galeries, me servir toutes ces folles plaisanteries, que vous n'en eussiez pas articulé le quart de la moitié du commencement d'une, car je me les sers moi-même, avec assez de verve, ais je ne permets pas qu'un autre me les serve."
http://dardel.info/Textes/Cyrano.html
On peut supporter de nombreux termes considérés comme généralement insultants, pour peu qu'ils vienne de soi, qu'ils soient acceptés ou fasse l'objet d'un compromis (j'appelle souvent "ma grosse" une amie filiforme qui adore l'ironie de ce qualificatif), mais venant d'autres, il ne reste que l'intention d'insulter et blesser.