(Pour ce qui est de faire de la pub... Cela s'appelle un clin d’œil... Ou un coup de pouce pour une créatrice. Évidemment que ce n'est pas du tout le propos de la vidéo, faire de la pub ^^ )
Hello les filles.
Il y a bien longtemps que cette vidéo a été faite, c'est à la fois drôle, bizarre, pas si agréable et pourtant toujours si fort, de voir quelle suscite toujours autant de réactions, quelqu'elles soient.
Je m'en viens écrire quelques mots parce que maintenant, j'ai 32 ans, il s'en est passé des choses depuis cette vidéo. Cette vidéo on l'a faite dans un souffle, une idée, une impulsion, on s'est lancé et voilà, on a fait ça. C'était pour moi dans le prolongement de 38/40, c'était les débuts de ma réflexion sur le rapport au corps. Comme beaucoup de débuts, ils ont leur fraîcheur et leur spontanéité, mais aussi leur manque de recul, leur empressement qui prend parfois le pas sur la réflexion.
A l'époque, je découvrais que l'on peut s'accepter un peu mieux malgré un tas de complexes, qui se situent parfois plus dans la tête que dans les cuisses. Je comprends les filles comme Syew pour qui cette vidéo n'a pas un effet forcément agréable et j'en suis désolée. Ce n'était en effet pas l'effet recherché. A l'époque je n'avais pas le recul nécessaire pour me dire que bon, ça allait quand même, mon corps il était pas si mal. C'est au final le propos même de 38/40. Les complexes c'est dans la tête plus que dans le corps parfois. Lorsque l'on est en proie au doute, on finit par ne plus se rendre compte que si, on est pas si mal. On est si nombreuses à en avoir, des doutes. Et au final, le fait que certains complexes, au yeux des autres, de manière "objective", ne soient pas justifiés, ne peut malheureusement pas les enlever à la personne qui les vit. Je comprends tout à fait que les "petits problèmes" de doutes d'une fille qui n'est pourtant pas si mal foutue, puissent faire grincer les filles qui ont autrement plus de problèmes de défauts du corps que moi. Et je comprends que cela puisse paraître déplacé pour certaines. Parce que ces problèmes là, ne vivent que dans la tête, tout au plus dans le regard de certain-e-s autres, mais ne sont pas des problèmes entraînant de vraies contraintes au quotidien de jugements durs, de non adaptation à une société qui méprise le surpoids et ne possède parfois même pas les équipements adéquats pour soigner les personnes en surpoids, et qui s'ingénie à culpabiliser les personnes qui ne correspondent pas aux normes admises. Et justement, je trouve cela terrible que l'on soit pour autant si nombreux-ses à complexer de multiples "petits défauts" alors que l'on est dans une certaine norme, dans laquelle on nous fout la paix.
Hier matin, je me regardais nue devant mon miroir, dans la grande lumière du jour, et je me disais que je n'aurais sans doute pas le cran de refaire un film comme 38/40. Juste après, j'ai vu que Fab avait ressorti le toute nue style. Maintenant, je fais du 38 tout court, je rentre dans certaines choses en 36 comme des robes. Pour autant, je me sens moins bien que lorsque j'ai fait 38/40 et le toute nue style. Comme quoi. Mon corps a changé, change, il vieillit, il n'a pas aimé certaines variations de poids, le manque de sport qui pourrait le rendre moins flasque, les petites marques du temps qui s'inscrivent ici et là et encore ici... Le combat contre les complexes n'est jamais vraiment gagné. Car si moi je ne suis pas spécialement bien dans mon corps, pour autant il continue à être aimé et désiré par d'autres, qui ne comprennent pas où est le problème... On est bien plus exigent avec notre corps et nous-mêmes, que les autres ne le sont.
Je comprends bien les filles qui trouvent qu'il n'y a pas besoin de se mettre à poil pour parler du corps, et je suis d'accord. On peut faire différemment, et c'est lassant de ressortir le corps comme argument de libération tout-ça, comme si se foutre à poil était la marque ultime d'acceptation ou je ne sais quoi. Pour autant, pourquoi pas. Peut-être que dés-érotiser le corps, peut-être que se le réapproprier comme corps sorti des esthétiques en vigueur (cadrages, éclairages, postures, imageries etc), peut-être que redonner de la simplicité au corps nu, peut-être que ce genre de choses a aussi du sens. Je ne sais pas moi-même. Je continue de réfléchir à cela. Cinq ans ont passé depuis le toute nue style, et autant dire qu'entre mes 27 ans et mes 32 ans, il s'en est passé des choses dans ma vie, ma tête, mon corps. Je ne tiendrais plus le même discours aujourd'hui si je devais refaire une vidéo, je le ferais différemment. Il y a beaucoup de courants contradictoires, de pensées, de façons de percevoir le corps, la nudité, la femme, et je suis comme beaucoup, je tâche de continuer à nager sans couler dans cela.
Ce qui est un peu compliqué pour moi à l'heure actuelle, c'est que l'on regarde, et juge pour certain-e-s, la Leï que j'étais il y a 5ans, et à qui je n'en veux d'avoir été ce qu'elle est, car on fait ce que l'on peut comme au peut, avec ce que l'on est, au moment où on fait les choses. J'arrive à ne pas me dire "raaaah mais ça tu aurais du le dire comme ça, ça tu aurais du le faire comme ça", parce que non à l'époque je n'aurais pas pu. Et c'est comme ça. C'est un cheminement, une évolution. Je ne tiens plus le même discours maintenant, pas plus que je vis mon corps de la même manière. C'est donc un peu compliqué de continuer à gérer cette vidéo, mais je ne regrette pour autant pas de l'avoir faite car voilà, j'ai essayé quelque chose, et cela participe à ce que je suis maintenant. Et cela continue à faire réfléchir, de quelque manière que ce soit, que l'on soit d'accord, pas d'accord, que l'on aime, que l'on n'aime pas, c'est que cela va parler à quelque chose quelque part, et c'est déjà ça.
38/40 pour le coup continue de me ressembler et je continue à porter cette vidéo, dont je suis en train de travailler sur une suite, pour filmer d'autres filles, d'autres doutes, d'autres corps, d'autres mots/maux... Parce que c'est quelque chose qui continue de me tenir à cœur, le poids de nos corps sur nos vies, nos possibles, notre bien-être, le poids de l'acceptation ou non de notre corps, par nous, par les autres.
Voilà, c'était un peu long, et encore, il y aurait tant à en dire.
Prenez soin de vous, et continuez à mettre de l'énergie à vous aimer, même si c'est compliqué, même si c'est douloureux. Ne vous laissez pas broyer par les doutes.