@Fortune Cookie @Locke Même si c'était légal, je pense que ce serait une idée très dangereuse parce qu'Internet est un monstre qui nous échappe : on ne contrôle pas ce qui sera fait avec la photo de quelqu'un, comment elle sera utilisée, ce qui retombera sur la personne etc. Je pense qu'un Etat de droit ne doit se lancer dans ce genre d'initiatives publiques que quand l'intérêt supérieur des citoyens est en jeu. Par exemple, lorsqu'on a une personnalité publique a commis des actes condamnables (élu, chef de grande entreprise recevant des fonds nationaux, journaliste etc.), lorsqu'une personne dangereuse est recherchée et en fuite (mais dans ce cas, la Police a identifié la personne qui a choisi volontairement de lui échapper) etc. Dans la plupart des cas, il n'y a pas vraiment d'intérêt public à dénoncer quelqu'un devant tout le monde, sauf par vengeance or le but de la Justice n'est pas de se venger mais de sanctionner.
Les études sur la peine de mort montrent bien que la plupart des criminels qui choisissent d'enfreindre la loi le font quelle que soit la dureté de la peine. A partir du moment où tu "prends le risque" d'être condamné à la prison ou une autre peine du genre, peu importe qu'on affiche ta photo, que la peine soit de 3 mois ou 20 ans, ou que ça puisse aboutir à ta mort, la plupart des criminels agissent quand même. Si les criminels prennent le risque d'être arrêtés et condamnés à quelque chose, c'est qu'ils pensent soit 1) qu'ils ne seront jamais arrêtés ou 2) que ce qu'ils vont retirer de cet acte est suffisamment intéressant pour se mettre en danger. Donc l'intérêt de la "honte publique" n'est pas dans l'efficacité et la dissuasion (puisque si le criminel est excité en montrant sa bite, je pense que l'excitation est plus forte que la peur de sa photo dans les journaux) : c'est de l'ordre du défoulement et de la vengeance et pour moi ce n'est pas digne d'un Etat de droit.
Maintenant si la proposition c'est de prendre des photos et de les afficher en attendant que la Police intervienne, déjà ça pose le problème des droits fondamentaux (c'est aux instances désignées de décider si quelqu'un est coupable ou non et doit être jugé publiquement comme tel, pas au citoyen ordinaire) et le risque de s'attaquer à des innocents. Mais si on se place du point de vue de la victime supposée qui prend cette photo en auto-défense, c'est aussi très dangereux. Beaucoup d'exhibitionnistes et toucheurs de métro ont un mode opératoire plus "vicieux" que les harceleurs : ils ne s'attendent pas à ce que la réaction de leur victime les menace et se contentent donc de s'éloigner quand elle les confronte. En revanche, s'il réalise qu'une victime qui se "rebelle" peut réellement les mener vers la prison, il y a le risque qu'ils deviennent violents... Et qui dit qu'en voyant leur photo, ils ne devineront pas immédiatement quelle victime l'a postée? Si la Police n'est pas encore impliquée à ce stade, il est fort possible qu'ils soient en train de fréquenter les mêmes lieux que leur victime et puissent donc la retrouver facilement.
Mieux vaut laisser la possibilité aux victimes de prendre une photo discrètement sans éveiller les soupçons pour la transmettre ensuite à la Police.
Le moyen de décourager les exhibitionnistes et autres harceleurs n'est donc pas de leur "foutre la honte" sur Internet mais de bien reconnaitre leurs actions comme des crimes sexuels (combien de femmes et d'hommes ignorent qu'une main aux fesses est une agression sexuelle punie par la loi par exemple?). Donc mieux sensibiliser le public, mieux le personnel de transport, réorienter le boulot des polices vers les agressions sexuelles plutôt que par exemple les pickpockets et montrer une vraie volonté politique. Parce que dans le métro, beaucoup de harceleurs pourraient être identifiés par les caméras : encore faut-il que les services de sécurité se bougent les fesses pour aller regarder dessus. Si les criminels sexuels réalisent que faire ça tranquillement à la vue de tout le monde est idangereux pour eux (ce qui n'est pas trop le cas pour le moment), ça réduire déjà les agressions.
Il vaut mieux travailler à améliorer l'efficacité de nos institutions plutôt que de chercher à développer des "peines" basées sur l'émotion!