Moi je n'ai pas aimé cette vidéo. Ce n'est pas la première fois que ce genre d'inversion est mise en scène et je trouve que ça donne toujours ce côté un peu cliché qui dessert le propos. Comme l'idée n'est plus originale, j'en attendais un meilleur aboutissement et j'ai été déçue.
Comme l'ont dit plusieurs MadZ avant, j'ai bien aimé le début, à peu près nuancé, jusqu'au passage avec Nissar.
Je m'attendais limite à ce qu'on nous montre que le héros est moralisateur et que c'est pas bien (genre tu te permets de dire aux autres qu'il faut qu'ils s'émancipent alors que tu n'es pas spécialement mieux lôti) mais en fait, non, c'est juste une critique lourdasse du voile "opression-des-femmes-par-les-hommes-des-pays-lointains".
Après, tout le reste est un peu lourd genre "j'arrive-avec-mes-gros-sabots-des-fois-que-vous-comprendriez-pas-le-propos".
La scène de la clocharde n'est pas subtile. Les clochards désocialisés insultent tous les gens de cette manière (hommes et femmes en ces termes), c'est même d'ailleurs parce qu'un SDF l'avait interpellé en lui disant "alors tu te crois beau?" que Stromae a fait "Formidable".
La scène des "racailles" non plus. Je trouve que les filles jouent vachement bien mais le héros n'a pas une réaction très réaliste et j'aurais aimé qu'on montre plus la violence silencieuse. Parce que là, les racailles n'ont visiblement pas l'intention d'utiliser la violence physique ni même de le faire chier très longtemps et à trois reprises, elles ignorent ses interventions furieuses.
Même si parfois en tant que fille dans un monde patriarcal, on réagit quand on nous fait chier, je pense que la réaction la plus courante c'est de laisser couler de peur que ça ne dégénère. Le mec de la vidéo qui insiste TROIS fois et se met à insulter un groupe de 4 racailles qui se foutent de sa gueule alors qu'il est seul dans une rue vide, c'est pour moi le comportement de quelqu'un qui n'a jamais ce genre de problème, donc la réaction qu'aurait un mec qui se retrouverait catapulté du jour au lendemain dans ce monde inversé. Pas celle de quelqu'un qui vit ça au quotidien...
La plupart des filles qui ont l'habitude du harcèlement de rue vont faire profil bas dans cette situation et j'aurais aimé qu'on montre ce qu'on subit les dents serrés parce qu'on prend sur soi pour ne pas que ça dérape; pour gagner quelques secondes de tranquillité, qu'on fasse comprendre au spectateur que cette violence psychologique n'est pas NORMALE et qu'il n'y a pas besoin d'en arriver à un viol pour que ce soit une violence oppressive.
D'ailleurs, sa réaction face à la clocharde est du même genre. Quand on vous fait chier à longueur de journée, vous prenez vraiment la peine de relever les propos d'un mec imbibé d'alcool sur le bord de la route?
Le viol, j'ai trouvé que c'était un cliché : les racailles dans une ruelle déserte qui veulent se venger...? Ya pas plus "quotidien" comme type de violence sexuelle? Par exemple, on aurait pas pu montrer la voisine un peu insistante ou l'épouse qui croit avoir droit à son dû (puisque la majorité de ces violences arrivent de gens qu'on connait)?
Enfin, le passage à la Police. Autant, j'ai trouvé pas mal le coup du café au jeune flic parce qu'il accepte le sexisme en souriant et que c'est assez réaliste quand on est dans un milieu discriminant que de l'accepter en espérant mieux s'intégrer, autant j'ai trouvé qu'encore, ça manquait de subtilité.
Le moment où la flic décrit le viol sur procès-verbal est assez subtil parce qu'on voit son manque de tact mais après, quand elle dit que c'est bizarre et menace le héros, c'était un peu "gros sabots". Ya d'autres types de pressions plus insidieuses que subissent les victimes et la Police peut être très agressive sans que ça paraisse aussi "faux".
Enfin, l'épouse aussi sort des trucs un peu cliché alors qu'elle aurait pu être plus insidieuse dans ses sous-entendus.
Ou alors c'est ptete la manière dont c'était jouer, je sais pas mais j'avais l'impression que les acteurs ne s'identifiaient pas vraiment à leurs personnages, ne les incarnaient pas "vraiment" comme si ça restait trop "improbable" pour qu'ils y croient.
Le résultat, c'est que ça donne l'impression que c'est "exagéré" alors que les situations sont bien réelles mais que ce qui arrive est en général moins grossier que ça. Pour dénoncer un truc, ça ne suffit pas de balancer quelques clichés inversés, il faut aussi le faire avec sensibilité et ce n'est pas le cas ici à mon sens.
Aussi, je trouve qu'autant certains élements (les racailles, les filles qui font leurs joggings torses nus, le voile masculin) paraissent crédibles, autant j'ai trouvé que l'épouse avait juste l'air de jouer un rôle. Elle manque d'assurance dans sa démarche et son comportement, elle adopte trop une attitude "délicate" de femme élevée pour être douce, ça ne colle pas avec le monde inversé.
Quand elle marche dans la ruelle sombre, on est inquiet pour elle (et je trouve que les murmures ne servent pas le film du coup) parce qu'elle n'a pas la démarche qu'aurait un mec vénère qui va chercher sa voiture sans se préoccuper de son environnement.
Enfin, dernier truc, c'est pas tellement la population dominante qui est la plus montrée du doigt.
Dans les personnages potentiellement violents on a : la femme du nounou musulman, les racailles (généralement synonymes d'immigration ou de milieu social moins favorisé) et la SDF... Donc que des gens déjà discriminés par ailleurs. Les autres font plus du "sexisme ordinaire" que de la violence physique... Comme si les pires menaces ça venait des "autres" tandis que la population générale se contente de perpétuer.
Bref, pour moi, ce film n'a pas une vraie réflexion derrière : il se contente de coller des clichés de l'oppression des femmes les uns derrières les autres sans réfléchir ni à leurs mécanismes ni à leur portée.