Je n'arrive à rien décidément.
J'ai pas les mots, j'ai tout le temps mal, et je culpabilise quand je vais bien. Comme beaucoup, je ne connaissais personne. Mais je passe mon temps à pleurer, avoir les larmes aux yeux, me sentir mal. Et surtout j'ai peur, d'une peur atroce. J'ai souhaité me changer les idées en voyant mon amoureux hier soir plutôt que d'attendre à nouveau le week-end. On a voulu aller au McDo. Arrivés sur place, peu de monde pour un parking habituellement plein à craquer. Et surtout... Deux voitures de police, armés jusqu'aux dents, et une voiture fouillée, pleine à craquer. Jusqu'à ce que je vois deux policiers partir en courant vers ce fameux Mc Do.. J'ai fait la fière devant mon copain à dire que c'était rien, mais que je préférais aller autre part si ça le dérangeait pas. Jusqu'à ce qu'il me réponde : Moi aussi j'ai peur et qu'il démarre vite pour partir de cet endroit. Nous sommes rentrés manger chez ses parents... Ce n'était peut-être rien après tout. Mais j'ai eu peur, horriblement.
Je n'ai appris les événements que le samedi matin en me réveillant avec cent notifications, appels, messages... Je peux vous dire que ça fait un drôle d'effet et que j'ai réveillé mon copain en panique, en pleurant... " J'ai pas cours. - Pourquoi ? - ..." Et je n'ai pas pu me retenir, ni répondre, je lui ai simplement donné mon téléphone. Je n'ai jamais eu aussi peur. Je suis normande mais je fais mes études dans les Yvelines. Voici deux matins que je suis proche de rester dans mon lit plutôt que de me rendre en cours. Mais j'y vais quand même, car si je n'y vais pas aujourd'hui, il faudra pourtant bien que j'y aille le lendemain. J'ai peur pour mon copain qui se déplace sans arrêt sur Paris. J'ai l'impression que ça ne s'arrêtera jamais. Le fait de m'arrêter lorsque les sirènes de police passent 10 fois dans la journée à côté, lorsque j'entend un bruit sourd et que je me fige, que je prie pour que mon train arrive vite en gare... Mon copain fait une phobie des avions lui... On entend souvent les avions de chasse passer chez moi, il a peur qu'un jour, ce soit un avion qui s'écrase. Je me sens idiote, et je m'en veux parce que des gens ont perdu des proches ! D'ailleurs parmi ces gens, il y a certains de mes amis. Mais je n'arrive pas à camoufler ma peur chaque matin quand le réveil sonne. Même si je tente de la cacher parfaitement en cours. C'est trop. Tous ces morts, ces civils, notre capitale, nos cafés, nos restaurants, nos concerts et nos matchs de foot... Ce sont nos vies de tous les jours. J'ai toujours ce sang en tête, ces scènes décrites par des survivants, ces témoignages. Je craque, je ne peux plus le supporter. La nuit ne devient que la continuation de la journée puisque j'en viens à faire des cauchemars.
J'avais juste besoin d'écrire un peu, c'est décousu, c'est moche, probablement gouré de fautes, mais j'ai besoin d'extérioriser un peu parce que je n'arrive plus à porter la tristesse des gens autour de moi, ni leur peur. Je ne supporte déjà pas la mienne.