Personnellement j'ai été scolarité dans le "tradi" jusqu'au lycée. Ca s'est très mal passé.
Dans un premier temps ça allait parce que le patrimoine culturel de mes parents me permettaient de suivre en classe sans difficulté, mais arrivé à la fin du collège puis au lycée ça a été une catastrophe. Je n'arrivais pas à communiquer avec les gens, j'étais tout le temps fatiguée, la peur de ne pas assez dormir me faisait faire des insomnies chroniques. Souvent en rentrant de cours je m'effondrais sur mon lit et je n'avais plus la force de rien faire.
J'ai beaucoup souffert de manquer de temps pour lire et pour travailler sur ce qui m'intéressait réellement. Certains cours étaient passionnants, d'autres étaient du réchauffé pour moi, je supportais mal de devoir supporter les erreurs et les approximations des profs sans pouvoir les corriger ou sans pouvoir aller plus loin.
En premiere j'ai pu aller au Lycée Autogéré de Paris et ça m'a sauvé la vie ! Parce que ce dont j'avais besoin à ce moment là c'était de réapprendre à avoir des relations sociales, ne pas avoir peur des gens, assumer ce que j'ai à dire. Et ce lycée m'a permis ça, et pourtant je n'allais pas en cours. Ca m'a aussi apporté une formation politique et des grilles de lecture du monde différentes de celles qu'on apprend à l'école.
Naturellement je n'ai pas eu mon bac. Alors j'ai travaillé, et j'ai compris ce que c'était pour de vrai que d'être un prolo, de s'épuiser à un travail abrutissant etc.
Aujourd'hui j'ai vingt ans et je passe mon bac en candidat libre cette année. Sans ces deux expériences (un lycée alternatif et le monde du travail) je n'aurais probablement JAMAIS eu le courage de m'y mettre. Ca me paraissait tellement lointain et impossible il y a deux ou trois ans...
Je suis très soulagée de ne plus aller en cours. Je peux passer rapidement sur les matieres qui ne me demandent pas beaucoup d'efforts, travailler autrement sur d'autres (par exemple j'ai le temps de lire en anglais, de passer des heures sur Babbel), aller visiter plein d'expo et de musées pour enrichir mes dossiers d'histoire des arts. Je peux travailler à mon rythme quand je veux, voir des amis quand j'ai besoin de souffler, bosser la nuit quand je n'arrive pas à dormir et pioncer le jour.
C'est vraiment un soulagement, et pour la premiere fois de ma vie je suis très confiante sur ma poursuite d'études. Ce qui me paraissait être une montagne infranchissable est devenue une petite colline, toute mon angoisse à disparu.
Bon rien n'est gagné encore mais je pense que je manquais de maturité émotionnelle et intellectuelle pour aborder ça sereinement. Quand je lis des gens s'offusquer de la non-scolarisation je pense que ces gens oublient ce facteur : on a pas tous les capacités qu'il faut au moment où on nous les demande, et l'école est parfois très violente à ce niveau là. Combien d'élèves j'ai pas vu à deux doigts de défaillir à l'approche du bac ? Et pour quoi au final ?
A mon avis on présume un peu vite de la fénéantise des jeunes. Mais les enfants, les ado et les adultes sont avides de connaissances, et je vous assure qu'on apprend très vite et très bien quand on a décidé qu'on allait le faire et que c'est ça qui est le mieux à faire. Ca débloque tout.
Si un non sco veut devenir ingénieur il n'aura aucun mal à apprendre ce qu'il faut pour passer le bac, je n'en doute pas un seul instant.
Et je suis très très convaincue que tout ce que je sais aujourd'hui je ne le dois que très peu à l'école, parce que les sujets qui me passionnent comme l'ethnologie, la socio, le comportement et la psychologie animale, la botanique, les sciences politiques etc. n'y sont tout simplement pas enseignés. Et parfois l'âme est souvent plus forte que la raison : à 15-16 ans, je ne pouvais pas me résoudre à attendre la fac pour me gaver de tout ça.
Par ailleurs je trouve que pour ce qui est de trouver un travail pas nul (ça dépend quand meme du domaine) ça tient souvent moins au diplome qu'à la personnalité et aux contacts. Si on est très sociable, sur de soi et de ses connaissances, qu'on a des facilités à rencontrer du monde et à exprimer ses besoin, on a probablement plus de chances de saisir des opportunités que si on est très diplomé mais très replié sur soi.
Et puis je crois bien que les études qui permettent de trouver un bon travail c'est un mythe ^^ vous en connaissez pas vous des jeunes très diplomés qui ont que des taff d'employés ? Et vous avez une idée de vers quel genre de métier ça peut mener un master en socio ? Je vous le donne en mille : vraiment pas grand chose