Eh bien, puisqu'on en est aux confessions, allons-y.
Déjà, je trouve très important de faire un article comme cela, dans un espace comme mad où on parle beaucoup de sexe, sous presque toutes ses formes, et moins de son absence.
Moi aussi je suis vierge à 22 ans, j'ai tendance à le considérer de moins en moins comme un problème même si je ne suis pas encore à l'aise avec ça. Cela a commencé à me complexer dès le lycée, puisque je pensais qu'il fallait absolument perdre sa virginité avant d'aller à la fac, ça a continué dans le supérieur, puisque je pensais qu'il fallait perdre sa virginité à la fac, etc (jusqu'à la maison de retraite ?). Je n'ai rien pour justifier ça : je suis athée, je n'ai pas d'interdit sexuel particulier, je n'attends pas le mariage.
Mes angoisses plus précises, elles, ont changé. Ado, je pensais ne plaire à personne. Vers 17 ans, je me suis rendue compte que des mecs s'intéressaient à moi, mais voilà, moi je n'avais pas envie de coucher avec eux. La difficulté ce n'était pas seulement d'attirer quelqu'un, la difficulté c'était d'être attiré par quelqu'un. Cela m'a fait soulever pas mal de question (surtout celle que ma mère m'a posée à 16 ans parce que je n'avais toujours pas de copain (comme si c'était étrange, à 16 ans, l'âge ingrat, d'être célib) : homosexualité ?). Aujourd'hui, je réalise que je ne suis attirée que par des mecs, mais voilà, il me faut un paquet de temps, un peu comme le renard dans le Petit Prince, sauf que, entre temps, le Petit Prince ben il se trouve une autre copine (cette Rose) et voilà. Je parle bien d'attirance, pas d'amour, je demande pas d'être amoureuse pour coucher avec quelqu'un, juste d'en avoir envie et déjà ça c'est compliqué. Je me suis donc retrouvée dans la situation d'être attirée par des mecs que j'avais repoussés plus ou moins auparavant, ce qui est très con.
Après, on va pas se mentir, je pense qu'il y a un facteur qui me bloque : la peur de pas être à la hauteur, à plusieurs niveaux. Le niveau sexuel, tout d'abord (l'idée que je suis pas assez expérimentée, un peu comme on cherche un job quand on sort d'une école mais il faut 5 ans d'expérience dans le domaine). Le niveau "truc à la con", aussi : mal épilée, trois boutons sur mon épaule, ventre mou, vielle culotte etc. Enfin, et surtout, de ne pas être à la hauteur, intellectuellement, sentimentalement.
Quand un mec est attiré par moi, je me dis qu'il y a méprise, et que c'est de ma faute (et je culpabilise). Je me dis que je renvoie une image positive de moi, parce que je cherche un peu à séduire, au fond, mais que cette image est fausse : je joue la fille sympa, enjouée, cultivée etc alors que c'est que de la surface. Je me dis que si je laisse quelqu'un trop s'approcher il verra en dessous. J'ai conscience que c'est faux, que je ne pense pas ça d'une amitié donc cela n'a pas de raison d'arriver plus si un mec couche avec moi (pourquoi un amant passager se rendrait compte de défauts qui ont complètement échappé à mes amis jusqu'ici ?), j'ai conscience que c'est très influencé par le couple de mes parents (ma mère ayant été assez méprisée intellectuellement par mon père, je n'ai jamais vraiment su à quel point c'était la norme chez les couples mariés, cette humiliation de l'autre), j'ai conscience que c'est de la merde, mais voilà c'est comme ça. L'intime m'angoisse.
Evidemment, les gens comprennent pas très bien, on a vite fait de se faire traiter de frigide. Je me rappelle qu'à dix sept ans, j'avais refusé de coucher avec un mec qui m'hébergeait après un roulage de pelle en règle, je me suis prise cette insulte à la figure accompagnée d'un charmant "de toute façons, toi tu vas perdre ta virginité en te faisant violer, c'est pas possible autrement". Cinq ans plus tard, son affirmation attend toujours un démenti puisque je ne suis pas violée, et toujours vierge (suspense, suspense).
Bref, l'année dernière, je suis sortie avec un mec qui me draguait, parce que je me disais qu'il fallait le faire, se lancer, tant pis si on avait pas envie fallait se forcer. C'est terrible que j'ai pensé ça, parce que je suis donc sortie avec ce mec quelques temps, alors que oui il était très sympa mais je n'avais aucune envie de coucher avec lui, même de l'embrasser je m'emmerdais. On a pas couché ensemble, et franchement c'était une perte de temps pour tous les deux car j'aurai mieux fait de le considérer comme pote qu'autre chose. Donc, cela ne sert à rien de se forcer. J'avais des désirs sexuels à l'époque, juste, pas avec lui. Eh bah tant pis.
A côté de ça, je voyais des amies qui pouvaient être attirées par des mecs ou filles comme ça, hyper rapidemment, et je me disais mince, pourquoi je n'y arrive pas, pourquoi est-ce que je ne suis pas intéressée par les autres, qu'est-ce qui me manque ?
Ben rien. Je me suis rendue compte sur internet qu'il y a des gens, comme moi, qui sont un peu des tortues de l'attirance (certains s'appellent les demisexuels, mais j'aime pas trop classer les sexualités donc bon). On est attirées par des personnes avec qui ont a une connexion forte et en générale inscrite sur la durée (typiquement, des amis). C'est comme ça, c'est peut-être une passade, peut-être pas. Cela serait cool de la part d'internet et des gens en général de respecter ça, de ne plus demander "alors, toujours pas en couple ?", ou "mais il faut se lancer", de ne pas sexualiser les rares persos de fiction peu sexualisés (Captain America, vu pouvez pas savoir à quel point ça me fait plaisir qu'une vierge de 80 balais sauve le monde, et Sherlock Holmes, écrire du Watson/Holmes SM parce que Freeman et Cumberbatch sont trop sex c'est pas être corrosif et c'est pas célébrer la diversité des sexualités, merci). J'y vais quand je veux, y'a pas le feu au cul, mon vagin va pas disparaître par manque d'utilisation, et puis de toute façons si c'est qui inquiète les autres, les plaisirs solitaires cela peut tout à fait me permettre de vivre une vie de vierge complètement dépravée.
Voilà, soutien à tous ceux qui sont dans cette situation et pour ceux qui ne comprennent pas, j'espère vous avoir expliqué un peu un point de vue possible d'une vierge de vingt deux ans, au final assez différent du commentaire juste au dessus, plus proche de l'article, il n'y a pas une seule motivation et un seul vécu de la virginité Cela me fait du bien de l'écrire en tout cas, car si on est d'accord pour dire qu'il n'y a pas d'acte sexuel sans consentement bla bla de l'autre côté j'ai toujours l'impression de devoir justifier une moindre présence de sexualité. Hors cela devrait être la même logique, non ? Pas de justification nécessaire pour ne pas coucher avec quelqu'un, c'était le point de vue de la méchante frigide !
Déjà, je trouve très important de faire un article comme cela, dans un espace comme mad où on parle beaucoup de sexe, sous presque toutes ses formes, et moins de son absence.
Moi aussi je suis vierge à 22 ans, j'ai tendance à le considérer de moins en moins comme un problème même si je ne suis pas encore à l'aise avec ça. Cela a commencé à me complexer dès le lycée, puisque je pensais qu'il fallait absolument perdre sa virginité avant d'aller à la fac, ça a continué dans le supérieur, puisque je pensais qu'il fallait perdre sa virginité à la fac, etc (jusqu'à la maison de retraite ?). Je n'ai rien pour justifier ça : je suis athée, je n'ai pas d'interdit sexuel particulier, je n'attends pas le mariage.
Mes angoisses plus précises, elles, ont changé. Ado, je pensais ne plaire à personne. Vers 17 ans, je me suis rendue compte que des mecs s'intéressaient à moi, mais voilà, moi je n'avais pas envie de coucher avec eux. La difficulté ce n'était pas seulement d'attirer quelqu'un, la difficulté c'était d'être attiré par quelqu'un. Cela m'a fait soulever pas mal de question (surtout celle que ma mère m'a posée à 16 ans parce que je n'avais toujours pas de copain (comme si c'était étrange, à 16 ans, l'âge ingrat, d'être célib) : homosexualité ?). Aujourd'hui, je réalise que je ne suis attirée que par des mecs, mais voilà, il me faut un paquet de temps, un peu comme le renard dans le Petit Prince, sauf que, entre temps, le Petit Prince ben il se trouve une autre copine (cette Rose) et voilà. Je parle bien d'attirance, pas d'amour, je demande pas d'être amoureuse pour coucher avec quelqu'un, juste d'en avoir envie et déjà ça c'est compliqué. Je me suis donc retrouvée dans la situation d'être attirée par des mecs que j'avais repoussés plus ou moins auparavant, ce qui est très con.
Après, on va pas se mentir, je pense qu'il y a un facteur qui me bloque : la peur de pas être à la hauteur, à plusieurs niveaux. Le niveau sexuel, tout d'abord (l'idée que je suis pas assez expérimentée, un peu comme on cherche un job quand on sort d'une école mais il faut 5 ans d'expérience dans le domaine). Le niveau "truc à la con", aussi : mal épilée, trois boutons sur mon épaule, ventre mou, vielle culotte etc. Enfin, et surtout, de ne pas être à la hauteur, intellectuellement, sentimentalement.
Quand un mec est attiré par moi, je me dis qu'il y a méprise, et que c'est de ma faute (et je culpabilise). Je me dis que je renvoie une image positive de moi, parce que je cherche un peu à séduire, au fond, mais que cette image est fausse : je joue la fille sympa, enjouée, cultivée etc alors que c'est que de la surface. Je me dis que si je laisse quelqu'un trop s'approcher il verra en dessous. J'ai conscience que c'est faux, que je ne pense pas ça d'une amitié donc cela n'a pas de raison d'arriver plus si un mec couche avec moi (pourquoi un amant passager se rendrait compte de défauts qui ont complètement échappé à mes amis jusqu'ici ?), j'ai conscience que c'est très influencé par le couple de mes parents (ma mère ayant été assez méprisée intellectuellement par mon père, je n'ai jamais vraiment su à quel point c'était la norme chez les couples mariés, cette humiliation de l'autre), j'ai conscience que c'est de la merde, mais voilà c'est comme ça. L'intime m'angoisse.
Evidemment, les gens comprennent pas très bien, on a vite fait de se faire traiter de frigide. Je me rappelle qu'à dix sept ans, j'avais refusé de coucher avec un mec qui m'hébergeait après un roulage de pelle en règle, je me suis prise cette insulte à la figure accompagnée d'un charmant "de toute façons, toi tu vas perdre ta virginité en te faisant violer, c'est pas possible autrement". Cinq ans plus tard, son affirmation attend toujours un démenti puisque je ne suis pas violée, et toujours vierge (suspense, suspense).
Bref, l'année dernière, je suis sortie avec un mec qui me draguait, parce que je me disais qu'il fallait le faire, se lancer, tant pis si on avait pas envie fallait se forcer. C'est terrible que j'ai pensé ça, parce que je suis donc sortie avec ce mec quelques temps, alors que oui il était très sympa mais je n'avais aucune envie de coucher avec lui, même de l'embrasser je m'emmerdais. On a pas couché ensemble, et franchement c'était une perte de temps pour tous les deux car j'aurai mieux fait de le considérer comme pote qu'autre chose. Donc, cela ne sert à rien de se forcer. J'avais des désirs sexuels à l'époque, juste, pas avec lui. Eh bah tant pis.
A côté de ça, je voyais des amies qui pouvaient être attirées par des mecs ou filles comme ça, hyper rapidemment, et je me disais mince, pourquoi je n'y arrive pas, pourquoi est-ce que je ne suis pas intéressée par les autres, qu'est-ce qui me manque ?
Ben rien. Je me suis rendue compte sur internet qu'il y a des gens, comme moi, qui sont un peu des tortues de l'attirance (certains s'appellent les demisexuels, mais j'aime pas trop classer les sexualités donc bon). On est attirées par des personnes avec qui ont a une connexion forte et en générale inscrite sur la durée (typiquement, des amis). C'est comme ça, c'est peut-être une passade, peut-être pas. Cela serait cool de la part d'internet et des gens en général de respecter ça, de ne plus demander "alors, toujours pas en couple ?", ou "mais il faut se lancer", de ne pas sexualiser les rares persos de fiction peu sexualisés (Captain America, vu pouvez pas savoir à quel point ça me fait plaisir qu'une vierge de 80 balais sauve le monde, et Sherlock Holmes, écrire du Watson/Holmes SM parce que Freeman et Cumberbatch sont trop sex c'est pas être corrosif et c'est pas célébrer la diversité des sexualités, merci). J'y vais quand je veux, y'a pas le feu au cul, mon vagin va pas disparaître par manque d'utilisation, et puis de toute façons si c'est qui inquiète les autres, les plaisirs solitaires cela peut tout à fait me permettre de vivre une vie de vierge complètement dépravée.
Voilà, soutien à tous ceux qui sont dans cette situation et pour ceux qui ne comprennent pas, j'espère vous avoir expliqué un peu un point de vue possible d'une vierge de vingt deux ans, au final assez différent du commentaire juste au dessus, plus proche de l'article, il n'y a pas une seule motivation et un seul vécu de la virginité Cela me fait du bien de l'écrire en tout cas, car si on est d'accord pour dire qu'il n'y a pas d'acte sexuel sans consentement bla bla de l'autre côté j'ai toujours l'impression de devoir justifier une moindre présence de sexualité. Hors cela devrait être la même logique, non ? Pas de justification nécessaire pour ne pas coucher avec quelqu'un, c'était le point de vue de la méchante frigide !
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