J'étais d'accord avec toi au début, @Moab. Je trouvais que c'était en partie juste de déverser le salaire des profs de prépa à ceux de ZEP. Je ne me sentais pas du tout concernée par toute cette histoire, et ne voyait pas en quoi cela participait à "la mort des classes prépas" et tout le tintouin. Mais deux choses m'ont faite changer d'avis. Tout d'abord, mon prof de littérature sur la demande de la classe nous a livré ses arguments, qui m'ont interpellée. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Le projet du ministre de l'Education est de faire travailler les profs de prépa les 10h réglementaires tout en les payant au même salaire, ce qui conduit donc à une baisse de salaire de 6 à 20% de leurs revenus. Jusque-là, on est d'accord. On sait qu'un prof de prépa fait environ 8 ou 9h de cours par semaine. Mais les 1 ou 2h en plus, le prof de prépa va les faire devant qui ? Est-ce que cela veut dire que les élèves de prépa auront plus d'heures de cours ? Avec l'emploi du temps que nous avons, je ne vois pas comment c'est possible de nous rajouter, que ce soit en première ou en deuxième année, une heure de cours en plus dans chaque matière. C'est à ce moment-là que mon prof de litté intervient : selon lui, les profs de prépa seront peut-être obligés d'assurer des heures en plus dans le secondaire, ce qui produirait un effet en cascade et provoquerait donc une restriction de postes, qui toucherait aussi bien les lycées, collèges, que prépa.
Autre conséquence qu'il a soulevé : si les profs doivent bosser plus pour être moins payés, qu'ils devront faire le même nombre d'heures de cours devant une classe à 30 élèves que devant une classe à 40, ils ont, semble-t-il, tout intérêt à prendre moins d'élèves par classe. Et s'il y a une plus grande sélection, si on ne prends que les "meilleurs des meilleurs" si on peut dire ça comme ça, cela voudra-t-il dire que les classes prépas seront encore plus élitistes ? Ce que je n'espère pas, à long terme. Je trouvais qu'il y avait une certaine ouverture (en tout cas des prépa dites "de proximité") des classes prépa, même si, bien sûr, la logique reste la même et on prend les meilleurs. Mais j'ai une amie, par exemple, en prépa scientifique qui avait réussi à y rentrer avec onze-douze de moyenne en terminale, elle a aujourd'hui intégré une école d'ingénieur. Je pense que cela n'aurait pu être possible il y a quelques années.
Beaucoup de personnes disent qu'il y a derrière cette réforme une volonté de rompre le système de classes préparatoires. Mais ce que je ne comprends pas, et ma question est peut-être débile, c'est pourquoi. Si on s'attaque aux classes préparatoires, c'est qu'on s'attaque aux grandes écoles, non ? Sinon comment fait-on pour y entrer s'il n'y a plus de classes prépa ? Il y aurait donc une volonté de revaloriser la fac au détriment des grandes écoles ?
Pour ma part, si j'ai choisi la prépa, ce n'était pas pour le caractère élitiste ou parce que "je ne voulais pas me taper les deux premières années de fac" comme je l'entends souvent, c'était uniquement parce que je ne savais pas ce que je voulais faire et que je préférais continuer dans une filière la plus générale possible, ce qui n'est pas possible de faire à la fac puisque son principe-même est de se spécialiser. Je trouve donc dommage qu'il y ait une volonté de s'attaquer à ce système.
Une deuxième chose : je suppose que vous avez lu la lettre ouverte de cet élève en classe prépa de Condorcet ? Il semblerait que les impacts de ce projet soient en fait minimes, puisqu'il dit dans sa lettre que cela reviendrait à "6,5 euros" par professeur de ZEP par année, ce qui est ridicule (il faudrait que je vérifie cela, je ne sais pas sur quoi il s'appuie). Et si en plus l'Etat verse une "indemnité de 3 000 euros par an pour ceux qui exercent au moins 4h devant une classe de plus de 35 élèves" (cf
http://tempsreel.nouvelobs.com/education/20131129.OBS7604/pourquoi-les-profs-de-prepa-sont-ils-mecontents.html ), à quoi cela sert ?