J'ai lu vos débats avec attention et c'était très intéressant, mais du coup moi j'ai une question. J'ai beaucoup lu que les régimes étaient contre productifs etc... Quelle est donc la bonne méthode, au final, pour perdre du poids ?
(désolée si ça sonne un peu naif)
Je ne crois pas qu'il y ait UNE bonne méthode pour perdre du poids, il y a en a surtout énormément qui sont catastrophiques... J'ai beaucoup oscillé depuis mes 17 ans (jusqu'à +15kg et -8kg pour les "pics" les plus "brusques"), alors voici MON expérience (et certainement pas un tuto "faites pareil”). Voici la feuille de route que je m’étais faite, et que j’ai suivie :
1ère étape : s'aimer soi-même. Indispensable. En gros, j'ai passé du temps à définir "mon socle". Je SUIS belle. Je suis intelligente, je suis forte, mes émotions sont mes forces, je mérite d'être heureuse, d'être aimée, d'être respectée. Je me le suis répété devant le miroir, dans ma tête, je l'ai écrit, je l'ai répété à des ami·es à n'en plus finir (parce que c'est vrai pour moi, c'est vrai pour tout le monde, à commencer par mes ami·es bien sûr.)
J'ai su que j'avais réussi à consolider ce socle lorsque les remarques grossophobes ne me blessaient plus ; on ne m’a jamais insultée dans la rue mais mes proches (notamment en famille) pouvaient vraiment avoir des remarques piquantes ("t'es sûre que tu veux te resservir ? C'est pas bon pour ce que t'as !") Le jour où ces remarques ont déclenché chez moi un roulement d'yeux intérieur, une envie de répartie (que je suis ou non) à base de "au pire mêle-toi de ton assiette", ce jour-là j'ai compris que ça y est, mon estime de moi n'était plus atteinte par les remarques/petites violences extérieures.
2 ans de thérapie psy quand même hein, donc ne culpabilisez pas si vous n'y êtes pas... C'est pas comme si le reste de la société nous facilitait la tâche ! Et vous aurez bien remarqué sur mes apparitions vidéo/photo que je suis assez loin de l'obésité morbide... Que voulez-vous, il suffit d'avoir du gras au bide pour que des gens se préoccupent de votre santé/bien-être
Bref, étape 2 : une fois l'étape amour de soi validée, j'ai quand même envie de perdre du poids. Ah bon. Mais alors pourquoi ? C'était absolument indispensable pour moi de savoir POURQUOI, parce que sans objectif/raison/motivation précises, impossible pour moi de tenir un régime (j'y reviendrai) et impossible également d'en conserver les bénéfices... C'est aussi pour ça que la 1ère étape était indispensable : si tu veux maigrir à cause de la pression sociale, tu es partie dans une spirale négative assez destructrice... ça me parait compliqué d'obtenir un résultat positif dans ce contexte...
J'en était donc arrivée à ces raisons :
- je veux perdre du poids parce que j'aime le trail et la plongée sous marine, que la graisse abdominale est dangereuse en plongée, que l'excédent de poids est un problème en trail (pour les articulations, sur les longues courses). Ça, c'était l'objectif très long terme. J'ai aussi choisi un objectif court terme :
- je veux "me sentir en forme" : ne pas être essouflée dans les escaliers, pouvoir porter mes courses sans me blesser, etc.
Bon là vous remarquez qu'en fait, je ne cherchais pas spécialement à "perdre du poids" : je voulais surtout développer ma puissance musculaire :
- une ceinture abdominale renforcée : gainée pour le trail, la plongée, porter des choses lourdes, ne pas avoir de problèmes de dos
- des jambes puissantes pour le trail, une musculature qui protège mes articulations
Le trail et la plongée doivent s'accompagner d'un régime alimentaire sain, donc de toute façon il n'était pas question de manger des frites un jour sur deux. Et ça a été largement répété sur dix pages que c’est pas parce que tu manges bien que tu maigris. Vmvs.
Et développer du muscle, ça veut dire “peser plus lourd”. Exit donc l’indicateur “poids” sur la balance comme potentiel outil de suivi de mes objectifs, et adieu l’IMC pour les mêmes raisons… Déjà, vous remarquez qu’une fois des objectifs précis posés pour des bonnes raisons, ça rend le plan d’action plus “simple” à trouver (le mettre en oeuvre est une autre paire de manches, hein. Et par “bonnes raisons”, j’entends surtout que perdre du poids pour qu’on arrête de m’insulter, c’est pas une “bonne” raison, dans le sens où c’est pas lié : on ne t’insulte pas parce que tu es grosse. Tu es insultée parce que les gens qui t’insultent ont CLAIREMENT DES SOUCIS soit avec leurs propres représentations, soit avec le concept de vivre ensemble. Le problème est de LEUR côté. Pas du côté de ta balance, dans ce cas précis.)
Étape 2 : j’ai identifié mes véritables objectifs, parmi lesquels il n’y avait pas “devenir mannequin de lingerie”, ce qui m’a permis ensuite de changer mes habitudes de vie en conséquence.
Étape 3 donc : changer de vie.
Effectivement, tenir un régime sur 3 semaines ou 3 mois, j’y crois pas. Déjà j’ai jamais tenu, ensuite même “par accident” (voyage, maladie) lorsque j’altérais mon régime alimentaire pendant quelques semaines, bah je reprenais illico les kilos derrière. Ce que j’ai fait, c’est que j’ai complètement recomposé la manière dont je mange, dont je fais du sport. Mais sur les dix dernières années, pas du jour au lendemain.
Changer de vie, c’est long et c’est compliqué.
Déjà, il a fallu - toujours grâce à la thérapie - me débarrasser de mes TCA, très répandus vous les avez identifiés : je mange pour me récompenser, je mange pour me punir, je mange pour gérer le stress, je mange pour gérer la tristesse, j’arrête de manger pour tout gérer ou rien gérer, bref : une catastrophe physique et émotionnelle à long terme. Me rappeler quotidiennement que la gestion de mes émotions et la gestion de mon alimentation ne doivent pas être mêlées, mélangées, et certainement pas conditionnés l’un par l’autre…
(Je le répète : avec l’aide très régulière d’une psy, je n’ai pas dit que c’était facile.)
Ensuite, il a fallu repenser mes habitudes : me renseigner sur les valeurs nutritionnelles des aliments, leurs bénéfices, les modes de cuisson, leurs éventuels effets indésirables, leurs modes de production, etc etc etc. Faire de la place dans ma vie pour cuisiner. Faire de la place dans mon budget pour bien manger. J’en suis à faire de la place dans ma vie pour manger, ne plus le faire en bossant devant mon écran, ou en regardant une série systématiquement, mais en prenant le temps de ne faire que ça : manger un repas. Seule ou accompagnée. Y prendre du plaisir juste parce que je mange, pas parce que je mange ce plat pour me récompenser d’avoir fini une tâche relou, par exemple.
Enfin, l’activité physique. J’en ai mis partout, régulièrement. Je ne prends plus les ascenseurs, sauf si je suis trop chargée. Et encore, maintenant je monte les escaliers même avec un sac à dos. Je ne reste pas immobile sur les escalators, je les monte. J’inclus de la marche dans mes déplacements quotidien, je compte ça dans mes temps de trajet. Oui, ce serait 15min plus rapide en métro, mais tu sais quoi, je vais prendre ces 15 min et marcher pendant 30 minutes plutôt que de faire 15min de métro, parce que je n’aime pas le métro bondé, et que j’ai besoin de marcher, ça me fait DU BIEN. Ça me fait de l’espace, dans ma journée. Une coupure, si c’est pour retrouver un pote après le taf. Bref, c’est une démarche de bien être global.
Je nage, je marche, je cours, je me déplace en vélo… Je fais du renforcement musculaire “de base” dans mon salon — mais attention j’avais été formée à faire ces exercices dans le cadre de mon entraînement trail, ne les improvisez pas, ça vaut le coup d’aller payer une heure de coaching (ou de faire une séance d’essai gratuite en salle de gym
) pour réussir à apprendre correctement les exercices à faire, sinon tu risques de te faire plus de mal que de bien !
Je ne fais pas de sport “pour maigrir”, j’en fait “pour me sentir bien”, et c’est moi qui ai défini ce que “sentir bien” voulait dire, pas une couverture de magazine (cf étape 1), donc plus je m’entraîne, et mieux je me sens. J’ai jamais de “rechute” où je me dis “bordel, ça paie pas, tous ces efforts que je fais”, parce que j’ai pas mis de repère “visuel” sur mes résultats, uniquement un ressenti. Et les résultats du sports se font souvent sentir bien avant d’être “visibles”.
Les étapes 1 et 2 ont permis de “me stabiliser”. Je continue à osciller, notamment lorsque je suis soumise à un stress intense (j’ai clairement fondu ces derniers mois) mais les oscillations sont “contenues” à quelques kilos (parce que 8kg en moins sur 1m57 et 62kg, ça se voit. Je suis tombée à 57 en avril, je suis à 58kg maintenant. Gros stress, -4kg, récupération, 1kg. Ça n’impacte pas ma garde robe, c’est que ça va !). J’ai toujours des comportements résultants TCA, de type binge, mais vu que j’ai changé mon alimentation, ça va : avant, je bingeais des nachos. Cet été, quand je mangeais “trop” c’était : des tomates sur du pain à l’ail et à l’huile d’olive, des oignons. (Pain complet aux graines je précise, pas pain blanc). Bon. Au lieu de manger 3-4 bruschettas avec ma salade, j’en mangeais 8. Au-delà de ma faim, c’était clairement du réconfort émotionnel, mais franchement on était loin de ce que je pouvais avaler quelques années et même quelques mois auparavant en termes de stress-eating.
L’étape 3 vient consolider le travail des étapes 1 et 2 : je prends soin de mon corps d’un côté, de ma santé mentale de l’autre, de mes relations aux autres d’un autre par ailleurs. Et pas tout mélangé !
J’aurais donc pu répondre à ta question en une phrase : la bonne méthode pour perdre du poids c’est de changer ses habitudes de vie, pour la vie. Mais c’est forcément un peu plus compliqué à mettre en oeuvre…
En tout cas c’était mon propre chemin. J’ai toujours du gras au bide mais beaucoup moins qu’avant, et ça y est je prends plaisir à faire des séries d’abdo parce que ça y est, j’en ressens les bénéfices qui m’importent (j’ai beaucoup déménagé récemment, j’arrive à porter des charges lourdes, c’est ce que je voulais !!).
Si vous avez des questions précises sur mon témoignage, mentionnez-moi, j’essaierai d’y répondre !
PS EDIT : j'ai oublié de préciser que j'ai un problème hormonal, et je l'ai "compensé" en arrêtant les produits laitiers en 2012. Effectivement c'était quasiment impossible de perdre du poids tant que j'en mangeais, je ne les supportais pas mais j'avais pas fait le lien. Le problème hormonal est toujours présent mais "gérable" sans produits laitiers dans mon régime alimentaire.